Une bio en forme de délire, un nom qui se veut signifiant de « Quelqu’un t’aime, n’en doute pas », un passé de danseur dans la troupe de MAROON 5, et puis un contrat avec Disney qui a rejeté cet album sous prétexte qu’il « était trop mielleux »…
Selon la troupe, « un disque à écouter près de la cheminée en buvant une bonne tasse de chocolat chaud ». L’influence majeure de Britney Spears, et d’autres âneries distillées avec malice et défiance.
Mais au bout du compte, une pochette morbide, une musique qui ne l’est pas moins, et un seul homme à la barre, Igor Mortis, qui visiblement se complaît dans son aventure en solo, et qui cherche à repousser les limites de la glauquerie musicale, sans toutefois atteindre le niveau d’un Mories…
En dehors de ça, impossible de savoir d’où sort cet énigmatique et facétieux musicien Slovène, ni ce qu’il cherche à faire avec ce qui semble être son premier album, et peut-être le dernier au vu du ton un peu trop guilleret de ses compositions.
Et pourtant, Igor Mortis/ SLUND joue franc jeu, de sa pochette à son contenu, et nous propose un genre de synthèse extrême de l’extrême, en tripatouillant tous les styles passant près de sa psyché torturée.
On trouve sans son barouf ambiant des éléments de Sludge, de Doom, de Death, de Grind, d’Horror music, de Noise à peine contrôlé, et surtout, une nette propension à composer des morceaux au feeling.
En se basant sur une orchestration compacte et éminemment grave, le musicien auto pas si discipliné que ça, nous entraîne dans une longue descente aux enfers, constitué d’étapes plus ou moins brèves.
La finalité de tout ça ?
Peut-être choquer de son caractère impétueux et macabre, et titiller la corde sensible d’un public peu amène au second voire troisième degré.
Pour ça, un seul impératif, choquer, déranger, perturber, et surtout ne pas se fixer.
Si le Sludge bien poisseux et distordu semble être le vecteur d’approche principal, l’homme ne refuse pas à utiliser des blasts bien sentis, et surtout, à truffer son effort de pics de feedback, de pointes de chant enterré dans le mix, de grondements de basse lourde et industrielle, et de s’imprégner de l’air du temps Black pour pimenter le tout d’une touche d’occulte sévère.
Bruit, bordel ? Non, pas vraiment, mais course haletante, sur place oppressant, et finalement, exutoire qui semblera bien dérisoire à certains.
Ce disque semble se vouloir image d’un tortionnaire abusant de ses victimes sans les toucher, n’utilisant que la parole et l’expression orale pour les pousser à bout. On sent le sadisme d’un psychopathe qui vous laisse avec un bol de soupe et un verre d’eau à quelques centimètres de l’extension maximale de votre bras, le sourire aux lèvres et le Sludge Doom nécrophile en bandoulière. Pas particulièrement oxygéné, The Call Of Agony et son étrange timing de presque quarante minutes, est une jolie séance de torture qui trouve toujours une nouvelle technique pour vous faire souffrir un peu plus.
Alors, le mec aligne les intermèdes courts et violents, et les longs segments qui vous pèsent sur les nerfs.
Le premier reste presque modéré, ne dure que 4’’55 et s’appelle « 8 Minutes ». Stridences, feedback, basse en obésité assumée, et guitare grave handicapée par un son sale comme un couteau de boucher jamais lavé. Hurlements, cris, pauses instrumentales, pour une longue complainte qui ne dévie que très peu de son thème.
Ensuite ?
« Disdain », qui en effet semble faire preuve de très peu d’empathie pour notre système nerveux. Accords répétés à l’envi, malmenés, et toujours cette rythmique étouffante qui fait passer le Antibody des FETISH 69 pour une jolie bluette d’hiver au coin du feu. Sept minutes et quelques de douleur mixant le pire et le non meilleur du BM sourd, du Sludge pendu haut et court, de l’Indus qui assume ses itérations, avec un beat pas forcément stable qui renforce l’impression de malaise.
« Crawling », singe les mouvements erratiques de la victime qui essaie de ramper pour trouver un peu d’air dans les interstices du plancher, mais qui finit par s’écrouler, les poumons vides et le cœur chancelant. Même recette ou presque, toujours aussi moite et compactée, comme un rideau de fer qui descend petit à petit pour vous priver du seul rai de lumière qui n’était pas encore mort.
Entre ces longues plages de souffrance, de courtes attaques en piqué éclair, pas moins nauséeuses, mais un peu plus rapides et franches, comme ce « Numb and Sick » qui porte bien son nom de son mal d’estomac, « Narcissism A.D », sorte de faux Crust vraiment maladif et toujours aussi englué dans un BM mal régurgité, un peu comme une version maléfique de MORPHINE qui taperait le duo avec GNAW THEIR TONGUES. Tiens, les rires sadiques en samples sont même offerts par la maison de fous.
« Mental Disorder », replace les choses dans leur contexte et les tarés dans leur institution, en jouant l’ambivalence d’une métronomie à la HELMET troublée par une thérapie à la UNSANE. Petites pilules et infirmière vacharde qui vous étouffe avec son gobelet d’eau croupie.
« Sickness » d’ailleurs établit le diagnostic d’un Grind sans soins palliatifs annoncé par un praticien sarcastique qui se repaît de blasts.
« Agony », qui porte si bien son nom et qui abuse du larsen, avant de retrouver ce pas cadencé, pas du tout chaloupé, toujours aussi grave et lourd. Teint blafard, lavabo constellé de petites taches de sang, c’est dégueulasse, mais tellement graphique…
Enfin bon voilà, de quoi vous rendre joyeux pour une fin d’hiver un peu trop longue et brumeuse. Du Sludge Indus qui pue le squat occupé par un labo de fortune, qui produit du Meth à la chaîne et le distribue dans des cellules jonchées d’immondices et d’excréments. Un genre de Torture Porn pour les oreilles.
Mais pas de scie pour vous découper la cheville et vous barrer par la fenêtre. Puisqu’il n’y a pas de fenêtre. Un disque de moisissure, de décrépitude, et de souffrance, qui dure, et ne faiblit jamais.
Pas le mieux pour commencer la semaine, mais pas mal pour rester lucide et trouver l’idée du suicide séduisante.
Titres de l'album:
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