Le Post Rock aurait-il encore des choses à dire alors qu’on le croyait vidé de sa substance depuis longtemps ? Certains se posent la question, les mêmes pourtant qui chroniquent les fabuleux travaux de THE OCEAN, de MONO, de THE SHAKING SENSATIONS et dans une moindre mesure, ceux d’HYPNO5E ou de CULT OF LUNA.
Sont-ce des groupes exsangues selon vous, piochant péniblement dans le passé collectif de quoi brosser un tableau d’avenir confondant de déjà-vu ?
Je n’en ai pourtant pas l’impression…
L’écurie Pelagic Records est sans doute encore là pour démontrer que cette musique affranchie de tout parrainage a encore une pertinence artistique indéniable, et il n’est donc pas étonnant de retrouver dans leur catalogue en réédition CD/LP le cinquième album des TINY FINGERS, récupéré d’une première édition chez Anova Music en 2015. Pour l’occasion, et un peu comme d’habitude, Pelagic a mis les petits plats dans les grands avec une superbe édition digipack ainsi qu’un vinyle, mais bien évidemment, c’est le contenu qui compte et non le contenant, et à l’image de leurs partenaires de label HYPNO5E et MONO, les TINY FINGERS se servent de leur voyages intérieurs et autour du globe pour nourrir leur musique et leurs histoires, comme le démontre ce formidable The Fall, qui en guise de chute, représente plutôt une ascension vers les hauteurs vertigineuses de la conscience et de la perception.
Et comme tout périple interne/externe transposé en musique, The Fall s’articule autour de pulsions, de pulsations, de courses en avant et de pauses, alternant les longues plages pluriforme et les courts instants de fulgurances oniriques ou concrètes. En optant évidemment pour le format instrumental, les Israéliens n’ont pas choisi la facilité, mais respectent les codes du genre qui n’admet que très peu d’incarnations vocales, pour laisser la musique devenir expression brute et ultime.
Enregistré en 2014 aux Anovia studios et couché sur bande l’année suivante, ce cinquième voyage de TINY FINGERS révèle au contraire de grands doigts agiles, qui s’agitent et parcourent les manches de guitares, de basse, les touches de claviers et les percussions subtiles et flottantes.
Difficile de ne pas se laisser envouter par ces mélodies ciselées agitées de soubresauts d’arrangements électroniques, qui en presque une heure de périple accomplissent le tour de force de se montrer aussi diversifiées que complémentaires. Mais là est justement la magie provoquée par les plus grands groupes de Post Rock, de ceux qui savent éviter l’écueil de la contemplation pour voguer sur des océans d’inspiration.
Il faut dire que le quatuor (Oren Ben David – Guitare, Boaz Bentur – Basse, Tal Cohen – batterie et Nimrod Bar – claviers et synthés) ne s’est posé aucune limite comme il ne tolère aucune frontière. On retrouve leur ADN dans chaque note dispensée, même si certains agencements font fortement penser aux ZEUS pour leur élasticité rythmique distordue, à THE OCEAN dans les instants les plus admiratifs (« 9 Of Swords »), et même parfois aux SWANS les plus récents lorsque le timing étiré permet quelques redondances hypnotiques prenantes.
En gros, vous l’aurez compris, The Fall est une synthèse personnelle qui pourtant rend hommage aux plus grandes figures, sans se départir de cette dualité entre un intimisme flagrant et une « mondialisation musicale » fascinante.
En l’état, nous assistons à un flux/reflux d’émotions, spécialement appréhendable sur de longues digressions comme « Drops », telles des vagues venant mourir sur la grève avant de revivre au large. Les guitares explorent toutes les possibilités d’émotions possibles, égrenant des arpèges de songes en son clair soutenus par une basse traitée et un piano mélancolique, ou en répandant quelques notes qui s’évaporent, portée par des pulsations rythmiques complexes et pourtant si souples.
L’intimisme subtilement inquiétant sait aussi se faire sa place, comme le démontre le sombre et nuancé « Deuteronomy », qui profite d’une section rythmique irrégulière pour disperser dans l’air quelques harmonies décharnées et floues, comme la BO d’un film qui soudain fait place à l’action d’un Rock progressif débarrassé de toute prétention technique.
Au rayon de ces longues errances, « Dispatcher » affirme aussi la singularité, laissant sa basse rebondir et onduler comme un oscilloscope, tandis que des guitares en écho de The Edge profitent d’un créneau très ouvert, offrant ainsi une progression dans un univers aussi opaque que limpide. Rappelant autant les imbrications progressives des années 70 que les expérimentations Post Wave des années 80 (sans jamais tomber dans la même rigidité distante et froide), ce morceau est l’épiphanie ultime d’un disque qui se termine quand même par une dernière narration étendue…Les strates de son agissent comme autant de chœurs déshumanisés, comme des voix robotiques nous avertissant d’un avenir que l’on doit autant craindre qu’espérer.
Dès lors, « Music For The Sun » a beau jeu d’énoncer son message ensoleillé, amorcée par des rais de guitare délicate, qui une fois de plus partent en solo pour finir par devenir partie d’un tout, indivisible et pourtant assemblé de sons aussi indépendants que fuyants.
On pense à PINK FLOYD, de transition entre Meddle et pas encore fixé sur la face cachée de la lune, mis à part que les TINY FINGERS ne se laissent pas envouter par un motif unique, et multiplient les interprétations, en osant des cassures fluides qui s’intègrent parfaitement aux hallucinations éveillées.
Les morceaux les plus courts offrent un surplus d’énergie, à l’instar de ce « Eyes Of Gold », qui ose le mixage entre un HAWKWIND moderne et un MORPHINE débarrassé de son chant hésitant, le tout sous la direction artistique d’un VATTNET VISKAR, ou de « The Other », qui percute son intro comme un RATM stellaire, avant de tenter un Big Beat appuyé et presque Dub assez déconcertant.
« Traveller Soul » ose même une certaine forme de violence, et fricotte avec les PRODIGY passés en subliminal, toujours avec ces sons graves se disputant l’avant-plan avec des nappes claires et ondulantes, qui se fraient un chemin dans les arrangements mouvants hérités des boucles des 60’s, celles-là même que les BEATLES utilisaient avec fascination.
The Fall, en fin de compte, est une chute. Celle des observateurs externes qui pensaient le Post Rock à l’agonie, et qui prouve encore qu’il est plus vivant que la plupart des styles qu’il fustige inconsciemment. C’est un album aussi vivant que ne le sont ses musiciens, qui refusent le cloisonnement, et arpentent les chemins du monde en en ramenant les sons les plus intimes, les plus ouverts, les plus fantastiques.
Un album qui se respire pour un groupe qui inspire, et une preuve de plus que lorsque le Post est traité comme un moyen et non un but, il se permet d’être plus créatif et efficace que n’importe quelle tentative expérimentale bancale.
Titres de l'album:
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