Imaginons qu’avant la grande saison des festivals, vous soyez soudainement pris d’une soif de Progressif, histoire de partir sur les routes ensoleillées avec un minimum de bagage culturel structuré. Soit, rien n’empêche de se faire une bonne bière à cinq euros au soleil en se gavant de Heavy allemand bien cuit, mais rien n’empêche non plus, avant de se transformer en barbecue auditif, de nettoyer ses oreilles avec une bonne dose de morceaux travaillés et ciselés.
N’est-il point ?
Si tel est le cas, soyez heureux, j’ai exactement ce qu’il vous faut. Mais je ne suis pas allé chercher la solution en Allemagne (sans aucun mépris, évidemment), mais plutôt dans la région de Seattle, aux alentours de Mukilteo, Washington.
Une petite ville qui abrite en son sein un quintette de musiciens à la technique affirmée et aux inclinaisons complexes, qui en ce mois de juin capricieux nous narrent leurs vues sur un Metal progressif hargneux et mélodique, totalement en phase avec son époque.
ESOSON, un nom étrange pour désigner cinq instrumentistes, Joshua McAdams, Chance Monaghan, Gabe Brooks-Lopez, D.j. Rough et Sara Herrschaft, qui « invitent l’auditeur à un voyage harmonique, infusant des flambées de mélodies et des changements de signature, des grooves synchronisés aussi inattendus que captivants »
Leurs influences ? Ils concèdent un penchant certain pour les références habituelles que sont les TESSERACT, MESHUGGAH, ou BETWEEN THE BURIED AND ME, auxquelles on peut aisément ajouter sans trop se tromper l’ombre du DREAM THEATER le plus agressif, et l’égide d’un PERIPHERY plus adouci, histoire de peaufiner le tableau déjà dessiné avec une grande précision.
Le but de cette assemblée hétéroclite d’amoureux du détail mélodique et rythmique était de synthétiser en quelque sorte tous les courants ascendants du Progressif, et de les amalgamer dans une vision globale, en saisissant les aspects les plus pointus comme les impulsions les plus ténues.
De ce côté-là, la mission est clairement accomplie, puisque les américains sur ce Sound Within multiplient les ambiances, jouent avec les textures, les arrangements, tout en utilisant des thématiques assez précises et balisées en arrière-plan, pour ne pas noyer leur public potentiel sous une avalanche d’informations. En gros, une rythmique qui pratique l’art consommé de la rupture, des guitares qui nous guident de riffs épais ou de volutes de notes dispersées avec parcimonie, et une chanteuse qui profite des interstices qui lui sont offerts pour offrir des digressions certes assez systématiques dans les accents, mais assez justes dans le ressenti.
Bilan positif ?
Oui, il faut bien l’admettre, même si comme pour toute tentative ambitieuse en terrain progressif, les embourbements restent occasionnels, ainsi que les atermoiements rythmiques parfois un peu trop itératifs. Mais nous sommes quand même assez loin des lénifiantes mélodies du DREAM THEATER le plus complaisant, et de la rigueur mathématique épuisante d’un MESHUGGAH qui a tendance à radoter avec les années.
Au niveau des points positifs à souligner, la complémentarité des voix sur certains morceaux (dont « Apollo » reste un des meilleurs exemples), qui fait s’affronter des growls masculins tout à fait propres, et des digressions lyriques féminines éthérées.
Ce titre est d’ailleurs selon votre humble serviteur l’un des plus efficaces de l’album, avec son schéma un peu étrange et sa polyrythmie décomplexée, et se veut exact milieu entre la force d’un PERSEFONE et la grâce céleste du THE GATHERING le plus stellaire.
Comparaison en équilibre ?
Parfaitement adaptée au morceau justement, qui marche sur le fil, et qui malgré quelques notes un peu fragiles sur les poussées les plus aigües, se présente comme une facette intéressante de ce Crossover que les ESOSON prônent à grand renfort de métaphores. Et comme les guitaristes osent quelques chromatismes typiques du Jazz, la pilule passe comme un joli mélange de KING CRIMSON et DEVIN TOWNSEND sur un break qui effectivement, est aussi « inattendu que captivant ».
Mais avant d’en arriver là, il vous faudra passer par la case « It’s Logical ! », et son point d’exclamation qui risque d’en provoquer quelques-unes dans vos tympans. Le groupe n’hésite pas après une très courte intro à s’embringuer dans un dédale de près de neuf minutes, qui pose les jalons de leur style, et accumule les propositions et compléments autour du sujet d’un thème solide, qui rappelle même sur ses premières secondes les accents du progressif des 70’s, sans pour autant piocher sans vergogne dans les coffres de Canterbury. Nappes de clavier à la Neal Morse/Jordan Rudess, poussées Néo Thrash à la limite du Death, soudainement brisées dans leur fièvre par des soli cosmiques, et les minutes s’enchaînent aux breaks, aux interventions de guitare personnelles, pour un ballet étourdissant de brio, gardant la pression sans aucune marque de relâchement.
Un travail de pros, qui ont su garder la passion d’amateurs qui aiment ce qu’ils font, sans chercher à surclasser ce qui ne peut l’être.
Niveau chapitres empilés, « Lost Transmission » se présente comme l’épilogue/acmé qu’il se devait d’incarner, et ose des harmonies vocales doublées, subjuguantes de beauté en introduction d’un piano délicatement caressé. On sent que le groupe lâche tout ce qu’il a dans le ventre pour nous convaincre de sa pertinence, et l’opération séduction fonctionne à plein régime, malgré quelques repiquages d’idées antérieures assez flagrants. Mais après-tout, nul ne peut se targuer d’être inédit sur la longueur, et ces quelques répétitions sont vite occultées par des arrangements spatiaux savamment orchestrés.
Le groupe s’en amuse d’ailleurs beaucoup sur l’entame de « Solar Prominence », qui dégénère vite en démonstration Jazz Metal progressif, tandis que « Sirens » se veut beaucoup plus abordable dans sa construction évolutive dominée par un duo basse/batterie en pleine effervescence de créativité (jolie preuve de communion d’ailleurs), qui soutient de tout son poids un chant multiple et léger comme une bulle de savon.
Mais en définitive, et dans un créneau aussi surreprésenté que le Metal progressif, les ESOSON s’en sortent avec une mention plus qu’honorable. Disposant d’une production en tout point équilibrée et dynamique, Sound Within est un album qui se savoure en plusieurs prises, et qui ne se révèle pas dans ses premiers déhanchements.
Fier mais pas prétentieux, technique mais légèrement malicieux, c’est un disque qui aura sans doute du mal à convaincre les hordes d’un festival d’été, mais qui saura vous combler une fois la saison terminée.
Titres de l'album:
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