Du Thrash, j'en bouffe à tous les râteliers depuis 1985. J'ai tout essayé, tout connu, des origines à aujourd'hui, de l'essence d'Essen au b.a.-ba de la Bay Area jusqu'à la vague nostalgique du vingt-et-unième siècle, en passant par les attaques brutales sud-américaines, les tentatives asiatiques un peu maladroites, et même les substituts pour essayer de faire passer la pilule. Alors soyons clair, il n'y a aucun style qui m'enthousiasme plus, même rabâché, même réchauffé, un peu comme ces films d'horreur que je bouffe par paquets de dix et qui ne m'offrent rien de plus qu'un palliatif de seconde zone. Un placebo bien dosé, une cure savamment traitée, et puis c'est tout, c'est une addiction comme une autre, que j'assume, et qui fait de moi le spécialiste de la cause que je suis depuis plus de trente ans. Alors, lorsqu'un excellent album du cru sort, croyez bien que je suis souvent l'un des premiers à le remarquer. Et lorsqu'un extraordinaire album sort, je suis pratiquement le premier à m'y attaquer. Et si aujourd'hui, j'agite frénétiquement mes petits doigts sur mon clavier, c'est justement pour vous avertir de la disponibilité d'un album hors-normes, de ceux que l'on rencontre une ou deux fois par année, lorsque les dites années sont fertiles. Et une fois n'est pas coutume, ce groupe ne nous en vient pas du Brésil, de Californie ou d'Allemagne, mais bien d'Angleterre, l'un des parents les plus pauvres d'un sous-genre qui n'a jamais eu ses lettres de noblesse à la cour de la Reine. Et ce groupe existe déjà depuis 2014 , a publié deux longue-durée, mais vient d'atteindre son apogée avec cette étape tant crainte du troisième virage à négocier, et autant dire les choses comme elles sont, The Last Days of the Good Times est un petit miracle en soi, le genre d'en-cas qui vous ferait oublier l'aspect roboratif des dix-mille entrées vintage que vous avez pu vous enfiler les mois précédents. Tiens, mieux, il les excuse et les cautionne presque de son esprit aventureux, puisqu'il vous rassure quant à la pérennité d'un style que vous pensiez exsangue sous sa forme la plus contemporaine. Alors, à cette question que tout le monde se pose sans oser la formuler, je réponds par un oui massif. Le Thrash peut encore se renouveler, aller de l'avant sans jouer l'avant-garde, et en gardant intact ses principes de base.
Vitesse, puissance, culot, et efficacité. Telles sont les principaux atours des PSYTHON qui avec leur troisième chapitre signent une renaissance incroyable.
Nous en venant du South Yorkshire, les PSYTHON sont trois, quatre ou cinq selon les pages officielles, avec un trio de base établi qui revient comme une référence (Bing Garcia – chant, Will Price – guitare et Luke Rodgers – guitare), auquel vient se greffer une section rythmique apparemment composée de Harry Redfern et Eddie Rudd. Et après un premier effort qui s'était déjà fait remarquer, malgré certaines maladresses (...Outputs, 2016), puis un second qui n'avait fait que confirmer que les mises plaquées sur le tapis allaient remporter le jackpot (Hatred, 2017), les anglais tentent donc le fameux coup du chapeau avec un disque tellement hybride qu'on peine à le ranger dans une case bien précise. S'il est certain qu'il s'agit bien là de Thrash, du moins en grande partie, il est indéniable que les aspirations globales se permettent d'intégrer des éléments plus généralement Metal, avec un gros feeling Hardcore, sans tomber dans les travers d'un Crossover un peu trop facile. Mais si les groupes old-school et les valeurs sûres sont votre pain quotidien, attendez-vous à quelques surprises de la part de ces oiseaux, qui n'ont pas l'intention de se laisser enfermer dans une trop petite cage. Difficile de référencer un LP de la trempe de The Last Days of the Good Times en le comparant à des influences trop figées. D'ailleurs, le groupe se garde bien d'en nommer, préférant rester dans un anonymat de tutelle qui lui convient très bien, et « Sozzard » de très vite révéler pourquoi. Entre une rythmique totalement Punk qui prend à la gorge, des riffs rappelant le meilleur d'OVERKILL, une basse claquante typiquement NYHC et un chant encore plus écorché qu'un vieux greffier aux cordes vocales rouillées, le tableau est saisissant, et la puissance ébouriffante. Mais de là, impossible de poser un cadre précis, puisqu'à l'occasion d'un refrain sorti de nulle part, les anglais nous extrapolent une mélodie sur fond d'arrangements oniriques et mélodiques, tâtant de grouillement de sons pour mieux nous entuber à l'unisson. On pense CYNIC pour les riffs en tapis sonore, on songe à FORBIDDEN pour cette rage qu'on ressent encore, et au final, on pense même à BELIEVER, ATHEIST, et à MYRATH pour ces arabesques arabisantes qui interviennent comme un génie sortant de sa lampe. Tout ça étonne, tout ça détonne, et les surprises ne font que commencer.
Mais pour être tout à fait honnête et ne pas vous vendre du poivre gris au prix du safran, je me dois de préciser que les PSYTHON ne parviennent pas à garder ce niveau de créativité et d'intensité tout du long. Si la première partie de l'album fait immanquablement penser à la percussion d'un RUSH perdu dans les couloirs du temps et d'un OMNITRON soudainement à l'aise dans le sien, la seconde se permet un peu trop souvent de rester collée à des préceptes plus classiques. On sent alors une dualité classicisme/innovation pointer le bout de ses accords, et c'est ce qui m’empêche de crier au prophète un peu trop tôt. Mais la dite première partie étant tellement fertile, je ne peux que m'agenouiller devant ces preux chevaliers qui sur l'incroyable « Crock o' Bile » synthétisent tout ce que le genre à pu proposer de plus osé depuis sa création, et font la jonction entre les séminales eighties et les plus aventureuses nineties, construisant ainsi un pont entre le DEATH ANGEL le plus récent et les anciens FIFTH ANGEL pour réunir le meilleur de l'autre monde sur le nôtre. Guitare qui osent et qui réussissent, chant théâtral qui module ou qui braille, acoustique, pureté, violence, options techniques et progressives de rigueur, et textures en arrière-plan qui enrichissent sans encombrer, le résultat est quasiment parfait, et inespéré. Une adaptation des impératifs californiens dans un contexte purement européen, pour une réussite en mode majeur que « Semantic Psychopath » crie de tous l'EXODUS de sa voix. Des riffs qui s'incrustent sous les ongles, une rythmique qui en colle partout en démarquage des WATCHTOWER, de soudaines accélérations typiques de l'école US, et surtout, une propension à créer autre chose qu'un énième succédané qui fait illusion le temps de trois chansons avant de se confondre lui-même avec ses partitions.
Mais comme je le disais, malgré l'envie, subsistent encore quelques scories. Si la machine s'emballe et cogne à tout va dans un maelstrom de violence rarement atteint (« Inebriated »), si les capacités instrumentales sont tangibles et utilisées avec pertinence au point de nous faire dériver le long d'un flow Techno-Thrash progressif qui a su garder toute sa puissance, si le shredding rappelle les plus fines gâchettes du haras, il reste encore quelques menus progrès à faire pour garder l'attention pleine. Mais quelques petites surprises radicales («This Town » et ses chœurs démoniaques), un final plus ciselé aux harmonies apaisées, montant en crescendo Heavy pour nous laisser l'opéra propre et libre dès le lundi (« The Last Days of the Good Times »), et des crises de folie (« Throwaway », tout sauf un truc à jeter, ou alors notre tête contre les murs), font de ce troisième album une folie, de ces œuvres qui vous prennent par surprise et ne vous lâchent plus jusqu'à la reprise. Et si j'accorde une note aussi haute aux PSYTHON, c'est certainement parce que je les soupçonne d'avoir encore une marge de manœuvre conséquente, mais aussi parce que leur The Last Days of the Good Times m'a de nouveau fait croire que le Thrash pouvait se glisser hors de ses sentiers trop battus pour proposer un nouveau menu. La vie étant faite de cycles qui se répètent et de mélangent, il n'est pas incongru de croire que ces anglais pourraient représenter le fameux nouveau souffle que vous attendiez. Et moi aussi d'ailleurs.
Titres de l'album :
1.Knack
2.Sozzard
3.Crock o' Bile
4.Semantic Psychopath
5.Inebriated
6.When the Lights Go Out
7.DIY
8.Thrice
9.Phallus of the Goddess
10.Throwaway
11.This Town
12.The Last Days of the Good Times
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