Voilà un retour que nous attendions tous avec impatience. Un peu moins de trois ans pour les italiens de MESSA qui remettent le couvert après le monumental Close, que j’avais encensé en ces colonnes. Et à juste titre. Les résidents de Padoue, sous couvert d’un formalisme Doom et Heavy classique avaient alors brodé des thèmes plus expérimentaux, pour finalement dénaturer leur style d’origine. Le constat était sans appel, et tenait plus du Post Punk traité façon Metal, sans concessions, sans facilité, et avec un panache incroyable. Il convenait donc d’attendre pour revenir avec le répertoire idoine, et alors que Metal Blade m’a relancé ce matin pour traiter du cas de ce nouveau chapitre, The Spin s’impose déjà comme la nouveauté maousse de ce mois d’avril.
The Spin tourne, mais pas en rond. Le quatuor transalpin (Mistyr - batterie, Alberto - guitare, Mark Sade - guitare/basse et Sara - chant) a su sublimer son inspiration pour éviter de se répéter bêtement et de nous larguer une bombe sans réelle puissance. Ces sept titres inédits s’inscrivent donc dans une continuité rassurante, avec toujours en exergue cette volonté de repousser les barrières, quitte à s’éloigner du monde Metal sans craindre une réaction épidermique de rejet. La voix incroyable de Sara, assez proche de celle d’Anneke transcende toujours cette bande instrumentale ouverte, qui pioche dans la Post-Wave, le Rock alternatif et subtilement gothique et le Heavy le plus doomy, sans s’imposer par la force. La frontwoman est toujours aussi versatile et expressive, et ses comparses inventifs en diable.
Et si MESSA risque de s’aliéner une partie de sa fanbase, c’est pour mieux attirer dans ses filets aux mailles fines un nouveau public séduit par cette Cold-Wave électrique qui rappelle un peu la transition entre SOUTHERN DEATH CULT et THE CULT.
Loin des CULT OF LUNA ou de la scène Doom italienne classique, ce quatrième album se veut plus allusif à son passé que réellement versé dans l’autocitation. Il faut attendre la deuxième partie du majestueux et ample « At Races » pour retrouver l’essence des débuts, lorsque la lourdeur était encore la composante majeure d’un mélange déjà hétéroclite.
Le son prend aux tripes, les mélodies amères caressent la nostalgie, et les ambitions artistiques respectent le cahier des charges seventies, lorsque la scène italienne se voulait l’une des plus originales du monde. Dans un esprit THE GATHERING noyé dans la brume de Padoue, MESSA ne renonce pas à ses étirements matinaux, mais donne une impulsion nouvelle aux exercices, en éclaircissant les guitares et en louchant vers les années 80.
La filiation The Spin/Close crève donc les yeux. Avec ce synthé qui se la joue B.O eighties plus vraie que nature, ces allusions GOBLIN écrasées par deux guitares en rogne, et cette ambiance globale de nuit plus longue que vos jours, MESSA se dessine des paysages sombres, aux silhouettes inquiétantes, tout en acceptant de danser sur la tombe du purisme. Certes, le quatuor est aujourd’hui plus Rock que Doom, mais dans une époque où règne le crossover le plus ultime entre Metal et Pop (GHOST, ROYAL REPUBLIC, NIGHT FLIGHT ORCHESTRA), cet entre-deux fait un bien fou de ses élans gothiques et pragmatiques à la fois.
« Fire on the Roof » sert de point final à la reprise de contact, et en à peine trois morceaux, notre cœur chavire déjà. Ce triptyque d’entrée est l’un des plus solides de ce premier trimestre 2025, et fait honneur à un pays qui a depuis longtemps refusé le statisme au risque de se vautrer dans les grandes largeurs. Découpé en deux séquences distinctes par le ton et la durée, The Spin est un vinyle ancien d’occasion qui revient à la vie joué sur du matériel moderne et performant. Aussi intime qu’il n’est imposant, aussi fragile qu’il n’est impressionnant, ce disque est une perle qui permet à Sara de faire montre de ses capacités sur le cristallin « Immolation ». Ce morceau est d’ailleurs l’un des hauts faits d’un album hors du commun, avec sa partie centrale qui explose comme une épiphanie au carnaval de Venise. Les masques tombent, et MESSA ôte le sien.
Mais en dessous, un autre masque est figé. Deux visages pour une identité encore mystérieuse, c’est l’apanage des déguisements les plus élaborés.
Et lorsque « The Dress » lâche ses premières mesures, le doute s’immisce dans l’esprit : serait-ce le meilleur album des italiens ? Peut-être, et en tout cas, un solide cadet pour Close qui avait déjà bien secoué les cervelles.
Sara enfile sa robe de soirée, se laisse porter par deux guitares en état de grâce, et dévoile une séduction irrésistible, enter aveu champagne et confession de campagne. Rarement le groupe aura été aussi en phase avec son temps, refusant le cloisonnement d’un Doom Rock trop restrictif, pour mieux s’épanouir d’un Metal légèrement extrême, mais toujours très abordable, malgré son sens de l’innovation.
Le bal affiche donc complet, les convives triés sur le volet, et à même de saisir la quintessence du propos sans poser de questions. Il y en aurait pourtant, notamment sur la présence de cette guitare steel sur « Reveal », qui anticipe un mid tempo nerveux et des strates vocales en volutes. Sur la fausse simplicité d’un disque vraiment complexe, mais qui s’échine à le cacher. Ces irritations soudaines qui contrebalancent un chant pur et éthéré. Enfin, sur tous ces détails qui font de cet album un trésor donc on dévoile le plan en gommant le gros « X » trop révélateur.
Direct mais alambiqué, dense mais aéré, The Spin tourne et tourne encore comme une valse éternelle. On se laisse prendre au jeu de cette ouverture d’esprit de plus en plus prononcée, et « Thicker Blood » d’incarner cette grandiloquence pourtant intime qui classe les MESSA dans le camp des grands solitaires.
Gigantesque mais à l’échelle humaine, plein mais stratifié, aussi sincère que pensé, ce disque est une pure merveille qui relie les pointillés entre ELEND et KING WOMAN. Une suite qui laisse présager d’allers et de retours à la manière d’un PARADISE LOST des nineties, ou d’un THE GATHERING avant l’opération Electro. La messe est dite, la quête peut commencer. Montrez-vous généreux, la corbeille doit refléter le plaisir procuré par une cérémonie hors norme.
Titres de l’album:
01. Void Meridian
02. At Races
03. Fire on the Roof
04. Immolation
05. The Dress
06. Reveal
07. Thicker Blood
Un report ? Je crois que j’y reviendrai l’an prochain mais deux jours afin de mieux profiter. J’en connais qui ont du moins apprécier le camping avec l’orage du dernier soir
16/05/2025, 06:52
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11