Pour beaucoup de fans de Heavy de l’ancienne génération, DYNAZTY, c’est un peu le contraire parfait de l’expression mind over matter. Une emphase donnée au contenant et non au contenu, une façon de traduire le Hard dans un vocable trop moderne et emphatique, un détournement des dogmes de base, du tape à l’œil. Au même titre qu’AMARANTHE ou NIGHTWISH, BATTLE BEAST, BEAST IN BLACK et tant d’autres, les suédois ont souffert ces dernières années d’une chute considérable de crédibilité, chute inversement proportionnelle à leur popularité, chacun des albums du combo étant attendu comme le nouveau messie Power Metal mélodique venu du froid. Je ne me positionnerai pas dans ce débat, acceptant les formules proposées comme autant de possibilités. Après tout, au travers des années, des groupes comme KISS ou MÖTLEY CRÜE ont dû essuyer ce genre de critiques, avant de devenir des icônes absolues de la scène. Ce que je constate de façon objective, c’est que DYNAZTY s’approche de plus en plus de la perfection dans son approche, profitant à chaque fois d’un son énorme pour imposer des compositions certes calibrées, mais fameuses. Je m’étais attardé sur le cas de Firesign il y a deux ans, que j’avais estimé d’intérêt, suffisamment en tout cas pour en parler, et je reviens à la charge avec The Dark Delight qui poursuit dans la même veine, sans aucun complexe, à la suédoise, avec une fois encore un maximum de morceaux taillés pour les stades et festivals.
Depuis ses débuts, le groupe n’a eu de cesse de peaufiner sa méthode, au point d’en devenir aujourd’hui la référence absolue aux côtés d’AMARANTHE. Rien de hasardeux dans cette comparaison, puisque le chanteur Nils Molin évolue en parallèle dans les deux formations et utilise donc les éléments de l’un ou l’autre des groupes pour faire avancer son vécu personnel. Membre d’origine, Nils peut toujours compter sur le soutien de deux autres membres présents depuis 2007, le batteur George Egg et le guitariste/claviériste Rob Love Magnusson, mais aussi de la seconde guitare de Mike Laver et de la basse de Jonathan Olsson, les deux musiciens les plus « fraîchement » intégrés. C’est donc un line-up stable depuis Renatus que nous présente aujourd’hui The Dark Delight, qui évolue dans les mêmes sphères que Firesign. Produit une fois encore par Jacob Hansen, ce septième album studio est une sorte de pinacle dans la carrière d’un groupe dont chaque étape semble en être un, et une confirmation en forme d’épiphanie évidente. Les suédois se posent en effet en référence absolue d’un style clinquant, aux proportions épiques, aux règles bien établies, répondant à la demande d’un public avide de sonorités modernes et de Metal contemporain. On retrouve donc tout ce qui a fait le style du groupe depuis son virage musclé et opportuniste, ces riffs gigantesques, cette rythmique puissante et ce chant si passionné, ces arrangements pompeux tirant sur le symphonique, mais ne faisant pas oublier l’obsession de base : composer des chansons aussi Pop que possible, et les enrober dans un glaçage Metal pour faire passer la pilule, soit la quintessence de l’art scandinave en la matière.
Nul ne pourra considérer ce nouvel album comme une œuvre d’auteur. Tout est fait pour en faire l’équivalent des blockbusters cinématographiques d’été, avec son lot d’explosions, de passion, d’effets de manche futés et autres digressions larger than life. Tout est exagéré ici, amplifié, mais avec un flair qui laisse pantois. Une simple écoute de « Hologram » suffit à comprendre qu’il ne s’agit que d’une bonne vieille balade des années 80 et trustant le Billboard travestie en tragédie dramatique avec renfort de claviers larmoyants et de lignes vocales investies, le tout sur fond de marasme instrumental digne d’un Hollywood musical. Beaucoup crieront à la trahison, au produit manufacturé, mais les moins à cheval sur l’éthique admireront le travail accompli, certes un peu stérile dans le fond, mais admirable dans la forme. Et les suédois sont depuis longtemps passés maîtres dans l’art de déguiser des thèmes simples pour en faire des constructions aux proportions énormes, ce que « Presence Of Mind » prouve en entame de son manque total de retenue. Alors, quelle attitude adopter en pénétrant les arcanes d’un album dont chaque détail a été peaufiné pour provoquer des sensations bien précises ? La même qu’en entrant dans un parc d’attraction, en laissant ses préjugés à l’accueil, et en gardant son âme d’enfant capable d’être émerveillé par la moindre explosion ou enthousiasmé par la dégustation d’une barbe à papa chimique au possible. On s’amuse en oubliant ses principes, comme un gamin qui dans les années 80 s’extasiait en écoutant des chansons qui n’avaient rien de mémorable, mais qui sonnaient comme les soundtracks d’aventures extraordinaires auxquelles il avait l’impression de participer.
OK, souvent, le fond de l’air est méchamment Pop, adoptant des concessions que la plupart des musiciens refusent. Le trépidant et dominé par les claviers « Heartless Madness » s’apprécie comme un tube jumpy qui aurait pu être composé par A-HA et repris par AMARANTHE, tandis que « Waterfall » se veut quintessence du Hard-Rock moderne, décomplexé, adressé à la frange la plus impressionnable du public, la plus jeune, et la moins difficile. On comprend très bien que les riffs sont plus des figures de style que des poutres porteuses d’inspiration roots, on sait que cette rythmique énorme n’est qu’un trampoline qui permet à Nils Molin de vocaliser au-dessus des nuages, et on accepte très bien que les arrangements et bidouillages électroniques ne soient que le décorum un peu cheap d’un décor de western futuriste tourné en studio. Mais si l’on parvient à occulter tous les griefs, on découvre aussi des chansons aux motifs entêtants, des refrains qu’on finit par siffloter ou chanter en chœur, et un réel amour du travail bien fait, qui certes ne restera pas dans les annales, mais qui procure du plaisir le temps de sa durée. D’autant qu’une fois encore, le travail accompli est fabuleux. Ce septième longue-durée est plus varié que la moyenne des produits de sa catégorie, osant parfois la facilité d’un hit purement scandinave (« Paradise Of The Architect »), pour mieux nous convaincre d’une clôture à équidistance entre KIX, EUROPE et Robert TEPPER (« The Dark Delight »).
Les morceaux se succèdent donc dans un climat d’euphorie globale, rappelant que la scène nationale est quand même un modèle mondial de tubes aussi dansants que puissants (« Apex »), et de digressions Pop dans un contexte plus musclé aux contours presque industriels (« Waterfall »). Rien qui ne laisse de trace durable dans le grand livre du Heavy Metal, mais un plaisir pas si coupable que ça au jugé d’un travail global assez phénoménal. Juste un disque bien dans son temps, qui rend heureux ceux qui savent laisser leurs principes de côté.
Titres de l’album :
01. Presence Of Mind
02. Paradise Of The Architect
03. The Black
04. From Sound To Silence
05. Hologram
06. Heartless Madness
07. Waterfall
08. Threading The Needle
09. The Man And The Elements
10. Apex
11. The Road To Redemption
12. The Dark Delight
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