Un nouveau projet de Black Metal norvégien, c’est comme une nouvelle cuvée de St Emilion. On a tendance à s’y intéresser de près pour peu qu’on ait le palais délicat et habitué au bouquet original. Et si depuis de longues années, la Norvège a su partager son trône avec la Suède, les Etats-Unis, la France et d’autres pays, elle n’en reste pas moins le point d’origine de tout ce chaos. Mais comme tout le monde le sait, une AOC, quelle qu’elle soit, n’est pas une garantie de qualité.
HAMMERFILOSOFI est né en plein bordel pandémique, en cette funeste année 2020 qui nous a tous confinés à domicile. Mais certains ont vécu cette période traumatique avec plus de philosophie que d’autres. C’est plus ou moins le cas de l’anonyme qui se cache derrière ce concept rigide, et qui affirme que ce cloisonnement a été l’occasion de faire le point sur sa propre solitude, de se livrer à la contemplation, et de se recentrer sur sa force intérieure. Choix intéressant, mais qui ne découle pas forcément sur une prise de conscience viable. Et pourtant, en écoutant ce premier long, on ne peut qu’être d’accord avec ce postulat, qui a engendré une œuvre sévère, agressive, sombre et sentencieuse.
HAMMERFILOSOFI est très clair dans ses intentions. Ramener le Black à ses préoccupations principales, et retrouver la sincérité des premières productions du genre. Mais aussi proposer un voyage cathartique, et un ravalement de façade détruisant les dernières tâches de médiocrité. Vaste entreprise, qui méritait un traitement à la hauteur de ses ambitions, ambitions se formalisant en six longs morceaux, aussi puissants que dangereux. Et si le filigrane du billet d’humeur est flanqué de noms célèbres, la monnaie en elle-même est personnelle, et d’une valeur ajoutée conséquente.
Immédiatement, on est saisi par l’aspect classique de The Desolate One. Sa majesté, sa rudesse, son absence de compromis et sa haine du métissage en font un disque à réserver aux puristes qui détestent qu’on noie leur musique dans un océan de négociations. Le tempo est souvent lourd, les arrangements réduits au minimum, et la production massive. Chaque coup de caisse claire est un énorme marteau qui vous fend le crane, et chaque ligne de chant époumoné vous prive d’oxygène comme un asthmatique sans son pulvérisateur.
Des noms sont lâchés, dont ceux inévitables de DARKTHRONE et MAYHEM, ce qui est évidemment à prendre comme une base avant d’affronter le mastodonte. Car HAMMERFILOSOFI ne se rapproche ni de l’un, ni de l’autre, et préfère se balader dans les couloirs de la mort avec son propre drapeau. Un drapeau fièrement brandi, cousu sur mesure, et flanqué d’une énorme tête de mort, ou plutôt, de ces cadavres qu’on distingue sur cette superbe pochette. Démiurge regardant le ciel, les deux pieds fermement posés sur une pile de corps anonymes, HAMMERFILOSOFI est un monstre de puissance, et un démon de fiel. Le ciel, le fiel, l’avant et l’après, l’au-dessus et l’en-dessous, comme une formule alchimique transformant l’espoir en résignation. Et le tableau n’est pas forcément joli.
A l’image d’un MARDUK période Mortuus de Rom 5 :12, The Desolate One impressionne de sa musculature occulte, acquise à la force du poignet. Les chansons sont aussi gonflées que les bras de cette créature jaunâtre, et malgré un laïus dépassant fréquemment les huit minutes, l’attention est captée et gardée prisonnière, par un habile jeu de riffs sentencieux et noirs comme la nuit éternelle des damnés.
Entre enfer à échelle humaine et purgatoire terrestre en attendant la fin, HAMMERFILOSOFI avance d’un pas lourd, écrase tout sur son passage, et libère le BM de ses démons expérimentaux. Point d’avant-garde, point de fantaisie hybride, juste l’essentiel, des thèmes forts, des hurlements fermes, et des commandements respectés à la lettre. Sous cet angle, ce premier long respecte sa mission, et ramène le Black Metal dans son propre linceul originel. Seule la production moderne et claire éloigne des années de misère, nous permettant d’apprécier la tradition dans des conditions plus confortables.
S’il est possible de se montrer indifférent à cette démonstration de force, il est aussi impossible de lui refuser les hommages qu’elle mérite. Evidemment, ce parti-pris de grandiloquence laisse quelques moments de flottement dans l’air, des répétitions qui pourront gêner les plus avertis, mais The Desolate One propose une construction logique et cohérente, et un crescendo très bien agencé.
Tout nous mène à l’infernal épilogue « The Skull », dernier crane sur une planète morte depuis des siècles, et qui témoigne des guerres anciennes terminées dans une apocalypse programmée. Si la théâtralité de la voix pourra rebuter ceux préférant des incantations graveleuses, si l’aspect monolithique de l’affaire fera certainement bailler ceux plus habitués à la diversité du BM moderne, la procession saura séduire tous les amateurs de violence majestueuse, entre péplum improbable et horreur dramatique et gothique.
Il est possible que ce premier long d’HAMMERFILOSOFI se bonifie avec le temps, comme un bon vin. Mais il procure déjà une ivresse agréable, et stimule les sens comme une séance de musculation après dix heures de boulot.
La Norvège. Ses fantômes et ses fantasmes. On ne s’en lassera donc jamais.
Titres de l’album:
01. The Torch
02. The Crossed Bones
03. Odi Profanum Vulgus et Arceo
04. The Sickle
05. Abyssal Season
06. The Skull
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