Quand tu étais petit, à la même époque où moi-même j’étais petit, tu essayais de faire rentrer des figures géométriques dans une sorte de boule, ce qui te rendait parfois dingue. En effet, l’étoile ne rentrait pas dans le cercle, le carré ne s’insérait pas dans le rectangle, et la lune te faisait gonfler la tienne. Ce jeu débile avait pour effet d’uniformiser la réflexion et d’apprendre très tôt à tout faire entrer dans une case. Salut l’anticonformisme, au-revoir les velléités d’indépendance et les esprits libres. Une chose à sa place et une place pour chaque chose. The end.
Heureusement pour nous, certains ne sont pas restés bloqués à ce stade, et ont continué de réfléchir par eux-mêmes. Des artistes qui n’avaient pas envie d’être guidés, d’être réduits à une étiquette, ou résumés par une pauvre formule lapidaire. Les italiens d’OTHISMOS font partie de cette catégorie d’affranchis qui jouent ce qu’ils veulent et qui se foutent royalement de flatter le poil de tel ou tel fan dans le bon sens. Après des débuts tonitruants sous la bannière Hardcore/Noise, le trio de Toscane a progressivement glissé vers un son plus personnel, si personnel qu’il est aujourd’hui très difficile de savoir ce qu’il joue vraiment.
Et c’est très plaisant.
Sottrazione est donc le troisième album des trois musiciens transalpins (Filippo Masina -basse/chant/textes, Luca Migliorucci - guitare et Matteo Maroni - batterie), et rompt avec une longue période de disette créative. Si l’orientation Black de Separazione a plus ou moins été conservée, l’approche à légèrement décalé son impact pour définir les contours d’un choc multiple. Mais c’est encore le groupe qui en parle le mieux :
Après une période d’inactivité et un nouveau batteur qui a rejoint notre line-up, nous revenons avec de nouvelles idées. Nous avons repris une partie du son Black Metal qui avait façonné notre album précédent et nous nous sommes penchés sur nos racines Punk et Crust, tout en laissant plus de place à la mélodie. Nous avons travaillé par soustraction, en adoptant une approche « less is more ». Sottrazione est colérique, sombre et extrême, parce que nous le sommes aussi. Nous ne rentrons dans aucune catégorie, et nous n’avons jamais essayé de le faire. Ce que nous espérons, c’est que Sottrazione frappe les auditeurs d’un impact brut et viscéral. Rien ne s’améliore, tout pourrit et s’estompe, nous sommes tous insignifiants et destinés à être oubliés. Il ne reste plus qu’à affronter la réalité et à exorciser la futilité.
Un résumé sans fard, sans gimmick et sans accroche facile. Les italiens continuent donc leur route à leur allure, histoire de ne pas marcher dans le vide. Et Sottrazione est effectivement très sombre, pas forcément Crust, subtilement punk dans le refus des convenances, Metal par affiliation, mais globalement Hardcore, comme s’il était joué par un groupe de Black habile et créatif.
Avec une voix mixée très en arrière et écorchée comme aux grandes heures des randonnées norvégiennes, une rythmique polyvalente qui refuse l’ancrage trop ferme, et une guitare qui écrit des rimes acides et des vers arides, le trio rappelle la scène Core la plus underground des nineties, lorsque des groupes comme BREACH faisaient évoluer le genre vers plus de brutalité et d’épaisseur.
Mais fi des étiquettes, et embrassons l’originalité les bras grands ouverts. Rejetant la possibilité d’un track-by-track qui ne servirait pas à grand-chose, ce troisième album est un bloc de haine, un regard féroce sur notre époque, et le refus de se croire au-dessus des intérêts les plus élémentaires. Comme une leçon de vie anticipant la mort, ce disque est compact, ombrageux, agressif et miséreux, avec des crises de colère qui éclatent en mode instrumental, avant que le chant ne reprenne ses droits de la façon la plus véhémente qui soit (« The Shape of Pain to Come », un signe de la main à REFUSED qui doit se dire qu’un peu de Black dans son Hardcore politisé ne serait pas de refus).
Des percussions tribales, des allusions au Post-Hardcore, une fine couche de glaçage alternatif Indie, et Sottrazione s’insinue en vous comme un virus ayant muté une bonne dizaine de fois. La maladie laisse des séquelles, une déprime persistante, une énergie à plat, et un regard vide, mais la prise de conscience est nécessaire. Inutile de jouer les béotiens, la partie est terminée.
Gonflé, expulsé, exhorté, OTHISMOS n’a jamais été aussi brillamment laid. Ces traits disgracieux, ce discours fielleux contribuent à rendre l’image du groupe encore plus trouble, et achève de laisser les italiens flotter dans les limbes de l’inconnu musical.
OTHISMOS n’est ni un cube, ni une étoile, ni un rond. C’est une entité protéiforme qui rentre où elle veut quand elle le veut. Et probablement jamais d’ailleurs.
Titres de l’album :
01. I Will Fade Away
02. Cops Are not People
03. Burn the Flags
04. The Mirror
05. Pars Destruens
06. They Declared War on Us
07. The Shape of Pain to Come
08. Death Forever
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01/05/2025, 09:11
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29/04/2025, 08:26
Et pitié plus jamais de thrash//bllack/death à la con, choisit ton camp camarade !.
29/04/2025, 02:27