Vingt ans de carrière, dans le Black Metal, n’est pas chose extraordinaire. Les MAYHEM, IMMORTAL, MARDUK, DARKTHRONE sont toujours là pour prouver que le feu sacré des enfers ne s’éteindra jamais, et pour porter haut les couleurs rougeoyantes du malin cornu. A l’initiative du mouvement, dans les années 90, peu d’oracles eurent été à même de prédire une telle longévité au courant qui semblait devoir mourir de sa laide mort assez rapidement, au vu du caractère extrême de ses philosophies artistiques et de ses convictions humaines. Mais en 2019, loin du feu de paille au pied d’une église de bois, le genre est devenu rentable, une véritable industrie générant des bénéfices conséquents, et drainant dans son sillage une horde de fans toujours aussi mal grimés, mais fidèles comme des chèvres derrière un bouc. Mais cette imagerie, ce capitalisme musical ne doivent pas faire oublier que le Black Metal est l’un des genres les plus fertiles de la scène internationale, et que ses fans justement, en suivent les dogmes presque aveuglément, mais pas seulement. Ils scrutent, analysent, guettent, se présentent aux concerts en masse et en tenue de combat parce que leurs héros sont toujours aussi vaillants et crédibles, des décennies après être passé eux-mêmes du stade de fan à celui de musicien référentiel. Et de l’underground le plus putride à l’establishment le plus respecté, les groupes continuent de creuser la tombe de la musicalité et de mener cette guerre disharmonieuse contre le mainstream, dont ils font presque partie et qu’ils conchient pourtant. Des plus prolifiques au moins diserts, la bataille est rangée, et le front fait face. Sur ce front, de manière épisodique, nous retrouvons les chevaliers norvégiens de 1349, qui depuis la fin des nineties mènent campagne personnelle, qu’ils gèrent difficilement, mais avec toujours autant de franchise. Leurs dévots les plus soudoyés vous avoueront qu’ils n’ont jamais commis de faux-pas, mais cette hypocrisie serait handicap au moment de juger de leur œuvre globale. Car en deux décennies, les hordes d’Oslo ont souvent marché de côté, de revers pour retourner dans l’ombre, semblant parfois, souvent, incapables de reproduire une recette qui avait fait d’eux les exterminateurs les plus efficaces du grand nord.
Pour beaucoup, 1349, c’est une trilogie infernale, initiée en 2003 avec Liberation, et achevée en 2005 par Hellfire. Entre les deux, Beyond the Apocalypse, et un triumvirat de violence condensé en trois petites années, qui acheva de les consacrer barbares absolus. J’en retiens ceci. S’il est certain que ces trois premiers longue-durée ont défini un son, tout comme l’ont fait Show No Mercy, Hell Awaits ou Reign in Blood dans un autre monde, s’il est évident que la réputation du groupe a culminé avec l’impitoyable et effrayant Hellfire, le trésor de la discographie des norvégiens n’est pas à chercher dans ces années-là. Propos éminemment subjectifs, mais pardonnez à leur auteur un traumatisme qui n’a jamais guéri. La découverte hébétée en 2010 du monumental Demonoir, de ces œuvres en cuir de peau humaine qui définissent les tables de loi et contournent les principes les plus établis. Fraichement accueilli à sa sortie, ce sommet de vilénie pâtit de la réputation catastrophique et méritée de son prédécesseur, l’ignoble et fermement raté Revelations of the Black Flame, pathétique tentative du quatuor de structurer un récit d’horreur, et disque complètement vautré dans le ridicule le plus achevé. Sonnera peut-être un jour l’heure de sa réhabilitation, il n’en restera pas moins d’ici-là le nadir du potentiel de quatre musiciens s’étant perdus sur la route de l’expérimentation. Mais bien au-delà de cette atténuation par le bas, Demonoir rompait brutalement avec une recette qui avait fait son temps, celle de la violence ininterrompue et de la cruauté gratuite, pour imposer des ambiances, délétères, des atmosphères, noires comme le jais, et un silence de quatre ans que le réjouissant mais humble Massive Cauldron of Chaos allait rompre quatre ans plus tard. Et sans le savoir, en l’écoutant, nous anticipions un nouveau blackout de cinq ans, avant qu’un EP mystérieux ne sorte de la grotte et nous délivre un message presque trop clair pour être interprété : le 1349 de Demonoir était de retour, avec sa grandiloquence satanique de circonstance, travesti sous les traits d’une honnêteté de ton que le titre prophétique de The Infernal Pathway dévoilait sans ambages.
Entendons-nous bien. The Infernal Pathway adopte les structures sinueuses de son illustre modèle, en reprend le principe narratif, l’ouverture d’esprit maléfique, les transitions en inserts nauséeux, mais ne parvient pas à en égaler la cohérence ni la pesanteur moite. Il en propose néanmoins une digression intéressante, qui suit de temps à autres des pistes sinon essentielles, du moins inhabituelles (« Abyssos Antithesis », l’archétype d’attaque Blackened Thrash nordique, plus coutumière des fans de MOTORHEAD et des débuts de BATHORY que de la seconde vague BM norvégienne, le break central de « Striding The Chasm » qui épouse lui aussi une séduction Punk avec un riff bizarrement accrocheur et presque groove), mais qui globalement calque ses schémas sur ceux des plans datés de 2010 qui permirent la construction d’un mausolée de douleur. Heureusement pour nous, le travail global permet une fois n’est pas coutume d’apprécier le travail individuel de chacun, même si une fois encore, ce sont les prouesses inouïes de Frost à la batterie qui retiennent l’attention. Et sans revenir sur le timbre unique de Ravn au chant, il est utile de souligner les efforts d’Archaon pour tirer de sa guitare des motifs assez peu usuels, toujours en rupture de bans entre un BM formel et des envies d’adultère Heavy Metal, avec des licks qui restent en mémoire, comme ceux que « Through Eyes Of Stone » développe pendant à peine plus de trois minutes. « Enter Cold Void Dreaming » renoue quant à lui avec les traditions passées, se replongeant dans la lave bouillante d’un Black historique, une fois encore transcendé par le chaos rythmique de Frost qui ne semble jamais en panne de créativité au moment d’imposer sa patte. Sacré meilleur batteur de sa génération, le percussionniste donne de sa personne pour conserver son titre, en soutenant de toute sa force des thèmes parfois un peu rebattus.
Difficile toutefois de pointer du doigt des éléments probants au moment de comparer négativement ce septième LP à son insurpassable original de 2010. L’ambiance générale est pourtant la même, les détails presque similaires, mais les ouvertures plus franches. On trouve même parfois des preuves directes d’une optique peaufinée, lorsque « Towers Upon Towers » s’appuie encore plus sur des cassures bizarres et des humeurs Thrash pour présenter un visage progressif qui a son charme vénéneux. « Dødskamp », déjà connu, nous en revient avec ses dissonances et sa partie de kit lunaire, mais c’est bien le final « Stand Tall In Fire », qui de sa majesté viking à la Quorthon nous prend à revers, permettant à Ravn de s’adonner aux joies du chant parlé, seul instant où la basse de Seidemann parvient à s’imposer. Mais encore une fois, malgré un développement assurément sombre, ce sont les silences que l’on remarque, l’acidité de la guitare d’Archaon et les soudaines creusées rythmiques qui n’ont aucun équivalent sur le marché actuel. Et de son attitude entre deux eaux, de ses regards appuyés en arrière tout en cherchant le futur, The Infernal Pathway, loin de jouer le statisme se pose en œuvre atypique, ce que chaque nouveau chapitre de la saga 1349 est depuis bien longtemps. Plus de vingt ans me semble-t-il…
Titres de l’album :
01. Abyssos Antithesis
02. Through Eyes Of Stone
03. Tunnel Of Set VIII
04. Enter Cold Void Dreaming
05. Towers Upon Towers
06. Tunnel Of Set IX
07. Deeper Still
08. Striding The Chasm
09. Dødskamp
10. Tunnel Of Set X
11. Stand Tall In Fire
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09