Allez, petite récréation. Vous connaissez le jeu du pendu ? Ok, allons-y.
V_ _ _AG_
NW_ _H_
O_ _ _CHO_ _
Alors, vous avez trouvé ? Si vous êtes un peu vif et que vous êtes habitué aux colonnes de Metalnews, vous aurez sans aucun effort deviné les trois mots partiellement dévoilés. Oui, vous avez raison, en plein dans le mille, Vintage, NWOBHM et Old-School, tel sera le menu du jour en compagnie de Danois qui en connaissent un rayon sur la question, et qui abordent celle épineuse de la réception critique du troisième album, étape toujours très compliquée à négocier. Le premier bénéficie toujours d’une certaine mansuétude, le second doit confirmer ou redresser la barre, mais le troisième est censé propulser dans une autre dimension, et évoquer la fameuse « maturité » dont les journalistes se gargarisent tant. Et après sept ans de silence, les ALTAR OF OBLIVION n’avaient pas vraiment mis toutes les cartes de leur côté, s’exposant à l’amnésie de leurs fans et à l’oubli des autres, ce qui aurait été grandement immérité au vu de leur parcours déjà bien entamé. Car la formation du groupe ne remonte pas à hier, mais bien à 2005, date de la genèse de ce projet un peu à part sur la scène danoise, mais relativement symptomatique d’une démarche globale, et spécifique aux contrées nordiques. Deux ans après leur naissance, les originaires d’Aalborg publiaient leur première démo, The Shadow Era, mais patientèrent encore deux ans avant d’oser le premier long, Sinews of Anguish, dont le titre bizarre ne cachait en rien la qualité des compositions. Qualité que Grand Gesture of Defiance transcenda trois ans plus tard, avant que le groupe ne s’éclipse un certain temps, ne lâchant qu’un modeste EP pour nous faire patienter. Mais on pouvait compter sur les esthètes de Shadow Kingdom Records pour ne pas nous laisser dans l’ignorance trop longtemps, et le label américain peut depuis le mois d’avril s’enorgueillir de compter un succès de plus à son palmarès, The Seven Spirits nous entraînant sur les pistes de légendes occultes, de traditions ancestrales, et de quêtes mystérieuses, le tout sur fond de pur Heavy Metal de tradition, tel qu’on le pratiquait encore à l’orée des années 80.
Soyons honnête, et avouons avec une légère partialité. Il est très difficile de ne pas aimer ALTAR OF OBLIVION si l’on prétend aimer le Metal depuis ses origines. Les danois (Mik Mentor - chant, C. Nørgaard - basse, Martin Meyer Mendelssohn Sparvath - guitare/claviers, Danny Woe - batterie et Jeppe Campradt - guitare) s’y connaissent comme personne pour manipuler le vocable vintage avec maestria et grandiloquence, et il est impossible en se penchant sur ce troisième album de ne pas se souvenir de l’amour éprouvé pour les premiers efforts de BLACK SABBATH, mais surtout de CANDLEMASS, de ST VITUS, et des plus tardifs SOLITUDE AETURNUS. Doom ? Vous aurez partiellement raison, car la musique présentée en ces sillons en utilise les codes, mais les sublime d’une approche opératique typique du Hard Rock précieux des années 70, tout comme de l’optique plus puriste des combos suédois du nouveau millénaire. Se détachant des suiveurs se contentant de repiquer des plans et idées dans les song-books de leurs idoles, ALTAR OF OBLIVION va beaucoup plus loin que la simple copie carbone, et parvient toujours à conférer à ses compositions un caractère farouchement épique, flamboyant dans les faits, mais terriblement humble dans le fond. C’est donc la passion qui anime ces chevaliers en armure de plomb, qui chevauchent la lande du passé pour mieux apprécier le présent, et en acceptant la production la plus puissante et claire de leur carrière, les cinq musiciens ont fait le bon choix. Nous pouvons donc apprécier toutes les nuances de ces sept chansons de geste, qui nous ramènent à l’heure glorieuse d’Epicus Doomicus Metallicus, premier pamphlet de CANDLEMASS qui avait défini les contours du Doom progressif moderne, ce que confirme la voix brillante à la limite de la tragédie de Mik Mentor, dont le timbre assuré se rapproche de la poésie vocale sombre de Leif Edling. On sent l’analogie transpirer de l’inspiration de « Gathering at the Wake », qui aurait largement pu figurer sur cet album de légende, même si les danois ne méritent pas de rester dans l’ombre de leurs ainés.
Car en effet, ils vont beaucoup plus loin qu’une lourdeur omniprésente. On ressent d’ailleurs sur le final de ce morceau une sévère fascination pour la NWOBHM, eu égard à cette envolée finale digne du grand RAINBOW, en version plus musclée, ou d’un DIO plus inspiré. D’ailleurs, l’hymne « No One Left » confirme cette sensation de son mid tempo sautillant et de ses harmonies presque Pop, se rapprochant sans le toucher du mouvement rétro-hard des collègues suédois, gardant cette classe naturelle qui empêche le quintet de trop se fourvoyer dans l’opportunisme. Mais on est parfaitement conscient de cette intelligence dès l’ouverture noire et emphatique de « Created in the Fires of Holiness », qui après une intro larger than life nous plonge dans des arrangements estampillés 79/80, qu’une gigantesque basse ronflante vient troubler de son assurance. Si les plus exigeants pointeront quelques excès vocaux de Mik qui parfois en fait sans doute un peu trop, les connaisseurs reconnaîtront la patte d’un groupe qui a beaucoup écouté, digéré, et qui restitue avec une formidable créativité des astuces assimilées il y a une trentaine d’années, distillant des textes parfaitement en adéquation avec un instrumental débordant de fougue et d’implication. Des riffs qui se télescopent sans perdre leur substance, à cette rythmique assurée mais souple, tout inspire confiance, et « Solemn Messiah » d’en jeter en tant que premier gros morceau au mid tempo costaud. Couplets au souffle épique, refrains typiques, breaks qui font briller les épées, et épopée en crédibilité majeure pour un combo qui n’a pas oublié de composer avant d’imiter, et qui affirme de plus en plus son identité.
Mais chaque morceau est une étape cruciale de plus sur la découverte d’un Saint-Graal du pur Heavy Metal, et « Language of the Dead » de nous transpercer de son énergie à la MAIDEN (avec toutefois des saccades plus volontiers Thrash, petit plaisir qu’on déguste), tandis que l’épilogue ambitieux « Grand Gesture of Defiance », rappel des sept années séparant les deux LP, appuie encore sur la sensibilité Doom pour nous laisser en suspens, ébahis de tant de prestance et de talent. ALTAR OF OBLIVION, un nom qui devient une sérieuse référence, et The Seven Spirits, un album qui fera date, et qui confirme que le troisième effort peut-être le meilleur. Jusqu’au suivant en tout cas. Allez, le dernier pendu est cadeau, et c’est un aveu.
H_ _ V_ ME _ _L RU_ _L _S !!!!!
Titres de l'album :
1. Created in the Fires of Holiness
2. No One Left
3. Solemn Messiah
4. Gathering at the Wake
5. The Seven Spirits
6. Language of the Dead
7. Grand Gesture of Defiance
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