Tiens, comme le temps passe, et comme parfois les coïncidences sont troublantes. Il y six ans, quasiment jour pour jour ou presque, je chroniquais le premier long des norvégiens de TANTARA, Based On Evil. C’était lors d’une chaude après-midi d’été, comme aujourd’hui est une chaude soirée de la même saison, et les sensations éprouvées ce jour-là n’ont pas foncièrement changé. La température est quasiment la même, et l’effet produit par la musique des nordiques sur mon organisme est toujours aussi plaisante. Six ans entre deux albums, on ne peut pas dire que les mecs aient la productivité comme vertu cardinale, eux qui avaient justement commencé leur carrière sur les chapeaux de roue en publiant successivement une démo, un EP et un premier LP en trois ans d’existence. Sans savoir ce qui a pu les pousser à ce silence sans doute forcé, autant dire qu’ils n’ont pas vraiment changé leur tactique, puisque le Thrash old-school est toujours leur obsession primale, et qu’ils dominent leur sujet avec autant de brio, sinon plus. Nous en venant de Vestfold, les TANTARA continuent donc de nous tenter non avec du tarama, mais bien avec un Heavy féroce et subtilement brutal, qui rappellera aux plus anciens des sonorités viriles communes. Communes, mais pas quelconques, car ces instrumentistes plein d’abnégation et d’abstraction sont plus que compétents dans leur domaine, et collectivement capables, ce que prouve enfin ce second longue-durée, Sum Of Forces qui de son titre résume bien l’entreprise. La somme des talents individuels est donc égale à une puissance accumulée, dans une veine de styles qui se retrouvent condensés en un seul. Si l’approche nordique est bien évidemment fatale, via le peu de références locales de l’époque, l’école américaine est elle aussi abondamment citée dans le texte, via quelques allusions crues.
D’ailleurs, en parcourant ma chronique de 2012, je remarquais une foultitude de noms tout sauf cités à la volée, qui selon moi balisaient bien le terrain couvert. Ainsi, j’imprimais à mon avis les nuances des NASTY SAVAGE et EXUMER, de TESTAMENT, WARBRINGER, DESTRUCTION, mais aussi de HOLY MOSES, PANTERA, ONSLAUGHT et surtout des AGONY, suédois avec qui les norvégiens ont beaucoup de points en commun. Fredrik Bjerkø (guitare/chant), Stian Sannerud (batterie), Per Semb (guitare) et Emil Sigstad Moen (basse) n’ont donc pas perdu leur sens de la mesure avec les années, mais n’en ont pas pour autant baissé en intensité. On retrouve donc avec grand plaisir ces structures évolutives tirant même leur Heavy Thrash vers une sorte de Thrash progressif humble mais efficace, parfois à la lisière d’un techno-Thrash à l’allemande terriblement efficace. Pourtant, c’est bien le mordant de riffs toujours pertinents qui frappe au prime abord, même si certains semblent empruntés au vocable US des plus grandes figures du genre (EXODUS spécialement pour ces syncopes permanentes), sans pour autant sombrer dans la paraphrase malheureuse. Toujours prompts à dégainer une idée de rebondissement les TANTARA ne sont donc pas adeptes du supplice de Tantale, et ne nous torturent pas d’une linéarité qu’on espère voir exploser, mais construisent leurs morceaux en crescendo, ou en montagnes russes de violence, cédant parfois quelques pouces de terrain à une lourdeur fort à propos (« Sleepwalker », habilement nuancée de mélodies amères et dégradées).
Le chant très atypique de Fredrik Bjerkø pourra rebuter les amateurs de grognements distingués, évoquant parfois dans un registre plus modéré les TOXIK, SANCTUARY et autres QUICK CHANGE, mais ces fines bouches s’accorderont tous à souligner le talent incroyable de Per Semb en solo, qui parvient toujours à rester créatif et épidermique dans ses interventions. A l’image d’un CORONER, en version beaucoup plus light et moins sombre, les TANTARA préfèrent donc la suggestion à l’évocation brute, les allusions à l’interprétation, sans verser dans les ellipses gênantes qui les éloigneraient d’une efficacité indispensable. Nous parlons bien de Heavy-Thrash ici, pas de Heavy Metal, même si de temps à autres, la combinaison d’une rythmique en mid et de soli incandescents peut faire penser à une version catapultée de CHASTAIN, avant qu’une soudaine accélération n’emballe les débats (« Sum Of Forces », sans doute l’un des meilleurs morceaux du lot). Six morceaux seulement après six ans, c’est assez peu, mais ceux-ci développent tellement d’énergie et d’enthousiasme qu’on excuse la brièveté, même si quelques notes de plus ne nous auraient pas gênées. D’autant plus que l’ensemble fleure bon le BELIEVER très inspiré par à-coups, tout en gardant la franchise harmonique d’un ANNIHILATOR dans le viseur. D’ailleurs, les choses sont mises au point dès l’entame « Punish The Punisher », qui expose tous les arguments, et qui explose d’une rage digne du ONSLAUGHT de Killing Peace, comparaison qui m’avait déjà servi à l’occasion du premier album. Petites saccades bien agencées, changement de tempo bien amené, pour une fluidité incroyable qui vous replongera dans les dernières années d’évolution du genre, lorsque les musiciens commençaient à réaliser que la pratique instrumentale et la science de composition n’étaient pas des données à prendre à la légère.
On pourrait croire d’ailleurs que le retour des norvégiens se fait par la plus petite porte qui soit, avant de tomber sur le final homérique de « White Noise », qui développe plus de dix minutes d’inspiration multiple, mélangeant la complexité de QUEENSRYCHE, la préciosité de CRIMSON GLORY, la rudesse de METALLICA, et les progressions délicieuses de HEIR APPARENT, le tout emballé dans un joli schéma Thrash qui permet de soudaines embardées à la SABBAT. Petit miracle d’orfèvrerie, ce dernier chapitre justifie presque à lui seul tout l’intérêt que vous pourriez porter à ce disque, qui parvient finalement à combiner les atouts de presque toutes les figures majeures, et sonner comme une récréation de DEATH ANGEL prise très au sérieux par les AGONY, bien décidés à tenter un comeback. Beaucoup de pertinence, beaucoup d’aisance, de la maturité, mais toujours de la sincérité, Sum Of Forces est une démonstration de force qui séduit, et qui finit par remporter son pari. Je souhaite donc que les TANTARA ne disparaissent pas à nouveau pendant six ans, car d’ici là, ma mémoire ira chancelante. Et il serait franchement dommage de les oublier. Même pour une chaude soirée d’été…
Titres de l'album :
1.Punish the Punisher
2.Death Always Win
3.Aftermath
4.Sleepwalker
5.Sum of Forces
6.White Noise
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49