Je les ai vus venir de loin ces allemands avec leur lame de fer. Après tout, le Heavy Metal a toujours été à la mode outre-Rhin, même lorsque le reste du monde passait la main pour céder à la mode. Alors, l’Allemagne, le pays le plus fidèle à ses gloires d’antan et à ses petits jeunes grimpant ? Sans hésitation possible, et le public de Berlin, Berne ou Lübbenau n’aime rien tant qu’un bon hymne Heavy Metal un peu corsé, histoire de dérouiller ses bracelets cloutés.
Ceci étant dit, aucune condescendance de ma part dans cet état des lieux. J’ai moi aussi grandi au son de la NWOBHM, avant de m’orienter vers des choses plus extrêmes, mais je ne crache jamais sur un brin de traditionalisme. Et après tout, IRON BLADE a suffisamment d’arguments probants pour trouver grâce à mes tympans. Fondé en 2012, l’année de son premier EP, IRON BLADE a tout du héros Metal dans toute sa splendeur, avec armure, heaume, épée tranchante et refrains puissants. Il y a déjà six ans, le collectif allemand nous avait gratifiés d’un premier longue-durée, éponyme, qui avait secoué l’underground rétrograde au point de conférer au quatuor un statut d’outsider enviable. Et aujourd’hui, le groupe revient avec certaines ambitions, et un panache indéniable dans le mélange des influences.
Stormrider est une tempête que doit affronter un noble chevalier, rompu à l’exercice de la furie Heavy Metal tirant sur le Power. Mais on trouve aussi dans sa besace quelques astuces Folk de bon ton, pour conférer à cet album une aura de chanson de geste, ou de légende racontée au coin du feu lorsque les yeux des enfants commencent à fatiguer. Et on en prend plein les oreilles dès l’hymne introductif « Hell Yeah!!! » qui en cinq minutes rappelle pourquoi les allemands étaient attendus au tournant.
Et immédiatement, la machine s’emballe, parfaitement huilée, et tournant à bonne cadence. On reconnaît dans cette franchise quelques influences incontournables, METALLICA pour ces riffs subtilement thrashy, RUNNING WILD pour la tradition Metal, et BLIND GUARDIAN pour ces œillades mélodiques bien placées dans un contexte de furie instrumentale. Epique comme il se doit, Stormrider prend donc son temps pour narrer ses aventures, et impose sans ambages son point de vue nostalgique, comme si les années 80 n’étaient jamais mortes dans d’atroces souffrances.
On prend note de ces chœurs évidemment guerriers, de cette pugnacité rythmique qui laisse un batteur solide placer quelques figures, cette dualité de guitares en perpétuelle démonstration de solidité, et ce chant franc, un peu voilé, à la manière d’un James Hetfield plus câlin que d’ordinaire. Impossible non plus d’oublier HAMMERFALL, ICED EARTH, mais au final, les références ne sont pas l’aspect le plus important de cette entreprise : seule la foi compte, et seuls les morceaux importent. Et ces morceaux sont la plupart du temps bien construits, évolutifs, et se terminant parfois dans une orgie de violence en soli incendiaires (« King »).
Du Heavy pur jus donc, qui regarde en arrière, mais qui se projette aussi dans le futur d’une vague old-school qui finira par périr sur son propre bucher. De fait, IRON BLADE s’échine à insuffler à sa musique une impulsion plus personnelle, histoire de se démarquer de la nombreuse concurrence.
Sans être un fan du genre, sans coudre des patches sur ma veste en jean à chaque nouveau concert, et sans dévaliser une quincaillerie avant d’aller faire les courses en enfer, je dois reconnaître que cet album m’a convaincu. Avec son léger parfum MANOWAR distillé dans des effluves à la OMEN/CANDLEMASS, IRON BLADE séduit, joue sur terrain lourd avant de laisser les chevaux galoper, et nous emporte dans ses contes et légendes, fort d’une conviction que personne ne mettra en doute. « Unending March », lourd comme le pas des soldats en conquête d’un nouveau territoire, « Fuel In My Veins », entre METALLICA et SCANNER, « Lone Wolf » petite merveille de Metal progressif épique avec sa longue évolution mélodique contribuent à renforcer le caractère sympathique de cette aventure musicale.
Aussi conformiste qu’un live de MAIDEN, aussi puriste qu’une compilation de JUDAS PRIEST, aussi conquérant qu’un hymne de RHAPSODY, Stormrider nous ramène au meilleur des eighties, avec une tendance très personnelle qui frise l’allusion Thrash avec beaucoup de panache. Ainsi, le final « Mental Slavery » rappelle les grandes heures du BLIND GUARDIAN le plus véloce des jeunes années, voire d’un ANNIHILATOR passé par l’Allemagne pour rentrer au Canada.
IRON BLADE sait se servir de son épée, et pourfend les adorateurs du veau d’or false Metal. Que la sentence soit appliquée.
Titres de l’album :
01. Hell Yeah!!!
02. Stormrider
03. King
04. Unending March
05. Fuel In My Veins
06. Beware Your Inner Demon
07. Lone Wolf
08. Mental Slavery
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