Peut-on vraiment en vouloir à un groupe qui essaie de s’adapter aux exigences de son époque, au risque de standardiser son style pour se fondre dans la masse et essayer de rester la tête hors de l’eau ? Doit-on y voir une forme d’opportunisme, une fierté pas forcément bien placée, on un sursaut de rage de voir ses enfants devenir adultes et prendre sa place, même si on ne l’a pas forcément occupée en temps et en heure ? Entendons-nous bien, en tant que fan des FLOTSAM & JETSAM depuis Doosmday For The Deceiver, je ne saurais me montrer aigri à leur propos, et ceux que j’ai tenus lors de la sortie de Flotsam & Jetsam il y a trois ans faisaient montre d’un enthousiasme parfaitement sincère. Il faut dire qu’après une lente descente en seconde, puis troisième division dans les nineties et les années 2000, j’étais relativement satisfait de constater que les arizoniens n’étaient pas encore séniles ni tétraplégiques artistiquement parlant, et qu’ils étaient encore capables de faire parler la poudre sans prétendre frôler les cimes qu’ils atteignirent autrefois. Et après avoir ressenti une profonde tristesse à l’écoute de The Cold, Ugly Noise ou la tentative pathétique de replacer au premier plan de l’actualité leur premier chef d’œuvre, j’entrevoyais la possibilité d’une rémission presque totale à ce moment-là, qui laissait augurer de lendemains plus cléments pour ces défenseurs d’un Metal toujours aussi mordant et mélodique. Ces lendemains sont en 2019 devenus des aujourd’hui, et The End of Chaos d’exploser à la face de la scène Metal de toute sa véhémence, sa puissance, et sa redoutable envie d’en découdre. Mais, et puisqu’il en faut bien un, FLOTSAM a gagné en impact ce qu’il a perdu en finesse, et ce quatorzième LP (ou treizième si l’on met de côté la parenthèse relifting de Doosmday en 2014), aussi percutant et solide soit-il se fond dans la masse des sorties du moment, se permettant même des erreurs de débutant en essayant de se hisser au niveau des meilleurs représentants d’un Power Metal certes flamboyant, mais désespérément stérile.
Constat assez inquiétant, hautement subjectif, et surtout, soumis à des critères d’appréciation très personnels. Car dans les faits, et malgré l’une des pochettes les plus hideuses de ces 20 dernières années, The End of Chaos est une petite bombe à fragmentation, qui détruit tout sur son passage, une sorte de bulldozer mélodique qui annihile l’ennemi de deux ou trois frappes chirurgicales, et qui rase le reste de ses épaisses chenilles. Avec un line-up une fois encore renouvelé, et l’arrivée à la batterie du mercenaire Ken Mary (FIFTH ANGEL, HOUSE OF LORDS, IMPELLITTERI, CHASTAIN, Alice COOPER, etc…) reprenant les baguettes des mains de l’exilé Jason Bittner, parti cogner chez les OVERKILL, ce nouvel effort en fait des tonnes pour nous convaincre de sa pertinence et de la validité de son esprit revanchard, et accumule les prouesses, les riffs tranchants, les impulsions rythmique en chien de fusil, et nous terrasse de son agressivité, qui a de quoi laisser bien des petits jeunes sur le carreau. Inutile de nier l’évidence, en termes de performance, ce LP est au-dessus de tout soupçon, les musiciens ayant monté d’un cran niveau technicité et cohésion, et pourtant, en arrière-plan, on ressent une légère amertume de déjà entendu, chez la concurrence, qui souvent d’ailleurs est allée se servir chez les JETSAM pour agrémenter ses recettes d’une pincée de finesse. Sauf qu’en 2019, la finesse à complétement disparu de l’optique des originaires de Phoenix, qui le plus souvent se contentent de frapper, et de frapper encore, un peu à l’aveugle, un peu comme un blitzkrieg inévitable, en signant des morceaux certes accrocheurs, construits, parfois évolutifs, mais complètement expurgés de toute volonté de nuance. Et le cas de figure de l’album parfait sur le papier, mais décevant dans les faits se représente une nouvelle fois, laissant le chroniqueur seul face à sa conscience, devant faire le choix de l’objectivité la plus honnête en mâtinant ses louanges de critiques construites mais réductrices, ou de prôner la subjectivité dont ont fait preuve ses homologues du net, et de se cantonner à décrire des chansons aux propos tonitruants, mais à la violence fort peu satisfaisante.
Je suis loin d’être un adepte du pénible « c’était mieux avant », mais autant dire qu’à l’écoute de The End of Chaos, le FLOTSAM & JETSAM que j’ai tant aimé et chéri me manque terriblement. Celui capable dans un même morceau d’évoquer QUEENSRYCHE et METALLICA, tout en gardant sous le coude une passion pour le Heavy ricain tel qu’il était pratiqué par les puristes de METAL CHURCH. Aujourd’hui, les arizoniens ont le muscle saillant, les guitares effilées, se présentent avec une carrure impressionnante, et ont réussi à tenir le pari de rester les deux pieds fermement ancrés dans leur époque, sans vraiment trahir leur style, mais en le nivelant, en l’harmonisant, et en l’adaptant à des attentes plus juvéniles. Et si Erik A.K déclarait il y a peu avoir dû choisir entre quarante chansons pour plaquer ses textes, appliquant des critères de qualité drastiques, on peut estimer que le groupe in extenso a privilégié la cohésion au détriment de la diversité, ce qui donne à ce nouveau chapitre des allures de bloc de béton. Certes, le bilan est loin d’être catastrophique, et les webzines se déchaînent déjà en parlant de « meilleur album », ce que ce quatorzième tome n’est assurément pas et ne sera jamais. Car on a souvent le sentiment d’écouter un combo de Power Metal ayant émergé au début des années 2000, connaissant très bien son métier, et le pratiquant avec un professionnalisme respectable, plus qu’une légende qui a inventé une approche et qui a eu beaucoup de mal à s’y tenir ensuite. La faute à une production qui elle aussi a boosté les fréquences pour jouer le jeu de la modernité, collant les guitares ensemble et laissant la batterie occuper l’espace de ses nombreux breaks et fills, tout en gardant un espace vital élargi à la voix vieillissante d’Erik, toujours séduisante, mais elle aussi contenue par un cahier des charges à respecter à la lettre. Alors oui, ça marque, ça marche, la plupart du temps, mais les morceaux défilent comme à la parade sans vraiment marquer les esprits, et sans qu’on puisse en mettre un en avant plutôt qu’un autre.
Et même si l’ultrarapide « Control » bouscule en deuxième de couverture, et même si « Prisoner Of Time » chamboule la donne en ouverture, et même si l’alternance de furie et de puissance est admirablement bien dosée, on attend un peu en vain l’étincelle qui va tout faire exploser, un peu comme si l’album était un gigantesque baril de poudre aux mèches humides. Certes, les harmonies sont appréciables, la section rythmique claquante, la paire de guitaristes au garde à vous, mais on se prend après quelques écoutes à devoir réfléchir pour se souvenir d’un morceau plus attachant que les autres, ce qui est rarement bon signe pour un groupe de cette trempe. Mais avec un peu de recul, « Slowly Insane » fait parfaitement l’affaire, et la fin du déroulé laisse place à des choses plus modulées, comme ce « Survive », plus abordable et aéré, ou « Snake Eye », seul intermède à pouvoir évoquer les jeunes années du groupe, sur lequel même le chant d’Erik rajeunit à croche d’œil. Il est toujours délicat de se montrer inflexible lorsqu’un des groupes les plus singuliers de votre jeunesse tombe dans le piège du jeunisme, spécialement lorsque cette crise sera à peine remarquée par la plupart des fans, et si The End of Chaos va évidemment faire un massacre en concert, puisque ses chansons sont taillées pour le live, il peine à convaincre en écoute interne, tant il s’obstine à s’enfoncer dans la violence au lieu de s’en servir comme argument. Mais il est impossible de descendre un travail de cette importance sur une seule mauvaise impression, et que les die-hard se rassurent, ce quatorzième témoignage de FLOTSAM & JETSAM saura les enthousiasmer et les rassurer. Dommage qu’il préfère les faire headbanguer que réfléchir.
Titres de l’album :
01. Prisoner Of Time
02. Control
03. Recover
04. Prepare For Chaos
05. Slowly Insane
06. Architects Of Hate
07. Demolition Man
08. Unwelcome Surprise
09. Snake Eye
10. Survive
11. Good Or Bad
12. The End
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09