Et là vous me direz, très justement d’ailleurs, « mais pourquoi chroniquer le sixième longue durée d’un groupe ultra connu, qui a déjà vendu 3.8 millions d’albums et 7.5 millions de singles comme indiqué sur le préambule de la bio de leur page Facebook, et qui est aussi adulé que détesté ? »
Et la réponse sera d’une lénifiante simplicité, une fois de plus. Parce que, je ne sais pas, je fais ce que je veux, et il n’y a pas de raison particulière. D’autant plus que je n’ai jamais parlé de ce groupe dont la musique m’est presque étrangère, et dont je ne connais que quelques albums et une poignée de titres. Mais comme il faut bien se montrer ouvert, je me lance, et c’est ainsi.
Alors, HINDER, pour ceux qui ne connaitraient pas, c’est qui, et c’est quoi ? Un groupe américain, évidemment, lancé à l’orée du nouveau millénaire, et qui a profité de la vague de succès des groupes dits « alternatifs » de l’époque, dont il faisait finalement partie. On a souvent glosé à leur propos, avec raillerie et ironie, en les comparant à la tête de turc mondiale NICKELBACK, mais si les points communs sont nombreux, les différences le sont tout autant. Certes, le chant présentait des similitudes, la musique aussi, dans cette façon de vouloir fédérer tous les publics, dans la production polie à l’extrême, et l’incrustation de motifs électroniques dans un contexte Rock.
Mais l’un dans l’autre, HINDER est quand même moins exposé que NICKELBACK, et donc, moins connu (en Europe, tout du moins), et donc moins susceptible de s’en prendre une de la part d’un public et d’une presse implacables qui ne pardonnent aucun faux-pas commercial trop prononcé…
Six albums donc, dont le premier, Extreme Behavior fut publié en 2005, et le cinquième When The Smoke Clears qui fêtait l’arrivée de Marshal Dutton au micro en 2015, des tournées mondiales, des charts pris d’assaut, et une réputation qui n’est plus à faire, plus de quinze ans après leur naissance. Est-ce pour autant que Marshal (chant), Joe (guitare), Mark (guitare), Mike (basse) et Cody (batterie) sont devenus si prévisibles que l’on pourrait résumer cette chronique en quelques comparaisons lapidaires et expéditives ? Oui et non, puisque la musique du groupe n’a pas vraiment changé, mais suffisamment pour se démarquer quelque peu des automatismes les plus flagrants, et des tics les plus irritants. Si la révolution stylistique n’est pas à l’ordre du jour, le glissement des années est quand même patent, même si l’on retrouve sur The Reign tout ce qui a fait la gloire du quintette. On ne change surtout pas une formule qui gagne, et les originaires de l’Oklahoma en sont bien conscients, c’est sans doute pour ça que ce sixième longue durée regorge et déborde de refrains à reprendre en chœur par la foule, de riffs formatés, de rythmiques pilonnées et de couplets en demi-teinte qui permettent de préparer ses mouvements pour le jump central, toujours bien placé. Comme vous le constatez, si vous étiez fan des disques précédents, il y a peu de chance que vous manquiez celui-ci, qui n’a pas grand-chose à envier au When The Smoke Clears de transition. Depuis deux ans, Marshal a pris ses marques et se montre de plus en plus à l’aise dans son rôle de frontman, sans pour autant moduler à outrance ses interventions qui restent classiques, mais convaincantes.
Sur The Reign le groupe a décidé d’explorer la bataille émotionnelle de la vie d’une Rock star, et la lutte qu’elle représente au jour le jour. « L’implication émotionnelle qu’un artiste doit endurer pour rester créatif, et les hauts et bas de sa carrière dans la musique tendent à aboutir à l’abus de substances, et au suicide. Et malheureusement, le monde a perdu beaucoup de ses héros de cette façon. » Et en tant que groupe de Hard-Rock moderne, légèrement alternatif sur les bords, HINDER a dû se sentir concerné par les disparitions d’artistes comme Chris Cornell et Chester Bennington, qui ont laissé des millions de fans orphelins et dans les affres du questionnement, ne sachant pas vraiment pourquoi leurs idoles de toujours avaient choisi de les quitter…C’est donc un album adulte – nous éviterons le terme « de la maturité » pour rester poli – que le quintette nous propose, et qui distille des riffs plus profonds, mais aussi des lignes de chant plus intimes et impliquées, comme le démontre le très convaincant et prophétique « Too Late », qui rapprocherait même les américains du BON JOVI le plus transitoire.
D’ailleurs, le groupe présente son nouveau-né via ce faire-part assez juste, mentionnant un « LP plus sombre et Heavy, que les précédents, même si les fans old-school y retrouveront des chansons typiques ». Et loin d’un discours promotionnel langue de bois, cette déclaration somme toute très honnête colle aux sillons d’une œuvre qui juxtapose la lucidité d’un âge qui avance et l’énergie d’un groupe qui commence. Et pourrait donc, de facto, devenir l’un des meilleurs travaux d’un combo plus si superficiel qu’il n’en a l’air…
Et si l’affaire commence sous des auspices prévisibles via le classique à outrance « The Reign », qui bondit d’un up tempo et de chœurs rageurs, et continue dans l’intimisme un peu surfait de « Burn It Down » qui dégénère vite en Heavy moderne et mordant, elle dévie rapidement vers un glissement plus personnel, qui sans rien renier du passé, se tourne vers un avenir peut-être plus assombri qu’on le pensait. Les hits sont là évidemment, comment faire autrement, mais on les sent plus réfléchis, moins faciles et « de reflexe », à l’image sonore de ce « Drink You Away », au texte poignant et à la guitare plus déliée, qui sent même les effluves de Nashville flottant jusqu’à l’Oklahoma. Un titre qui une fois de plus suggère quelques sympathies entre les HINDER et BON JOVI, tout comme les BLACK CROWES en version plus « light », mais toujours sincères. Doit-on pour autant ranger le quintette dans la catégorie des groupes burnés, propres à séduire un public peu enclin à se laisser influencer par les modes présentes et passées ? Il reste encore un peu de marge, mais Cody Hanson et sa bande se rapprochent doucement de cette case, en commençant à abandonner certaines attitudes un peu trop faciles pour se remettre en cause. Peut-être est-ce la thématique de l’album qui a entrainé ce changement dans la continuité, mais on ne peut que le saluer. Tout n’est pas encore parfait au niveau littéraire, et heureusement que le binaire puissant de « Making It Hard » nous fait oublier la complaisance de ses rimes, mais la doublette finale « Long Gone » et son ambiance ambivalente et « Loser’s Salute » et son boogie endiablé nous laissent sur une très bonne impression, un peu comme si des musiciens que nous avons toujours connu avaient enfin choisi de laisser de côté leurs blagues les plus évidentes et leur attitude boudeuse trop flagrante.
Mais…
Je ne sais pas si The Reign pourra entraîner dans son sillage les plus réfractaires à la cause HINDER, qui préfèreront jouer les autruches et se baser sur des souvenirs obsolètes enfouis dans leur mémoire. Mais en tant que sixième album d’un groupe plus que confirmé, il se place comme l’une des réalisations les plus convaincantes d’un quintette qui jusqu’à lors avait toujours privilégié la facilité à la profondeur, et qui finalement, n’est pas ridicule du tout dans sa tentative de nous émouvoir à l’existence d’artistes partis un peu trop tôt. Souhaitons-leur de persévérer sur la voie de la qualité sans avoir à déplorer la perte de l’un des leurs. Ils viennent de prouver qu’ils méritent finalement le meilleur.
Titres de l'album:
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