Bon, là pour le coup, difficile de jouer plus franc jeu. Si certains s’amusent à travestir la vérité pour nous attirer dans de faux-filets, d’autres au contraire se montrent honnêtes, et affichent la couleur d’entrée. Un simple coup d’œil aux photos promo des FIRE STRIKE suffit à comprendre que le Néo Metal, le Djent, le Mathcore et toute autre extension/évolution du genre Heavy Metal ne les intéresse guère. Cuirs, lunettes d’aviateur, clous, mines patibulaires, vestes sans manches, la messe est dite, et en Metal majeur, de celui qui nous fait vibrer depuis le début des années 80. Il faut dire que ces originaires de Sao Paulo ont débuté comme tribute band sous le nom de HOLE OF HELL, reprenant à leur compte des standards de la NWOBHM, ceux popularisés par IRON MAIDEN, GRIM REAPER, ANGEL WITCH, ou SAXON, et qu’on hurlait dans nos chambres le point levé et la gorge déployée. D’ailleurs, la vocaliste de ce combo éminemment sympathique n’a pas perdu le reflexe, puisque ses envolées lyriques pleines de puissance sont à peu près aussi flamboyantes qu’une belle percée du Rob Halford de la grande époque. Dès lors, le jugement sera fait avant même d’avoir tendu l’oreille sur ce premier longue-durée, qui ne joue en aucun cas la carte de la sobriété. Certains esprits chagrins parleront d’une belle accumulation de clichés, mais les passionnés, les vrais, sauront qu’ils ont affaire à un vrai groupe nostalgique du Heavy de papa, qui a pris des rides depuis, mais qui jamais ne les décevra. Et il est évident que Slaves of Fate, de son titre à sa pochette, et de ses compositions à sa production ne viendra guère les contredire, tant on a le sentiment de se retrouver propulsé trente ou quarante ans en arrière, lorsque le Heavy anglais et allemand se disputaient le haut du pavé…
FIRE STRIKE, c’est d’abord une histoire, des musiciens, et un parcours. Formé en 2004, puis rebaptisé en 2005, le quintette (Aline – chant, Henrique et Helywild – guitares, Edivan – basse et Alan – batterie) a d’abord publié deux démos, l’une éponyme et l’autre en forme de profession de foi (Our Life Is the Heavy Metal, naïf, mais très honnête), avant de proposer un produit plus professionnel sous la forme d’un EP, Lion And Tiger, qui intéressa suffisamment le label Thirteen Records pour qu’il le distribue en version CD. Depuis, le groupe a pas mal tourné, pour peaufiner sa vision d’un Hard de tradition, qu’il n’entend nullement adapter à une époque un peu trop versatile pour ne pas oublier. Oublier l’importance des premiers arrivés, ceux qui ont suscité nombre de vocations, et qui se retrouvent dans la liste fournie de leurs influences. SAXON, JUDAS PRIEST, PRETTY MAIDS, GRIM REAPER, IRON MAIDEN, MANOWAR, TWISTED SISTER, ACCEPT, KING DIAMOND, MERCYFUL FATE, sempiternelles références auxquelles le combo ajoute quelques valeurs sures de la division d’honneur, tels WARLOCK, ACID, ou BLACKLACE, ce qui en dit plus long que bien des discours promotionnels. Et force est de reconnaître que les brésiliens n’ont pas menti, même si on pourrait ajouter à ce recensement les identités d’HELLOWEEN, d’ICED EARTH, de SCANNER, et autres groupes Power qui ont permis aux FIRE STRIKE d’assumer un net regain de puissance. Mais arrêtons-là ces comparaisons évidentes, et parlons de la musique en question. Sans surprise, celle-ci navigue en eaux troubles connues, et privilégie la franchise de riffs bien taillés soulignés de rythmiques frappées. Mais bizarrement, il est aussi possible de traduire le langage proposé en termes presque épiques et progressifs, puisque les morceaux de Slaves of Fire ne rechignent pas à accumuler les plans et idées, pour parfois flirter avec les sept minutes.
Premier écueil à passer, outre le passéisme flagrant et totalement assumé, la voix d’Aline, assez difficile à supporter quand les aigus sont exagérés. La chanteuse n’hésite jamais à en rajouter, et nous vrille les tympans de ses accès de lyrisme déchaînés, qui parfois condamnent la musique à une ombre qu’elle n’a pas forcément mérité. Il faut dire que la production accentuant la force et l’impact des médiums n’aident pas la pauvre vocaliste, qui grésille avec un peu trop d’insistance…Bien évidemment, tout ceci fait partie d’un cirque que nous connaissons bien, mais avouons que de temps à autres, le spectre du RIOT de Thundersteel ou d’un Jim Gillette de NITRO refait surface, avec ces tics insupportables qui visent à faire trembler toutes les Castafiore de la création.
En dehors de ce reproche somme toute assez pertinent, l’instrumental fait le job, et les musiciens se montrent à la hauteur des idoles qu’ils vénèrent. Si les riffs sont la plupart du temps des prétextes à planter une ambiance, les soli se montrent salement compétitifs, et la rythmique vraiment endurante, sans non plus tomber dans l’excès d’originalité. Tergiversant entre Heavy incandescent et Hard-Rock vraiment entraînant (« The Wolves Don’t Cry », joli exercice de style panaché entre un MAIDEN énervé et un JUDAS chromé), les brésiliens nous chauffent les chairs d’un crossover assez fascinant, pour peu que le Heavy coule dans votre sang.
D’ailleurs, ils mettent les cartes sur la table dès « Reach For Your Life », qui de ses tierces se veut d’une sincérité absolue. Cette entame ne dissimule en rien le message propagé, et qui place le Heavy le plus pur au-dessus de toute autre considération, même si le Power montre souvent le bout de son nez. Chœurs fédérateurs, guitares qui tranchent, pénètrent et effleurent, et tandem basse/batterie soudé comme un métronome qui assure une assise contrôlée. Certes, les textes feront sourire même les plus ardents défenseurs de la philosophie guerrière de MANOWAR, mais après tout, c’est le jeu, alors autant le jouer jusqu’au bout. Et la partie à laquelle nous convie le quintette est truquée d’avance, mais délicieuse. Nul honte à aimer se retrouver bercé par des thèmes qu’on aurait volontiers pensés usés, mais qui continuent de nous faire headbanguer, comme si nous n’avions jamais dépassé nos quinze années. Belles qualités épiques sur fond de cavalcade typique (« Master Of The Seas », celui-là, les GRIM REAPER ne l’auraient pas renié, mais encore une fois, Aline, modère un peu tes h’ardeurs par pitié…), émotions palpables qui dégénèrent en enfer sur terre (« Losing Control », et des arpèges qui font du bien au cœur et qui ménagent des tympans soumis à bien des heurts), sans oublier une efficacité qui pousse à lâcher des riffs acérés (« Lust »), le tableau est complet, et la visite bien organisée.
Il est évident que les brésiliens auraient gagné à réduire certaines de leurs compositions de quelques minutes, et leur album d’autant de temps, puisque avec presque une heure de menu copieux, l’estomac auditif en prend un peu trop dans les yeux. Mais on ne peut qu’admirer un groupe qui ne fait pas les choses à moitié, et qui sait respecter ses héros, en s’appropriant leur cape le temps d’un long numéro. Certes, il y a des chances que FIRE STRIKE fasse sourire les plus branchés d’entre vous, mais ils combleront de bonheur les plus nostalgiques, ceux qui arborent encore sur leur veste en jean des patches de la Vierge de Fer ou de la Sœur Tordue. Ceci dit sans aucune ironie, car après-tout, nous venons tous de là et d’ici…
Titres de l'album:
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