Il n’est pas certain qu’en sortant un album tous les quinze ans, on s’attire un following digne de ce nom…La preuve étant – tout en admettant qu’on ne peut pas tout connaître – que je n’avais jamais entendu parler des SINISTHRA avant de tomber par hasard sur cet album au gré de mes pérégrinations sur les internets. Créé en 2005, ce collectif finlandais s’est d’abord fait connaître par un premier album sorti dans la foulée de sa formation, Last of the Stories of Long Past Glories. Rétrospectivement, je ne pense d’ailleurs pas que les musiciens s’imaginaient devoir attendre une décennie et demie pour poursuivre leurs aventures. Ainsi sont régies les règles du hasard et du destin, mais en 2020, revient sous les feux de l’actualité, permettant ainsi à ses fans de découvrir la suite de ces mystérieuses aventures. A l’époque, le nom du groupe ne disait pas grand-chose à qui que ce soit, mais depuis, certains de ses membres se sont illustrés dans d’autres ensembles plus connus. C’est ainsi que le chanteur Tomi Joutsen a fait ses classes au sein d’AMORPHIS, ce qui ne manquera pas de constituer une plus-value aux yeux de nombreux amateurs de musique sombre et ambitieuse. Mais ne cachons pas la vérité, SINISTHRA reste le jouet de son principal compositeur, le guitariste Markku Mäkinen, et il est toujours plaisant de retrouver l’intégralité du casting d’origine. Aux côtés du chanteur et du guitariste, nous retrouvons donc l’autre guitariste Marko Välimäki, le bassiste Janne Telen, le claviériste Timo Vainio, et le batteur Erkki Virta, qui peuvent collectivement se targuer d’un parcours pro au sein de formations comme MAYHEM, OUTRAGE, PROTECTED ILLUSION, ROTTENDAWN, THE CANDLES BURNING BLUE, CORPSE MOLESTER CULT, et bien sûr AMORPHIS. Voilà donc de quoi titiller votre curiosité et être attentif à ma prose.
Vendu sur les plateformes et les sites généralistes comme un mélange de Doom et de Gothique, SINISTHRA est beaucoup plus que ça, et même une créature à la silhouette difficilement identifiable. D’où ce Metal progressif assez généraliste dans sa description, qui colle au plus près de la réalité des faits. Le premier album avait suffisamment agité les esprits pour qu’AMORPHIS débauche Tomi Joutsen, et ce The Broad And Beaten Way risque fort de conforter les fans dans leur opinion, puisqu’il se pose en extension parfaite d’un premier tome qui laissait un goût d’inachevé. Tirant son titre du classique Paradise Lost de John Milton (le Broad And Beaten Way est en fait un pont reliant l’enfer à la terre), ce deuxième LP fait montre de qualités mélodiques et évolutives indéniables, et se pose en melting-pot générique de Heavy Metal lourd et emphatique, de progressions harmoniques douces et travaillées, de montées en pression et de relâchement plus légers. Symptomatique d’une école progressive nordique qui n’a pas oublié les enseignements de l’école anglaise tout en l’adaptant à la mélancolie du nord, cette musique lourde évite pour autant le piège de l’oppression, en adoptant des postures de souplesse mélodique. Mais que les amateurs de KATATONIA, AMORPHIS, OPETH, ou EVERGREY restent sur leur garde, puisque cet album risque fort de toucher leur sensibilité. Il n’est pas non plus si déplacé de parler de LEPROUS parfois, voire de PARADISE LOST, ou même de MARILLION lorsque les cieux se dégagent, et l’ensemble de ces références permet de cerner la démarche des finlandais avec une certaine acuité. Si le point de focalisation le plus évident reste la voix superbe et posée de Tomi Joutsen, l’instrumental en arrière-plan se montre très riche et moins complexe qu’il n’y parait. Affilié d’office à la cause Metal, le groupe n’en ose pas moins s’aventurer en terre plus meuble, avec des assertions Rock assez prononcées. Le tout est donc ouvert à tous les amoureux d’une musique précieuse et précise, pleine de sens, et d’une sensibilité plurielle.
« Eterne » en entame, donne un aperçu de la marche à suivre. Toutefois s’y fier complètement serait une erreur, car malgré sa synthèse de surface, ce morceau ne permet pas d’entrevoir vraiment la nature profonde des musiciens. En tant qu’accroche, il est intelligemment placé aux avant-postes, du fait de son caractère plus percutant et de sa durée réduite, mais c’est à mon avis « Closely Guarded Distance » qui reste le plus fiable en tant que détail désignant l’ensemble. En plus de treize minutes, SINISTHRA se replonge dans le bain de l’actualité musicale, qui a bien changé en quinze ans, sans renier sa nature. Ainsi, après de longues minutes combinant la lancinance d’un PARADISE LOST époque Lost et la subtilité d’un Neal Morse, le tout saupoudré d’énormes riffs sombres mais pas déprimants pour autant, le sextet laisse soudainement l’émotion s’installer, se rapprochant du MARILLION époque Fish, tout en lâchant quelques clins d’œil en solo à Gilmour. Le piano s’installe durablement, tandis que la voix de Tomi se pare d’atours fragiles, et la progression offre ainsi une richesse harmonique qui permet de rompre avec la monotonie annoncée de la première partie. Efficacement produit, et doté d’un son sobre mais clair, The Broad And Beaten Way change alors légèrement de cap et offre une instrumentalisation ouvragée, avec une basse économique rappelant ARCHIVE, tout en maintenant le cap d’un clavier délicat. « Halfway To Somewhere Else » renonce donc aux apparats les plus métalliques pour se lover au creux d’un Rock progressif cristallin et légèrement Pop, et attend son troisième tiers pour laisser la guitare reprendre du poil de la bête. Plus saccadé et soutenu, « Morning Frail » combien les deux méthodes, et relance la machine, mais c’est à « Safe In The Arms of The Everlasting Now » que nous devons un regain d’émotion, avec encore une fois une guitare en son clair absolument sublime et parfait support de la voix de Joutsen.
Sans chambouler l’ordre des choses, SINISTHRA rappelle qu’il n’est pas vraiment constitué de jeunes bleus, et s’il a fallu quinze ans pour élaborer ce nouveau répertoire, on comprend le temps passé à chaque seconde d’écoute. « Ephemeral » en clôture offre l’épilogue rêvé pour ce genre d’album, même si un dernier long segment n’aurait pas trahi la logique globale. Mais avec une base clairement Metal, souvent allégée pour oser une orientation plus Rock, The Broad And Beaten Way ne trahit aucun public et s’impose comme une œuvre non majeure, mais symptomatique de cette mélancolie nordique qu’on retrouve souvent dans le Folk suédois ou norvégien. Et parfois, il est vraiment agréable d’être un peu triste.
Titres de l'album :
01. Eterne
02. Closely Guarded Distance
03. Halfway To Somewhere Else
04. Morning Frail
05. Safe In The Arms of The Everlasting Now
06. Ephemeral
Pour moi, par ordre décroissant préférentiel, ce sera :Massacra - Enjoy the ViolenceMercyless - Abject OfferingsLoudblast - Disincarnate
23/04/2025, 12:56
Allez, mon top 3 français des années 90: Massacra - Signs of the Decline Mercyless - Abject OfferingsLoudblast - Sublime Dementia
23/04/2025, 08:42
Je rajoute une couche avec l'album d'Anialator sorti en fin d'année dernière. Je l'ai beaucoup écouté et l'écoute encore avec plaisir.
22/04/2025, 19:35
Plus fan de Massacra que de Loudblast perso, même si je possède les deux premiers albums du groupe.
22/04/2025, 19:34
De mon côté j'ai toujours eu du respect pour le groupe même si ce n'est pas ma génération, je n'étais pas né quand ils se lançaient... Donc ils ne m'ont pas marqué comme ils ont pu le faire avec leurs fans de la prem(...)
22/04/2025, 17:35
Pour moi Loudblast, ce sont des suiveurs avec un bon train de retard sur ce qui se fait à chaque époque et Clearcut fait partie de cela... Bref, je ne suis pas très client de leurs albums, on m'avait chanté les louanges de Burial Ground, je me suis ennuyé..(...)
22/04/2025, 16:04
@RBD : ton dernier paragraphe est plein de vérité. Quant au pseudo DPD je préfère le laisser croire ce qu'il veut. Vu comment il écrit, il a pas dû encore sortir de l'école. J'encourage néanmoins les thr(...)
22/04/2025, 13:35
@Tourista : tu t'es trompé, la news sur les 40 ans de Loublast, c'est plus haut
21/04/2025, 20:53
Le Metal est parfois sur le fil du rasoir de la beauferie... Voire tombe carrément dedans.
21/04/2025, 11:45
Vidéo vue, merci.De mon côté, je préfère le son de Sublime à celui de Disincarnate et c'est aussi le style de death que j'affectionne. Bien lourd, posé et mid tempo tout en étant agressif. Par exemple, c'est pour cela qu(...)
20/04/2025, 18:02
Comme je le dis dans la vidéo, leur sommet c'est Desincarnate. Puis The Burial Ground. Je suis moins fan de Sublime.
20/04/2025, 14:08
Pour moi Loudblast c'est surtout Sublime Dementia et Cross the Threshold. (Quand à la vidéo je ne manquerai pas de la regarder ce soir).
20/04/2025, 12:45
Si je comprends, cette charge allait contre cette part non négligeable du public Metal qui reste bloquée aux groupes de leur jeunesse mais ont cessé de se tenir au courant dès qu'ils ont reçu des responsabilités (premier travail, première rela(...)
19/04/2025, 14:36
J'écrit comme un enfant de 5 ans ici et je dois encore ajouter des précisions, imagine le truc, peut-être que l'Ehpad c'est metalnews au final. Combien de personnes postent depuis leur lit de mort ici ?Le metal généraliste c'est d&eacut(...)
19/04/2025, 09:13
J'ai pas tenu 30 s...J'imagine qu'ils seront sur la mainstage au HELLFEST en juin prochain non ?
19/04/2025, 08:38