Commencer les chroniques de 2017 avec un album paru en février 2016 est un peu étrange en soi, mais pas tant que ça au regard du parcours du groupe en question…
Peu d’entre vous connaissent peut-être les VALGRIND, et pourtant leur naissance remonte au début des années 90. Mais depuis, leurs parcours semble avoir été émaillé de perturbations, de contretemps, à tel point que leur premier album ne vit le jour qu’en…2012, année plausible de la fin du monde.
Mais on le sait, le monde a continué de tourner, et le leur plus vite que d’habitude.
Après avoir enchaîné les démos à vitesse grand V, dont trois entre 1995 et 1998, après avoir sorti enfin un EP plus consistant en 2002 et s’être séparés dans la foulée, les VALGRIND ont enfin trouvé le moyen de s’exprimer sur un longue durée, exploit qu’ils ont réédité il y a quelques mois avec cette sortie sur Lord of the Flies Records.
Le temps a donc passé, assez rapidement, pour autant, l’optique du combo n’a pas changé d’un iota depuis ses débuts, puisque ce Speech Of The Flame est beaucoup plus emprunt du Death en vogue dans les nineties que son pendant contemporain.
D’aucuns parleront de passéisme un peu désuet, les autres évoqueront une foi sans faille dans la violence instrumentale telle qu’elle était pratiquée en Suède et en Amérique il y a vingt et quelques années. S’il est vrai que l’approche des Italiens est assez nostalgique, elle n’en garde pas moins une certaine prise avec la réalité, et surtout, le réalisme d’une efficacité prouvée et démontrée par des combos tels que DEICIDE, UNLEASHED, NOCTURNUS, mais surtout le PESTILENCE le plus agressif, celui de Malleus Maleficarum et Consuming Impulse, que les VALGRIND semblent vénérer sans aucune gêne.
Mais ils ne viennent pas de Gênes, mais plutôt de Bologne, et se présentent en 2016 sous la forme d’un quatuor, mené de main et gorge de fer par Massimiliano Elia (guitare et chant), épaulé depuis l’origine par Daniele Lupidi à la basse.
Les ont rejoint Gianmarco Agosti à la batterie en 2013 et Umberto Poncina à la deuxième guitare l’année dernière, pour renforcer l’efficacité et la cohésion d’un groupe terriblement compact, qui n’a pas oublié les préceptes du Death tels qu’ils ont été énoncés dès l’émergence du style.
En gros comme en détail, Speech Of The Flame est un passage en revue de toutes les figures imposées du style, des rythmiques concassées ultra écrasantes aux riffs taillés en biseau, le tout engoncé dans des lignes de chant gravissimes, qui s’accordent très bien de ce déferlement de violence qui parfois cède le pas à des mélodies frigorifiées, dans la plus grande tradition scandinave.
Alors pour évacuer toute réflexion désagréable, oui, on a déjà entendu ça des milliers de fois, en mieux, en moins bien, mais l’investissement de ces musiciens est intégral et ne saurait être remis en cause par des arguments de « déjà entendu » infondés dès le départ puisque le quatuor n’a jamais affirmé jouer autre chose qu’un Death violent assez classique.
Dès lors, une chronique s’avère très vite futile dans ses fondements même, puisque ce second album des VALGRIND ne se dissèque pas vraiment par des mots, mais se ressent par son agression permanente qui ne crache pas sur un brin de subtilité technique.
Dotés d’un potentiel certain, les musiciens s’en donnent à cœur joie et récitent les tables de loi du Death de tradition, empruntant de ci de là des éléments inhérents à la culture de MORBID ANGEL, de PESTILENCE donc, mais aussi de SUFFOCATION, sans jamais tomber dans l’excès ou le plagiat trop prononcé.
Un Death primal, mais assez élaboré, qui parfois privilégie les ambiances un peu macabres aux harmonies amères (« Speech of The Flame » et son final qu’on penserait tiré de Blessed Are The Sick), et qui se complait dans un mélange de pesanteur extrême et d’accélérations fatales (« From the Darkest Womb »)
La force des Italiens réside sans doute dans cet enchevêtrement de plans aussi complémentaires qu’opposés, lorsque la vitesse cède le pas au malaise, un peu de la même façon que le ENTOMBED des débuts savait distiller les coups de sang et les mornes désolations contemplatives.
Morceaux homogènes, même si le disque semble parfois un peu long et veut trop en proposer, mais néanmoins, un album qui s’écoute sans déplaisir, bien au contraire, et qui se finit même par une longue progression assez envoutante, enroulée dans des guitares qui tournoient et des blasts qui foudroient (« Echoes Of The Titan »). Soli inspirés, riffs vraiment calculés sans perdre la spontanéité, chant monocorde qui sait varier le ton quand l’exige le fond, rythmique compétitive, et finalement, un panaché assez convaincant des racines du genre (« Tyrants »).
Bien évidemment, les images sonores affluent à la surface de la conscience en plus d’une occurrence, mais avec un batteur de la trempe de Gianmarco Agosti, qui pourrait passer pour le fils illégitime des amours percutants entre Gene Hoglan et Hellhammer, et un leader comme Massimiliano Elia qui unit dans un même élan le talent d’un Chuck Schuldiner et l’animosité vocale d’un Martin Van Drunnen, la partie de dupes était presque gagnée d’avance, et Speech Of The Flame un pari remporté haut la main.
A vous de voir si les années passées ont profité aux VALGRIND, et si leur Death formel a encore sa place dans une époque vouée à l’innovation permanente en matière d’extrême.
Mais avec cette petite touche personnelle insufflée à des influences majeures, ce second LP à bien des armes pour séduire les fans de Death aussi technique que radical, et je suis assez heureux de constater que l’opiniâtreté paie parfois.
Alors après, chroniquer un album de février 2016 en janvier 2017 n’est qu’une anecdote en soi. Seul compte le résultat est celui-ci est probant.
La mort pour débuter l’année. Quelle belle ironie. Mais nous y passeront tous n’est-ce pas ?
Titres de l'album:
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