The Afterparty

Killitorous

22/05/2020

Tentacle Industries

On reproche souvent aux groupes de Technical Death de se la péter, de se penser la quintessence de la brutalité contemporaine. Et c’est souvent assez vrai, le style partageant avec le Djent un manque d’humilité dans le fond et la forme. On regrette que les musiciens ne fassent pas plus preuve de second degré, conscients de leur potentiel, mais le mettant au service d’une musique plus généreuse qu’autocentrée. Heureusement, les contre-exemples existent, et le second album des barbares de KILLITOROUS fait méchamment du bien aux oreilles. Fondé en 2006, le concept n’a pas vraiment brillé par sa production jusqu’à présent, puisque en presque quinze ans d’existence, seules deux sorties dont venues nous enthousiasmer. D’abord un EP en 2010, Pretend to Make Babies et son titre accrocheur, puis le premier long en 2014, le célèbre Party, Grind. Nous avions compris à l’époque que le fun était une composante essentielle du répertoire, et la publication six ans plus tard d’une suite à la hauteur des attentes ne fait que confirmer cette impression. Après tout, qui irait composer un morceau sur une sitcom comme « Married with Children », ou sur la prestation de Nicolas Cage dans le remake de The Wicker Man, si ce ne sont ces oiseaux-là ? Beaucoup de délire donc dans ce groupe, mais du délire intelligent, et surtout, mis en avant par un instrumental impeccable de technique et de dextérité. Composé de musiciens méchamment rodés à l’exercice de l’extrême, et ayant dispensé leur savoir dans des combos aussi respectés que SUFFOCATION, ANNIHILATOR, VITAL REMAINS, BLACK CROWN INITIATE, NECRONOMICON ou UNLEASH THE ARCHERS, KILLITOROUS est donc une sacrée bouffée d’air frais dans l’univers un peu renfermé du Death technique, souvent nombriliste et peu amène en termes de blagues de premier choix. Mais on peut s’amuser sérieusement, et c’est justement l’ambition de ce line-up renouvelé, qui accueille de nouvelles figures.

La particularité de la configuration de KILLITOROUS est son axe central avec trois guitaristes. C’est ce qui permet au groupe de démultiplier les riffs et les soli, et créer une sorte de tourbillon qui vous entraîne dans sa spirale musicale. On comprend assez vite que les intentions des musiciens n’ont pas changé, avec ce mélange permanent de Death ultra brutal et véloce et de Grind féroce et sans compromis. La recette est d’ailleurs exposée dès « All Hail the Starchild » qui ne ménage pas sa bestialité pour convaincre l’auditeur de ses ambitions. En adoptant les postures les plus classiques du Death le plus pointu, mais en les mâtinant d’accroches mélodiques et rythmiques imparables (« Slavesphere », petit phénomène du genre), The Afterparty se transforme vite en fête ininterrompue de violence instrumentale dantesque, avec un chanteur qui profite de la gravité de son organe pour grogner à tout va. Chœurs hystériques, inserts en samples irrésistibles (« Married with Children »), épaisseur des compositions qui multiplient les plans jusqu’à l’overdose, l’effet produit est bœuf, mais loin d’être gratuit ou opportuniste. Et si la boite de promo recommande l’écoute de ce second LP à tous les fans de CATTLE DECAPITATION, CEPHALIC CARNAGE, FLESHGOD APOCALYPSE, ou ORIGIN, l’argument n’est pour une fois pas totalement aléatoire : tous ces groupes partagent le même goût pour la démence instrumentale et l’énergie débridée. Mais cet album, outre ses qualités intrinsèques, permet de découvrir une liste de guests longue comme le bras, avec les participations de cadors de l’envergure de Dan Mongrain (VOIVOD/MARTYR), Riley McShane (ALLEGAEON), Leo Diensthuber (DIVINE REALM), Cody Ford (SOEN), Raphael Weinroth-Browne (LEPROUS), Youri Raymond (UNHUMAN), Callum Clark (ENDING TYRANNY), Paul Ablaze (BLACKGUARD), Matt McGachy (CRYPTOPSY), Tom “Fountainhead” Geldschlager (ex-OBSCURA), Gore Lussier (ERIMHA), Bob Katsionis (FIREWIND), et Steven Henry (NEURAXIS), ce qui achève de transformer The Afterparty en after de l’outrance qui ne laissera aucun fan de l’extrême indifférent.

Et en savourant l’ultra-brutalité de « Re-anima-tomatron », l’auditeur éventuel comprendra le mode de fonctionnement d’un concept aussi cocasse que solide. Enchevêtrement des plans qui donne le tournis, pour un festival de riffs tous plus porteurs les uns que les autres. Seul défaut évidemment, le son encore une fois trop compressé de la batterie qui vient gâcher les instants les plus furieux, mais en dehors de cette critique mineure, impossible de rester de marbre face à cette tempête de blasts et de lignes vocales démoniaques. Multipliant les couches, assumant une diversité dans la bestialité, KILLITOROUS s’amuse beaucoup de sa schizophrénie, et nous sort des astuces dignes d’un Indus ayant tourné fou (« 30 Minutes »), avant de nous rendre complètement dingues d’un « Insanity as a Pathway to Fame & Fortune: The Tyrannical Tirades of Mike Tyson » qui abandonne toute raison et toute modération pour sombrer dans les affres de la maladie mentale musicale. On pense sur ce morceau à un CARNIVAL IN COAL sous coke, avec encore une fois des guitares qui canardent dans tous les sens, et ne laissent aucun survivant auditif. Il est rare qu’un album aussi intense ne finisse pas par lasser de son insistance, et pourtant, The Afterparty se savoure de bout en bout sans montrer de signe de faiblesse. « Total Protonic Reversal » à ce titre est un monstre de puissance écrasant tout sur son passage, avec toujours ces hurlements sourds/hystériques qui sont la trademark d’un Death Grind qui se respecte, et entre les accélérations mode 5G et les écrasements soudains, le massacre est total, et les tympans ruinés. Mais la perte d’audition s’accompagne d’une euphorie indéniable, et le final foutraque de « King Diamond Dallas Page » achève de nous convaincre de l’immense potentiel d’une formation qui a compris que la brutalité pouvait s’accompagner d’un brin d’humour sans être édulcorée.

Blague élaborée, album en tornade, The Afterparty est une sorte de petit matin qui capitalise sur une fête ayant laissé des traces d’alcoolémie dans le sang. Une sorte de dernier délire avant d’aller au lit qui catapulte les poubelles sur les toits et joue à la crosse avec les yorkshires.     

             

Titres de l’album :

01. All Hail the Starchild

02. Married with Children

03. Rodney Dangerfield of Dreams

04. Eat Your God Alive

05. Slavesphere

06. Re-anima-tomatron

07. 30 Minutes

08. Insanity as a Pathway to Fame & Fortune: The Tyrannical Tirades of Mike Tyson

09. Total Protonic Reversal

10. King Diamond Dallas Page


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par mortne2001 le 22/07/2022 à 14:05
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