ACHERONTAS ou ΑΧΕΡΟΝΤΑΣ ? Les deux votre horreur, puisque le groupe d’Athènes a opté pour un changement de patronyme l’année dernière, sans vraiment dévier de sa trajectoire, bien dessinée depuis l’année 2007. Le groupe fondé par V.P.Sorcerer (WAMPYRINACHT, ex-NIHASA, ex-SEVENTH XUL, ex-STUTTHOF, ex-WORSHIP, SHIBALBA, ex-ACRIMONIOUS, ex-NOCTERNITY, ex-VIRUS OF KOCH, ex-CHAOSBAPHOMET (live), ex-LEGION OF DOOM (live), ex-NIGHTBRINGER (live)) fait donc peau presque neuve, mais nous propose toujours ce Black Metal occulte et impénétrable, incroyablement fertile et mélodique que l’on aime depuis la parution du premier tome Tat Tvam Asi, datant de l’année même de naissance du groupe.

ΑΧΕΡΟΝΤΑΣ via ACHERONTAS n’a jamais été un concept économe et peu disert, ce que ses huit - et maintenant neuf - albums soulignent. Cette créativité a parfois été synonyme de complaisance, et d’une certaine facilité que l’on pardonne aux plus doués, mais ses albums ont toujours contenu leur lot d’idées de génie et autres harmonies mortifères et létales. Et une fois encore, le collectif est allé puiser au fond de sa mystique les éléments nécessaires à la fédération des hordes BM les plus exigeantes.

True sorcery is not an art, it's science... in order to dare, we must know; in order to will, we must dare. We must will to possess empire, and to reign, we must be silent. We are real to those with eyes to see...   

Cette déclaration de V.P.Sorcerer en dit long sur la façon qu’il a de concevoir sa musique. La sorcellerie est donc un art, tout comme la composition, et si ΑΧΕΡΟΝΤΑΣ  n’est visible que par ceux qui ont des yeux pour le voir, il existe surtout pour ceux qui ont des oreilles pour l’écouter. Et à peine deux ans après le dernier pavé Psychic Death - The Shattering of Perceptions, le quintet (outre V.P.Sorcerer à la guitare et au chant, on retrouve les habitués Saevus H. et Indra aux guitares, Hierophant à la basse et Dothur à la batterie) se permet donc une énième folie dévastatrice, à mi-chemin entre le BM symphonique et le BM épique, diabolique, parfois comparé aux œuvres de DISSECTION, ACRIMONIOUS, GEVURAH, MGLA, NIGHTBRINGER ou encore DEVATHORN et autres BATUSHKA. Du beau monde donc, bien que celui d’ΑΧΕΡΟΝΤΑΣ soit trop personnel pour être comparé aussi hâtivement.

The Seven Tongues of ΔΑΗΜΩΝ, selon son concepteur, est une quête de nouveaux horizons, mais surtout, sept pactes passés avec des forces inconnues du monde des hommes, et qui permettent de s’élever au-delà de la mort. Si les arguments promotionnels cernent le concept, et la philosophie, ils ne dévoilent rien quant au contenu artistique de cette musique toujours aussi mystique, reposant sur un instrumental progressif, naviguant entre sonorités Heavy et pulsions Black. Toujours aussi riche et à cheval sur les principes de détail, la musique proposée va de la furie opératique à la lancinance occulte, ce qu’un morceau aussi emphatique que « Belial-The Enn of Beliya’al » souligne de son mid tempo martial et de son riff dissonant rappelant les premières heures du BM norvégien. Entre un MAYHEM revenu du monde des morts et un EMPEROR paradant dans les allées des Hadès, ΑΧΕΡΟΝΤΑΣ se veut aussi grandiloquent qu’abordable, mais ne soyons pas dupe : ces chansons méritent de nombreuses écoutes prolongées pour en appréhender toute la complexité. Inutile dès lors de vous livrer à un recensement des riffs utilisés, trop nombreux pur être listés. Et pourtant, cette richesse ne se noie pas dans une complexité trop roborative, et susceptible d’effrayer les plus sensibles : tout au plus comprend on que le groupe tient à maintenir sa superbe, mais il n’abuse jamais de subterfuges pour parvenir à ses fins. Ainsi, le dédale « Lucifer-Breath of Fire », plus long « pacte » de l’ensemble, combine la fureur des jeunes années à la maturité d’une carrière bien remplie. On est encore une fois hypnotisé par ce chant grave et impérieux, par ces guitares semant les graines de la vermine, et par ces accents démoniaques orchestrés en mode fin du monde.

En quarante minutes, le groupe donne une leçon à la concurrence, en ayant souvent recours à des astuces éprouvées, mais toujours intelligemment placées. Ainsi, l’entame très Heavy de « Satan-Exaltation of Unbeing » accentue le contraste avec le corps de la chanson basé sur une agression permanente de blasts incontrôlables.

Et entre ces dissonances troublantes, ces harangues vocales semblant émerger de la nuit des temps, cette pression rythmique exercée de bout en bout, et ces inserts harmoniques acides, les sens sont stimulés, pour nous exhorter à voir au-delà de notre compréhension. Une autre réalité, moins futile et plus tragique, lourde comme un cercueil d’illusions perdues, mais belle comme un rêve inaccessible (« Hecate-Queen of the Crossroads »).

Narré de voix de maître par un groupe qui domine son sujet depuis longtemps, s’achevant dans un dialogue Ambient étrange, The Seven Tongues of ΔΑΗΜΩΝ est un autre chemin, dur, escarpé, qui permet de transcender sa pensée et lui faire accéder à un niveau de compréhension supérieur. Il est aussi plus simplement un extraordinaire album de Black Metal ambitieux, aux proportions symphoniques, qui mérite toute l’attention que vous pourrez lui porter.

Titres de l’album:

I. Lucifer-Breath of Fire

II. Leviathan-The Fervent Scales In Reverence

III. Belial-The Enn of Beliya’al

IV. Satan-Exaltation of Unbeing

V. Choronzon-Webs of Alienation

VI. Hecate-Queen of the Crossroads

VII. ΔΡΑΚΩΝ -ΑPOTHEOSIS

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