Coincés dans le Larzac ou les Deux-Sèvres, les jeunes s’ennuient et rêvent des rêves de leurs aînés. Des rêves qui trainaient du côté des Etats-Unis, de la Californie, et de la Floride surtout, une Floride fétide aux alligators féroces et aux overdoses fréquentes. Mais la Floride des années 80 n’est pas uniquement celle de Miami Vice, avec costumes, voitures de sport, montres hors de prix et escort-girl en porte-jarretelles. La Floride des années 80 est aussi celle de la violence musicale la plus crue et abominable, que ses plus fervents défenseurs et pratiquants nommèrent Death Metal, le Metal de la mort.
Je m’en souviens comme si c’était hier. Les sorties consécutives de DEATH, OBITUARY, puis MORBID ANGEL, la sainte trinité, avant que le Suède ne change le game et en rafle la moitié du following. Qui a pu oublier les sensations ressenties à l’écoute de Slowly We Rot et Cause of Death, ou d’Altars of Madness et Blessed are the Sick ? Certainement pas moi, et encore moins les TRIBAL GAZE qui ont dû décortiquer et disséquer le mouvement avec beaucoup d’application et de passion.
Un premier EP en 2021 nous avait averti de la naissance de ce quintet versé dans la nostalgie, et 2022 est donc l’année de l’émergence sur le grand marché via ce premier long, de trente-cinq petites minutes, mais qui suffisent largement pour en faire un bréviaire précis sur les agressions du passé qui reviennent à la surface du présent. Et si on comprend très rapidement que l’obsession numéro 1 de TRIBAL GAZE est indéniablement MORBID ANGEL, on sent aussi que sa musique est perméable à d’autres artistes tout aussi misanthropes et agacés de tout, y compris l’empathie.
L’importance de la première partie de discographie de Trey et les siens (de A à D au moins, le reste se discute) est ici mise en relief par un collectif qui en reproduit les recettes à la perfection, produisant un Death touffu et technique mais totalement atonal, entre réflexe conditionné et cruauté instrumentale. Et même en se disant que cette créativité reste sous tutelle, on ne peut qu’admirer les capacités de reproduction d’un groupe qui n’a d’autre ambition que de partager sa passion.
En acceptant le mimétisme parfois troublant, mais en tolérant aussi cette vision passéiste trop bien faite pour n’être qu’une pâle copie, The Nine Choirs devient un album tout à fait recommandable pour les amateurs de brocante professionnelle aux antiquités encore valables. Et pour cause, puisqu’en leur temps, elles furent les plus prisées.
Et puis, impossible de nier la franchise d’un quintet (Zachary Denton – basse, Quintin Stauts & Ian Kilmer – guitares, McKenna Holland – chant, Cesar “Ceezbone” De Los Santos – batterie) qui place en ouverture un morceau sous perfusion comme « Cold Devotion ». Car cette dévotion froide se permet l’emprunt de quelques riffs made in Florida, et symptomatiques de la démarche de MORBID ANGEL tout en y ajoutant une pointe de Hardcore revanchard et puissant. Le mélange est donc explosif et divertissant, même si la suite de l’aventure se veut plus traditionnelle et prévisible.
On notera quelques élans plus francs et massifs, comme des coups de massue assénés sur le crane de ce pauvre Lovecraft (« Shapeless Sovereign »), des ralentissements caractéristiques de ces coups du lapin largement utilisés dans le Death de l’orée des nineties, une gravité de ton générale qui n’empêche pas quelques astuces groove et catchy, et une implication remarquable des compositions qui ne cherchent qu’une seule chose : remonter à la source, et rester jeune et mort, éternellement.
Dans la droite lignée de son unique EP Godless Voyage, TRIBAL GAZE nous entraîne donc dans un labyrinthe de violence et d’occultisme, un labyrinthe complexe, aux nombreuses impasses, qui n’est certes pas le plus difficile à résoudre, mais qui réserve quand même quelques surprises. La partie solo de « Jungle Rituals », très inspirée et mystique, ou l’efficacité plus purement Metal de « To Gather in Its Presence » en étant deux exemples probants.
Du bon, du très bon, de l’excellence même, et un premier album qui mérite une attention particulière des fans floridiens les plus fidèles et anciens. Une façon personnelle d’actualiser les enseignements de MORBID ANGEL, qui loin d’être déplaisante, prend des airs d’inédits de David Vincent et les autres, soudainement exhumés d’un tiroir fermé à clé depuis des années.
Alors, certes, lorsqu’on l’ouvre, l’odeur est subtilement fétide, mais le goût (mauvais) est intact.
Titres de l'album :
01. Cold Devotion
02. And How They Wept for Eternity
03. With This Creature I Return
04. To Gather in Its Presence
05. As a Thousand Voices Sing
06. Jealous Messiah
07. Shapeless Sovereign
08. Jungle Rituals
09. Worthless Offering
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30