« Dans le Languedoc, à Tombouctou, dans l’Orénoque, n’importe où, les gens se toquent pour le Boogaloo, si vous me prêtez votre instrument, je vais vous chanter un truc fumant, c’est plus qu’un tube, c’est un monument »
Avec un peu de chance, vous êtes comme moi né à l’orée des seventies regrettées, et vous aurez donc, avec un peu de culture populaire, reconnu ces quelques paroles utilisées en entame à peine référencée. Oui, « Le Boogaloo du Loup-Garou » était un tube que le jovial Carlos entonnait sur les plateaux télé en compagnie d’un Joe Dassin habilement déguisé en créature griffue et affamée. Je l’ai chantonné pendant des années, je le chantonne encore à l’occasion, sans réel succès quant à convaincre mon entourage de son statut culte. C’est bien joli tout ça me direz-vous, et récréatif, mais qu’est-ce que Carlos et Joe Dassin ont à faire dans une chronique supposé métallique ? Rien, c’est un fait, mais entre le Boogaloo rondouillard et le BRUT BOOGALOO Norvégien braillard, il n’y avait qu’un pas que j’ai allégrement franchi. Et comme la musique intrépide et accrocheuse du quatuor d’Oslo a largement de quoi convaincre les fans du Languedoc à Tombouctou, pourquoi se gêner dans le parallèle culotté et imagé ?
Mais BRUT BOOGALOO est une affaire autrement plus sérieuse, et ce, depuis une bonne dizaine d’années et deux, puis trois LP. D’ailleurs, ce troisième pas en est un de géant, et risque de faire exploser la côte de ces musiciens du froid, pourvu que les bonnes oreilles sans bonnet s’y collent tout en émoi.
Capables donc, mais pas vraiment productifs, et ils assument. Il leur aura fallu huit ans pour donner un successeur à leur dernière offrande, publiée en 2009, mais gageons que les années perdues ne l’auront pas vraiment été, puisque les musiciens (Henning Solvang – chant/guitare, Peter Olofsson – guitare, Peter Boström – basse et Børge Sageng Henriksen – batterie) en ont profité pour jouer, jouer et rejouer, arpentant les scènes pour parfaire leur réputation live qui semble t’il n’est pas usurpée. N’ayant jamais eu la chance de les voir performer, je me contenterai de baser mon opinion sur ce Strike III, qui en l’état, est l’un des meilleurs témoignages vintage Classic Rock de ces dix dernières années. En se voulant ouvert mais sans bouffer à tous les râteliers, il parvient à unir dans un même élan l’euphorie d’un Rock seventies légèrement psychédélique, la simplicité d’un Rock pas si mainstream qu’il n’y paraît, et le lyrisme des grandes œuvres qui ont constellé l’histoire de la route US, avec ces kilomètres avalés au doux son d’un bande originale décomplexée. Naturel, efficacité, propension à disséminer des mélodies accrocheuses sous les traces de leurs pieds, les BRUT BOOGALOO ont en effet un déhanché assez brut, mais n’en sont pas pour autant de simples Neandertals à peine capables de moduler. S’il est difficile de contenir leurs influences tant leur champ est multiple, on pourrait citer à la volée, et pêle-mêle JET, Tom PETTY, les STAGE DOLLS, BLUES PILLS sans le côté trop empêtré dans le douze mesures, mais aussi les MONKEES, et pas mal d’autres références sixties, seventies, le tout traité avec un minimum de modernité pour ne pas stagner.
C’est donc du Rock simple tout craché, mais joué avec les tripes tout en gardant le contrôle sur l’abrasivité. Pas de fuzz’ qui dégouline, pas de wah-wah qui s’éparpille, pas d’écho et de delay intempestifs, juste un excellent Rock bluffant, qui nous prend au cœur et nous réchauffe en chœur. Des musiciens solides qui connaissent leur boulot, et qui se permettent de signer une bonne dizaine de brulots, que leurs aînés/héros d’une décennie acclamée auraient sans doute pu composer. Prenons pour exemple le hit en puissance « Top Of The Molehill », qu’on imagine très bien signé par BOWIE pour SWEET, ou l’inverse, ou « Afterglow » que des STONES plus obnubilés par les harmonies que par les smarties auraient pu balancer sur un Exile On Main Street moins expatrié. On pourrait aussi aborder le groove d’une section rythmique crue qui s’accorde très bien de phrasés ventrus (« Shadow From The Past », que les RED HOT pourraient paraphraser s’ils s’occupaient plus de DAG que de leur ego), ou de cette touchante simplicité qui pousse le quatuor à relativiser, et à se considérer comme le groupe le plus humble de la cité (« Band For You », up tempo d’enfer pour saillie Bob SEGER/YARDBIRDS en hiver). Guitare carillonnantes qui autorisent les BYRDS à justifier une caution NERVES/PLIMSOULS à postériori, le tout teinté d’un psychédélisme de folie (« Get Your Heart », le plus proche d’une union entre Folk sous acides et Vintage Rock intrépide), pour un Rock pas si limpide, et qui trouble la mémoire d’une basse assassine et humide (« King of Crap », vocoder, phaser, et effets utilisés avec efficacité).
Exercice de style ? Tout sauf ça, et une naïveté dans l’amour des classiques qui frappe et laisse hébété. Tous les morceaux de ce Strike III te frappent toi, cher auditeur qui aura certainement beaucoup de mal à te remettre de cette leçon en nostalgie majeure qui pourtant ne tourne pas le dos à son époque. Même si la production va chercher la crudité sans artifices d’une batterie en écho et d’une basse en ondulations à la Zorro, l’impression est nette et sans bavures, et adapte des standards d’un autre temps au notre. Et dans la déferlante tenant presque de la brocante des groupes qui s’enivrent d’effluves chargées d’années 70 qui commencent à s’épuiser, les BRUT BOOGALOO font figure de bouée, au point de rappeler le meilleur GRAVEYARD (c'est-à-dire, le seul et le permanent), lors d’une conclusion en émotion majeure, accentuée d’une giclée de soli enflammés qui consument un Rock bluesy passionné (« One For All »). Donnant un aperçu du spectre de Bolan à l’occasion d’un sensuel et déviant « Hurricane Train », payant son tribut aux « Telegram Sam » et autres « Ride a Black Swan », les norvégiens n’en font qu’à leur tête en respectant les grands anciens, et nous collent une sacrée rouste Rock que les plus puristes accepteront sans broncher. Un album qui nous fait piger que les mois et années passés sur des routes enneigées ont fini par payer, et transformer le quatuor en mécanique bien huilée, qui laisse parler sa nature plutôt que de copier des voisins peu inspirés. Et conséquemment, Strike III devient un LP qu’il convient de mettre en avant, pour ses quarante minutes de musique aussi spontanée que séduisante.
Album de la semaine, du moins ou du trimestre, ce troisième effort venu du Nord vous chatouillera la corde sensible et fédèrera les amateurs d’un Rock sincère, direct, mais suffisamment nuancé pour tout se permettre. Vintage d’accord, mais Rock d’abord. Et aucune chance qu’un chanteur barbu à la bonhommie poilue vienne nous interpréter ça à la TV avec un pote costumé. C’est déjà ça de gagné…Ah et au fait, lors d’une interview, Nicke Andersson que l’on ne présente plus, a affirmé que les BRUT BOOGALOO était le meilleur groupe du monde, tel qu’on le connaît.
Ça vous suffit pour vous décider ?
Titres de l'album:
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