Découverte intéressante que ce quatuor grec qui depuis 2006 pratique une musique simple, efficace et subtilement moderne dans son approche. DEATHVALVES a été fondé en 2006 du côté de Karditsa, et publie depuis près de quinze ans un LP tous les quatre ou cinq ans, avec une belle régularité. C’est d’ailleurs en toute franchise que leur premier effort affichait sans détour le titre de Wild Rock n' Roll Obsession, une profession de foi toujours d’actualité aujourd’hui, après deux autres albums en 2012, éponyme, et Dark Stories from the Past en 2016. Slaves prend le relais en 2020, et ne contredit pas les orientations passées, appuyant sur la corde Metal de quoi alimenter la réputation Rock, pour une musique se situant en convergence des deux fragrances. T. Sydrome (guitare/chant), Sakis (batterie/chœurs), Thanasis Valeras (guitare) et Chris Sven (basse) se proposent donc de continuer le travail en autoproduction, pour un quatrième tome de leurs aventures, et dix nouveaux morceaux rageurs, sombres, mais non dénués d’une lumière en mélodie de filigrane. On se croirait replongé dans l’énergie renouvelée des nineties, avec une patine Post Grunge assez patente, mais aussi des accointances avec le Rock anglais des ALMIGHTY. Cette rudesse est notable dès les premiers morceaux, qui malgré quelques arrangements épars font la part belle à une structure guitare/basse/batterie/chant classique, rentre-dedans, sans artifices ni gimmicks de production. Le groupe affiche donc une belle cohésion d’ensemble, ne propose rien de révolutionnaire, se contente de suivre son chemin en variant légèrement le tempo, l’accélérant à l’occasion, pour se rapprocher d’un Punk Rock métallisé de premier choix. C’est ainsi que « Memories » cavale d’un bon pas Rock n’Punk, toutes guitares acérées dehors, le tout agrémenté de quelques chœurs sommaires pour renforcer l’esprit d’équipe.
Difficile de dire toutefois dans quel créneau précis évoluent les grecs, puisque leur musique reste assez éloignée de toutes les tendances actuelles. On est parfois tenté de les ranger sur l’étagère du Rock alternatif, spécialement lorsque les mélodies sont plus prononcées, ce qui donne lieu à des hits qui auraient fait merveille dans les charts il y a plus de vingt ans (« On the Edge »). On apprécie plus particulièrement toutes les nuances d’un jeu de guitare qui tente toutes les attaques, de la saccade prononcée au power chord lâché lourd, en passant par les arpèges en son clair sur fond de rythmique tribale et symptomatique du rock sombre des années 80 (« In a Rut »). Rien de révolutionnaire en soi, mais un beau survol Rock de ces trente dernières années, avec une attitude sincère et légèrement bravache sur les bords, un peu Stoner dans l’esprit mais sans les lourdeurs greasy faciles, de la même manière qu’un 7 WEEKS le plus récent. La voix de T. Sydrome posée et agréable mène les débats, tandis que la batterie de Sakis ne manque jamais une occasion d’ajouter quelques fioritures, sous forme de cassures intermittentes ou d’accélérations fatales. Sans jamais dépasser les quatre minutes, ni s’écarter d’un chemin bien tracé, DEATHVALVES offre donc une grosse demi-heure de musique simple d’accès, mais riche dans le fond, de celles qu’on écoute pour se détendre et faire le plein de hargne sans perdre trop de sueur. Assez doués pour trousser de petits hymnes à la gloire d’un Hard Rock in your face, les grecs jouent crânement leur jeu sans trop se remettre en question et lâchent parfois des refrains qui restent dans la tête (« Snakebite »). Sans revendiquer d’influences, le quatuor se permet même quelques allusions plus amères, à ALICE IN CHAINS via le modulé « Against the Time », prototype de power-ballad sobre, mais élégante.
Dix morceaux unis par le même esprit, mais tous dotés d’une empreinte unique, voilà de quoi aiguiser l’appétit des rockeurs les plus exigeants. Probant en tempo lourd, le groupe l’est aussi en mid, qui devient trépidant sous les coups de baguettes de Sakis, batteur propre à la frappe précise qui a toujours la bonne idée pour relancer un morceau. Le percussionniste est d’ailleurs parfaitement secondé par un bassiste qui cherche le gros son, et qui le trouve, ce qui donne lieu à des percées plus personnelles, comme ce terriblement dansant « A World Behind ». Slaves, loin d’être esclave d’un style revendique donc sa singularité Hard, Heavy et Rock, et tape même au cœur de l’émotion avec le final « Lost Again », délicatement joué à l’acoustique, et chanté un peu fragilement par T. Sydrome. Sensibilité, efficacité, pugnacité, conviction, telles sont les qualités d’un quatrième album aux contours très professionnels, au rendu effectif, et aux arrondis parfois assez prononcés (« All or Nothing » et sa précision rythmique incroyable et digne d’une programmation). On tombe donc sous le charme d’un groupe qui ne fait pas de bruit, qui construit patiemment sa carrière dans l’ombre, et qui doit s’avérer machine très efficace sur scène, le côté brut de son Rock mis en avant par les conditions live. Une musique qui fait du bien dans cette ère nostalgique qui ne cherche que le démarquage facile, et qui s’écoute sans faire d’effort, étant juste assez fouillée pour ne pas être qu’un simple défouloir.
Titres de l’album :
01. Fight the Fire
02. All or Nothing
03. In the Air
04. Memories
05. On the Edge
06. In a Rut
07. Snakebite
08. Against the Time
09. A World Behind
10. Lost Again
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