SADUS, au même titre que ses contemporains ATHEIST, CYNIC et DEATH a bénéficié d’une aura particulière dans les nineties, presque christique, tout du moins dans l’esprit des amateurs de technique mise au service d’une violence fatale et létale. Toutefois, de ce quatuor ressortent plus facilement les trois noms déjà cités, et SADUS, malgré une personnalité forte et un niveau stratosphérique n’a jamais vraiment pu se hisser au niveau de la concurrence en termes de rayonnement et d’exposition. Mais les vrais savent à quel point ses trois premiers albums sont des pierres de rosette de l’alchimie Thrash/Death.
Reformé en 2017 après deux ans de hiatus (ou plus selon les biographies), le duo d’Antioch en Californie n’a eu de cesse de planifier son sixième longue-durée, quitte à prendre un temps fou pour lui donner corps. Aujourd’hui, six ans après cette réunion, le groupe peut enfin partager les fruits de son dur labeur avec sa fanbase, qui ne sera certainement pas déçue d’avoir eu à attendre si longtemps.
Jon Allen (batterie) et Darren Travis (guitare/chant), les deux membres originaux ont appris de leurs erreurs et de leurs errances, et ont tourné le dos à cette approche Progressive soft qui les avait guidés dans les années 2000. Exit les synthés et les facilités groovy, et adieu Out for Blood, tentative malhabile de se conformer aux désirs de son époque. Le SADUS 2023 renoue avec ses racines, même si la magie d’antan a cédé la place à un professionnalisme calibré qui ne permet pas d’éviter les facilités ou les redites, malgré le niveau phénoménal de ces dix nouveaux morceaux.
Enregistré avec l’aide de Juan Urteaga (EXODUS, TESTAMENT, MACHINE HEAD) aux Trident Studios, The Shadow Inside est un monstre qui rapproche encore plus le duo de ses concurrents de l‘époque. Toujours aussi habile pour complexifier la violence et pour malmener la technique, SADUS fonce et lit sa partition en diagonale pour bousculer l’auditeur et lui faire perdre ses repères. Et dans le marigot des sorties nostalgiques de ces dix dernières années, avoir des héros qui renouent avec leur passé en niquant au passage la nouvelle génération fait un bien fou et même, rassure.
Alors évidemment, aussi bombastic et cruel soit-il, The Shadow Inside peut difficilement être comparé aux chefs d’œuvre Swallowed in Black ou A Vision of Misery. Il n’en a ni le culot ni la facilité d’exécution, mais il reste une sacrée torgnole Death/Thrash de première bourre, loin des pilotages automatiques de certaines références des années 80. A la manière d’un OPPROBRIUM calé en solfège, SADUS piétine sans arrêt la frontière séparant le Techno-Thrash du Death fin et racé, et nous offre un tracklisting noir comme le jais. Et comme on ne peut faire meilleure impression qu’en décochant un énorme parpaing dans la tronche à peine la porte de vos hôtes ouverte, le duo nous assène en guise de retrouvailles un « First Blood » à faire passer Rambo pour un chef scout au totem ridicule.
En moins de sept minutes, SADUS nous fait comprendre à quel point il nous a manqué dans sa configuration historique. Intro mélodique et sobre, riff qui s’impose sur fond de toms malmenés avec classe, embardée sans ceinture de sécurité, les réflexes du passé sont toujours là, et toujours aussi efficaces. On se laisse glisser le long de la pente de la complexité instrumentale, coincé entre deux artisans de la douleur auditive qui connaissent bien le marché pour l’avoir alimenté durant de longues années.
Jon et Darren n’ont donc rien perdu de leur clairvoyance, et alignent les figures de style comme à la parade d’un Death/Thrash toujours pas apaisé depuis son émergence. On pense évidemment à l’ATHEIST le plus féroce, celui de Piece of Time et Unquestionable Presence, mais on se remémore aussi les exactions de ce combo californien plus hargneux que ses petits camarades, et le jeu de basse de Steve DiGiorgio qui fait parfois cruellement défaut sur ce sixième album. Mais son absence n’est pas le seul handicap d’un disque qui cède parfois aux facilités d’usage, en répercutant des plans d’un titre à l’autre sans les modifier suffisamment.
Ainsi, « No Peace » semble s’ingénier à reproduire tous les arguments antérieurs en y ajoutant un souffle mélodique insuffisant, et bride ainsi sa vélocité et son agressivité en refusant de s’aventurer hors des routes battues.
Cette réflexion vaut pour quelques morceaux, plus faciles que la moyenne (et considérant le long processus de création dont le groupe a usé depuis sa reformation, privilégiant la spontanéité et la liberté au travail forcé), et qui tirent The Shadow Inside vers une moyenne haute, l’empêchant de fait de décoller vers des cimes qu’il aurait pu défier.
Mais ne soyons pas trop dur, puisque ce disque survole la quasi-totalité de la production Thrash/Death old-school de ces cinq ou six dernières années. Toujours maîtres dans l’art de l’alambiqué torturé, les deux hommes lâchent tout, mais savent aussi construire une évolution passionnante et vénéneuse, à l’image de « The Devil In Me », qui même exorcisé de sa formidable partie de batterie restera toujours un vilain démon aux mains agiles.
Et si la voix de Darren n’est plus aussi vicieuse et fielleuse qu’avant, elle reste un médium de communication intraitable, qualité qu’elle partage avec Kelly Shaefer, entre autres points plus que communs.
En tant que fan vous aurez le plaisir de retrouver un groupe unique, qui n’a pas perdu grand-chose de son savoir-faire. Un groupe réduit à la portion congrue, mais qui sait toujours y faire en sur-mesure, via de petites merveilles de haine comme « Ride The Knife » ou le bien-nommé « Anarchy ». Quant à « The Shadow Inside », title-track et final orgiaque, il nous laisse sur un sentiment de satisfaction et de travail accompli, Darren et Jon pouvant se frotter les mains de leur collaboration renouvelée et remise sur les bons rails.
SADUS, comme tant d’autres héros de l’époque, se contente souvent d’un habile fan-service, mais remplit ses obligations, à l’image d’OBITUARY ou AUTOPSY. Les gardiens de la flamme sont bien vivants, et comptent bien jouer encore un rôle sur la scène extrême. Un rôle de premier plan s’entend, on ne colle pas les mythes en première partie, et on ne les laisse pas dans le placard se faire bouffer par les…mites.
Titres de l’album:
01. First Blood
02. Scorched And Burnt
03. It’s The Sickness
04. Ride The Knife
05. Anarchy
06. The Devil In Me
07. Pain
08. No Peace
09. New Beginnings
10. The Shadow Inside
Ils furent des second couteaux. Désormais ils ne sont simplement rien.
Leur musique perd beaucoup de son intérêt sans la griffe de Digiorgio !
Tourista, bien vu :-) Moi je dirais que c'est une décision avisée cela dit, d'autant plus que musicalement, et ça me coûte de le dire, étant un ENORME fan de Venom, mais du Vrai Venom ( Cronos, Mantas, Abaddon), Venom Inc ne propose pas grand chose d&ap(...)
03/12/2024, 13:55
Bravo pour remettre en lumière un groupe à part et spécialement la partie la plus ancienne de l'histoire de Stille Volk, largement méconnue (j'ai appris des choses). C'est en partie à cause du faible nombre d'interviews qu'ils ont pu fai(...)
02/12/2024, 20:13
"Le metalleux ne se fait pas au sans-gêne si fréquent partout ailleurs des papotages interminables aux premiers rangs"Tu m'étonnes John !!!C'est non seulement insupportable pour le public attentif, mais c'est surtout un manque de respect (...)
02/12/2024, 09:14
Ouch ! Fini de tout lire...Je connaissais déjà quasi tout ce qui est cité ici, mais c'est toujours un plaisir de se remettre dedans boudiou !Perso, j'adore les trois biopics cités précédemment. Certes, ils ont chacun leurs lot de f(...)
30/11/2024, 08:58
Et y'a même un "à suivre" The pick of destiny et Spinal Tap seront sûrement de la(...)
27/11/2024, 09:15
8 lettres: KHOLOSPVÇa veut dire "coloscopie" en langage mec bourré en fin de soirée.
26/11/2024, 18:14
Je ne suis pas au courant.. il s'est passé quelque chose récemment avec le groupe Al Namrood?
26/11/2024, 14:44