Si notre époque était accompagnée d’une bande originale, comme dans les films, gageons que nous pourrions déjà évacuer certains styles de l’équation. Pas question de Pop, de Rock, de Reggae, de Jazz, d’AOR ou je ne sais quoi qui chille et coole, l’heure n’est pas à la détente, mais à l’horreur d’une attente de jours meilleurs qui ne se dessinent pas vraiment dans les nuages noirs qui assombrissent notre ciel. Le dit ciel n’est d’ailleurs plus gris depuis longtemps, mais noir comme du charbon, celui-là même qui alimentera les buchers de la vanité au moment du jugement dernier. Alors, Black, Hardcore, Thrash, Noise ? Harsh, Punk, Speedcore ? Non, quelque chose qui retranscrit cette petite nostalgie qui brule encore comme une bougie, mais qui n’éclaire plus assez pour chasser les monstres cachés dans le placard. Quelque chose qui accepte la mélodie un peu jaunie, mais qui la maltraite comme un souvenir dont on ne veut plus. Quelque chose de doux-amer, mais plus amer que doux, comme un bonbon qui fond dans la bouche avant d’incendier l’estomac. Quelque chose d’autre, quelque chose qui évoque la légèreté du silence d’après, et le vacarme assourdissant de l’échec d’aujourd’hui.
Quelque chose comme le dernier album de KOLLAPSE.
Quatre ans après leur premier album Angst, qui décrivait avec acuité cette colère larvée qui nous anime, les danois de KOLLAPSE reviennent avec une nouvelle vision, et un allègement de personnel. Passant d’un quintet à un trio après cette pandémie de COVID qui nous a tous coûté quelque chose, les trois originaires d’Aalborg ont élaboré un nouveau répertoire aussi essentiel que l‘ancien, mais centré sur leurs nouvelles obsessions musicales et thématiques. Abordant des sujets majeurs et universels - crise existentielle, isolation, mort, amour - le trio de musiciens resserre l’étau et propose à l’auditeur un voyage incroyablement original dans un monde très personnel, dans lequel se répandent les échos de la désolation, de la solitude, mais de cet acharnement dérisoire auquel l’homme s’attache : survivre.
Avec leur Post Hardcore teinté de Sludge, que certains résument déjà d’un néologisme : Post Sludge, les danois revisitent le carnet de note Noisy des années 90 en le rédigeant par la plume du Post Rock des années 2010. On trouve dans leur musique de longues plages lancinantes, des fulgurances en cassures de rythme, des riffs qui brisent les tympans, des cris lointains, et de constantes références à de grands anciens, BREACH, NEUROSIS, ISIS, UNSANE, TENGIL, j’en passe et de moins évidents pour ne pas placer cette réalisation sous l’égide de la révérence trop évidente.
Enregistré au The Hideout Studio, en juillet 2020 par Lucas Illanes qui s’est également occupé du mixage et de la production, masterisé par James Plotkin, et flanqué d’une superbe peinture signée Gina Skwoz, Sult, chanté en langue natale exclusivement, n’est pas des plus faciles d’accès, à moins de connaître le bestiaire Post par cœur. Aussi bruyant qu’il n’est faussement apaisé, ce disque propose une digression intéressante sur le thème d’un Sludge déformé, repris à un compte différent, martyrisé par des mélodies éthérées, mais soutenu par une gigantesque basse claquée et sombre. Mais comme tout groupe à cheval entre plusieurs eaux, ne faites pas confiance à l’ouverture plus ou moins franche de « Drift » pour vous faire une opinion sur l’ensemble. Le reste, moins évident et immédiat vous entrainera plus loin qu’un simple Sludge bruitiste joué à la new-yorkaise, et vous proposera de longs breaks ambiancés, parfois aérés, parfois claustrophobes, comme la suite « Drukner » le démontre d’une reprise énorme et suffocante.
KILLING JOKE et UNSANE, Scott Kelly et les MELVINS, un peu d’HYPNO5E pour bien faire, et pas mal de créativité derrière les longues litanies qui ne sont pas des excuses à autant de redondances cycliques pénibles. Ici, pas de feedback pour sonner sale, pas de note martelée jusqu’à la nausée pour suggérer le malaise, il est palpable, dans les structures mouvantes, dans les faux rythmes qui sont plaqués par ces quatre cordes graves comme une sentence de mort, dans ces lignes de chant exhortées d’un avenir pas vraiment réjouissant, et dans cet affrontement permanent entre bruit blanc et harmonie pure. On peut évidemment échapper à ce schéma bien pensé en écoutant « Byrd », que les BREACH auraient pu caser sur l’un de leurs albums les plus traumatiques, ou en savourant les répétitions tantriques de « Libido », qui propose des positions inédites et des orgasmes assez néfastes.
On peut aussi croire que l’épilogue « Der Hvor Jeg Tænker Er Der Altid Morkt » représente la quintessence d’un disque à part, avec cette sublime intro de quelques notes en écho. Ce dernier chapitre de l’œuvre est fondamental pour comprendre la démarche de biais des KOLLAPSE, qui acceptent l’inéluctabilité d’un destin programmé, mais qui continuent de voir la beauté même dans la laideur la plus blafarde et morbide. Alors, certes, j’en conviens aussi, le groupe n’apporte pas vraiment de sang neuf aux styles qu’il aborde, penche plus sur le versant Post-Hardcore que sur celui Sludge, mais le mélange des deux, quoi que déséquilibré, offre une alternative crédible à une production formatée, souvent prétexte à des affabulations musicales indigestes et stériles.
Pensez un peu à la musique qui accompagnera le jour de votre mort, et imaginez là aussi triste qu’agressive.
Pensez un peu à la musique qui accompagnera le jour de notre mort à toutes et à tous, et imaginez-là assourdissante, mais troublante de poésie.
Et puis ne pensez plus, et écoutez Sult.
Le monde autour de vous disparaitra dans un chaos harmonique.
Titres de l’album:
01. Drift
02. Knæler
03. Drukner
04. Byrd
05. Libido
06. Der Hvor Jeg Tænker Er Der Altid Morkt
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