(Librement traduit d’échanges conjugaux en suédois, enregistrés sur Tascam)

« Rogga, t’as descendu les poubelles ? »

« J’peux pas, je compose !!!! »

« Rogga, t’as donné à manger à Sveta ?? (La chienne du couple, croisée labrador et bichon maltais)

« J’peux pas, j’enregistre !!!!! »

« Rogga, t’as pensé à appeler le médecin pour tes plaques ??? »

« J’ai pas pu, je montais un nouveau groupe !!!!! »

« Rogga, merde, t’as laissé la viande cramer sur le feu !!!! »

« Bah oui désolé, je faisais la promo de mon nouvel album avec EYE OF PURGATORY !!!! »   

Ainsi va la vie chez les Johansson, couple Ô combien atypique associant une secrétaire de mairie et un musicien boulimique. Tout le monde dans l’underground morbide connaît la propension de Rogga Johansson à monter des groupes aussi souvent qu’il ne va pisser, ainsi personne ne sera étonné de constater que l’un de ses projets, EYE OF PURGATORY vient de sortir son second album sur le très respectable label Transcending Obscurity Records. Pour les quelques ermites et autres fans de Hard-FM totalement largués jusqu’ici, je reproduis in extenso ou presque le CV du bonhomme, histoire que vous constatiez l’étendue du désastre productif :

BLOODGUT, DEAD SUN, DOWN AMONG THE DEAD MEN, ECHELON, FONDLECORPSE, FURNACE, GHOULHOUSE, GOD CRIES, GRISLY, HEIR CORPSE ONE, HOUSE BY THE CEMETARY, HUMANITY DELETE, JOHANSSON & SPECKMANN, LOBOTOMY DEPT, MASSACRE, MEGASCAVENGER, METAL AGAINST CORONAVIRUS, MONSTROUS, NECROGOD, PAGANIZER, PERMADEATH, PILE OF SKULLS, PUTREVORE, REEK, REVOLTING, RIBSPREADER, ROGGA JOHANSSON, SEVERED LIMBS, STASS, STYGIAN DARK, SVITJOD, THE CLEANER AND MR. FILTH'S VAN MURDERS, THE DEAD COLD, THE SKELETAL, THOSE WHO BRING THE TORTURE, TO DESCEND, CARVE, DEMIURG, EATEN, FOREBODING, MINOTAUR HEAD, SKELETAL SPECTRE, SWARMING, TERMINAL GRIP, THE GROTESQUERY, CATACOMB, DISRUPTOR, TROIKADON, BANISHED FROM INFERNO, GRAVEYARD AFTER GRAVEYARD, SINNERS BURN, THE 11TH HOUR, DERANGED (live), BONE GNAWER, TO THE GALLOWS.

Bref, Rogga compose, enregistre, produit et diffuse plus vite que NRJ 12 ne case ses candidates refaites, ce qui a parfois tendance à le faire sombrer dans la redondance, la redite malhabile, la répétition grossière, l’homme s’étant fait connaître pour sa passion indéfectible envers le Death Metal à la suédoise, dit « Swedish Death ». Et si certains de ses projets n’ont fait que recycler des idées déjà largement répandues dans son pays depuis l’orée des années 90, d’autres au contraire les ont retraitées à l’eau chaude pour les agrémenter de mélodies sous-jacentes plus digestes, ce qui est le cas d’EYE OF PURGATORY, l’un de ses concepts les plus viables.

Trois ans après le déjà excellent The Rotting Enigma, Rogga retrouve deux compères à la hauteur de sa légende, et se fait plaisir en compagnie de Jeramie Kling (basse, DRITT SKIT, EX DEO, GOREGÄNG, INFERNAEON, INHUMAN CONDITION, NECROMANCING THE STONE, NINETY MINUTE REFLEX, RIBSPREADER, THE ABSENCE, VENOM INC., SCAB (live), FORE, KILL DIVISION, SMOKE & MIRRORS, ex-MASSACRE, ex-SKINEATER, ex-WOMBBATH, ex-GUS G.) et Taylor Nordberg (batterie, guitare et claviers, DRITT SKIT, GOREGÄNG, INFERNAEON, INHUMAN CONDITION, RIBSPREADER, SCAB, THE ABSENCE, FORE, SMOKE & MIRRORS, ex-MASSACRE, ex-WOMBBATH, ex-GUS G. (live), ex-NECROMANCING THE STONE (live), ex-SOILWORK), qui sont visiblement très heureux de partager cette grosse tranche de Death à la suédoise, après avoir intégré certains des groupes les plus reconnus de la scène.

Inutile de tourner autour du pot, si certaines des exactions de notre frontman favori m’ont plus ennuyé qu’une rétrospective Agnès Varda sur Arte, EYE OF PURGATORY fait toujours partie du haut du panier de la production du suédois, et propose encore neuf morceaux taillés pour le studio et la scène. Dans un registre MASTER plus évolué, ou LIK moins photocopieuse, The Lighthouse est un phare dans l’océan old-school actuel, et nous éclaire de ses énormes riffs qui montrent que Rogga sait encore se montrer performant quand il se force un peu. Tous les morceaux sont portés par un thème monstrueux, et les performances individuelles sont à la hauteur de la viabilité des compos. Rogga a trouvé le parfait compromis entre ENTOMBED et AT THE GATES, entre DISMEMBER et EDGE OF SANITY, et nous piège dans le froid glacial tout en prenant soin de nous laisser quelques buches sèches et un paquet d’allumettes pour nous réchauffer.

Soyons clair, sans rien inventer, ce second album de la bête est gigantesque, et se savoure comme un tartare bien sanglant pas tout à fait décongelé. Du Death traditionnel, assaisonné du savoir-faire de Rogga, qui une fois de temps à autres, parvient à faire la différence entre un enthousiasme excessif et une véritable créativité de forme. Pour juger sur pièce, enfilez-vous les oreilles grandes ouvertes « Carved in a Stone Bleeding » ou « Rotting Pathways », et si vos tympans n’y voient pas le plus bel hommage à l’une des scènes les plus fondamentales du Death sans additifs, alors, achetez-vous un sonotone. Non remboursé par la sécurité sociale.   

Titres de l’album:

01. And From the Fog…

02. The Lighthouse

03. Fornever to Awaken

04. Carved in a Stone Bleeding

05. Pieces of a Fading World

06. They Silently Await

07. Where Slowly Life Fades

08. Rotting Pathways

09. Rebirther

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