On n’y comprend rien, c’est du boucan.
Voilà comment réagissait Ronnie James DIO à l’écoute de NAPALM DEATH, que son guitariste louait pour ses qualités rythmiques. Il est évident que pour un musicien ayant émergé dans les années 50, fasciné par le Heavy Metal et les dragons, Scum sonnait comme l’hallali musicale qu’il était, loin de la logique Rock en mode intro/couplet/couplet/refrain/couplet/refrain/pont/solo/refrain. On ne peut donc pas en vouloir à ce regretté Ronnie d’avoir rejeté en bloc ce mode d’expression bruitiste qui divise encore aujourd’hui, au même titre que le Raw Black ou le Slamming Brutal Death.
Néanmoins, le Grind a fait un long voyage depuis sa naissance, et ne se contente plus de borborygmes plus ou moins habilement placés sur des blasts ininterrompus. Des groupes comme NASUM ou TOTAL FUCKING DESTRUCTION lui ont offert ses premières lettres de noblesse, en l’abordant comme un style acrobatique propice à toutes les figures les plus équilibristes.
Ce qui est aussi le cas des népalais de CHEPANG.
Installés à NYC, les musiciens ont une discographie assez conséquente, avec pas moins de trois longue-durée, trois splits, et même un live. De quoi se payer une réputation enviable, surtout au moment de présenter son troisième album au monde de l’extrême. Et extrême, Swatta l’est sans conteste, tout comme l’était Chatta et comme l’annonçait Dadhelo - A Tale of Wildfire. En six ans, le collectif a fait des progrès énormes, et peut aujourd’hui se targuer d’une certaine perfection dans la démence, via l’adaptation des standards Grind aux canons du Hardcore Math moderne.
Superbement produit, flanqué d’une pochette qui attire l’œil, Swatta est un genre de bouilloire qui siffle depuis deux plombes sur son bruleur, attendant que quelqu’un éteigne le gaz avant qu’elle n’explose. Et si l’explosion n’a pas lieu, les sifflements vrillent quand même les tympans, entre deux souffles repris par un maître de maison un peu étourdi.
La recette choisie par les CHEPANG est très simple : jouer le plus rapidement et le plus techniquement possible, pour se poser en acmé d’une optique bruitiste, mais intelligente. Intelligente mais fourbe, ce que nous fait remarquer un tracklisting des plus bizarres, entamé par des mots complets avant de finir en simple lettre pour désigner un morceau. Originalité donc, effets synthétiques, bourrée dansée avec pas mal de pinard dans le cornet, pour finalement s’affaler sur le parquet, les yeux mi-clos et les réflexes aux abonnés absents.
Cyber Grind joué analogiquement, Swatta est le genre de disque qui épuise, les sens, et le physique. Car avec cinquante minutes et vingt-neuf titres au compteur, on ne peut pas dire qu’il ait joué la parcimonie, mais bien le trop-plein pour nous agresser de manière plus efficace avant de nous laisser K.O pour le compte.
Coup de boule fatal donné en pleine centrale électrique en surcharge, ce troisième chapitre de la saga népalaise déplace des montagnes, mais laisse des stigmates. Des villes entièrement détruites, des hauteurs rasées, pour un tableau apocalyptique en dissonances majeures et viols rythmiques commis en toute impunité. On reconnait le style de ceux qui ne souhaitent pas s’enfermer dans les travers du Grind classique, et qui conchient le brouhaha gluant du Goregrind, pour mieux appliquer les recettes Hardcore moderne.
Ce Grind est en effet totalement Metal, mais joué par des dingues qui ont grandi au son de CONVERGE et DILLINGER ESCAPE PLAN, CANDIRIA et même MESHUGGAH. Des chansons qui s’étalent de quelques secondes à cinq longues minutes dignes de PAINKILLER en pleine crise de dengue (« Ba »), une attitude sans compromis, pour un résultat qui dépasse de loin la moyenne du cru.
Et avec le renfort d’un batteur de luxe qui ignore le sens du mot pondération, le résultat n’en est que plus impressionnant, voire étourdissant, au premier degré. Hors de question de se satisfaire de quelques galéjades plus ou moins bien mises en place, la composition est abordée avec ambition et sérieux, pour aboutir à un sous-genre exigeant et pointilleux.
Son nom ?
Je l’ignore, mais il va falloir lui en trouver un.
En attendant d’avoir trouvé la solution à cette question savourons le massacre en règle perpétré par cette bande d’allumés notoires. Swatta est en effet à la lisière du boucan parfois (comprenez qu’il trempe un orteil dans le Harsh Noise sans complaisance), mais reste pourtant musical, technique et logique. N’en déplaise au regretté Ronnie James qui n’a jamais pu aller plus loin que la poignée de secondes avant de défaillir.
Titres de l’album:
01. Asha
02. Avilasa
03. Ananta
04. Akash
05. Avismarinaya
06. Anurodh
07. Akanchya
08. Anumati
09. Ascharya
10. Anyol
11. Bid
12. Am
13. Ba
14. Na
15. JC
16. JGR
17. GC
18. BP
19. GHC
20. DIA
21. DMT
22. DK
23. TL
24. TC
25. A
26. I
27. F
28. T
29. W
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