Rogga Johansson, c’est un peu le Paul Speckmann du Death suédois des années 90/2000. Toujours dans les bons coups les plus caverneux, le chanteur/guitariste est ce qu’on pourrait appeler un surboulimique de travail qui ne supporte pas de rester inactif plus de dix secondes, le temps d’ouvrir une bière. Jugez du peu en constatant son parcours sur le site Encyclopaedia Metallum, et souriez à la lecture de tous les projets qu’il a mis sur pied/contribué à. La liste est longue et recense sans ordre particulier DEAD SUN, DOWN AMONG THE DEAD MEN, ECHELON, EYE OF PURGATORY, GRISLY, HUMANITY DELETE, JOHANSSON & SPECKMANN, LOBOTOMY DEPT, MEGASCAVENGER, NECROGOD, PERMADEATH, PILE OF SKULLS, PUTREVORE, REVOLTING, RIBSPREADER, ROGGA JOHANSSON, SEVERED LIMBS, STASS, SVITJOD, THE CLEANER AND MR. FILTH'S VAN MURDERS, THE GROTESQUERY, THOSE WHO BRING THE TORTURE, TO DESCEND, pour ceux étant toujours actifs, et je vous ferai grâce des autres qu’il a abandonnés en cours de route ou qui ont mis un terme à leur existence. On reste admiratif face à tant d’implication à la cause extrême, ce qui achève de faire du personnage un pilier de la scène scandinave, et peut-être l’un de ses acteurs les plus fondamentaux. Mais on le sait, le concept le plus cher au cœur du grogneur/gratteur reste sa créature PAGANIZER, fondée en 1998, qui est en quelque sorte l’incarnation de son appétit de violence. Avec onze albums studio à son actif, le monstre est une légende de la scène suédoise Death Metal pur jus, qui n’a jamais vraiment dévié de sa trajectoire nostalgique, et qui continue aujourd’hui de propager le bon vomi d’un Metal de tradition qui reste collé entre les dents après la mort.
Toujours supporté par les indiens maso de Transcending Obscurity Records, PAGANIZER célèbre avec The Tower of the Morbid son deuxième album avec la même formation, ce qui n’est pas une simple anecdote. Car en effet, les musiciens ont défilé tout au long de ces années, faisant du groupe une sorte d’auberge suédoise dans laquelle tous les tarés étaient les bienvenus, pourvu qu’ils partagent le point de vue et qu’ils sachent jouer le style comme si rien n’avait fait suite au Left Hand Path d’ENTOMBED. Après PAGANIZER le déluge donc, et ce The Tower of the Morbid ne fait que pérenniser le travail de sape entrepris à l’agonie des nineties. Dans les faits, cette nouvelle étape n’est qu’un chapitre de plus s’insérant parfaitement à la suite de Land of Weeping Souls publié il y a deux ans, et qui n’était lui-même que la poupée gigogne cachée à l’intérieur de World Lobotomy. Car chaque LP du groupe n’est qu’une pierre de plus à ajouter à la sépulture du Metal de compromission, ce Metal que Rogga conchie de tous ses poils et qu’il pourfend à grands coups de riffs cruels et glaciaux. Epitomé de la Hm-2, parangon d’un Death Metal suédois aussi froid qu’un cadavre de chat sur une nationale en hiver, The Tower of the Morbid est morbide en effet, et s’ingénie à retrouver l’absence d’humanité de groupes aussi référentiels que GRAVE, DISMEMBER, ENTOMBED, UNLEASHED, ASPHYX, BOLT THROWER, sans chercher à modifier quoi que ce soir à la recette de la salsa post-mortem. Ce qu’on aime chez le quatuor (Rogga Johansson - chant/guitare, Matthias Flebig - batterie, Martin Klasén - basse et Kjetil Lynghaug - guitare), c’est cette volonté de rester traditionnel sans prendre les fans pour des cons et leur balancer des resucées à peine retravaillées. Car en matière de puissance, personne n’a rien à apprendre au grognon Johansson, toujours aussi capable lorsqu’il s’agit de trousser des ambiances fétides en mid tempo qui font dégueuler les oreilles. Qui d’autre que lui est encore capable de composer un hymne aussi catchy que fielleux de la trempe de « Redemptionless », qui file une crise de priapisme auditif tout en laissant le cerveau en purée de pois pour zombie en goguette ? Personne, et certainement pas une reformation opportuniste de CARCASS…
Le leitmotiv est simple, le rester. Inutile de se compliquer la vie même si chacun des instrumentistes a le pedigree pour donner une leçon de technique à ses congénères. Ici, c’est l’efficacité qui prime, qu’elle soit lourde et emphatique, médium et transcendantale, ou à la vitesse excessive et primale. Après tout, on ne balance pas la purée sans avoir été présenté avec « Flesh Tornado », quand on s’embarrasse de manières, et de toute façon, PAGANIZER n’a plus besoin d’être introduit depuis longtemps. Il se glisse free dans le moindre orifice, et nous pénètre les neurones encore actifs avec ses rythmiques atomiques et ses blasts démoniaques, nous laissant les pavillons encore maculés de gravité, sans s’excuser ou fournir un peu de Sopalin. On n’est pas là pour jouer aux devinettes ni pour apprendre l’étiquette en haute société, mais bien pour se manger du bourrin à satiété, dont acte. A peu près aussi fin et novateur qu’un nouvel album de MASTER, aussi gai et enjoué qu’une vilaine démo de GRAVE, The Tower of the Morbid n’est qu’une succession de branlées en mode majeur, mais une branlée organisée, agencée, et prévue dans le moindre détail. Et entre une basse qui profite du moindre interstice pour nous éclabousser la tronche de sa distorsion, une paire de guitares qui tronçonnent toute forêt à l’horizon, et un chant qui se veut hommage aux remugles et autres éructations, on prend son pied à l’unisson, au son glauque et ENTOMBED de « Apocalypse Writings », ou à l’évocation de la mort en tant que fin en soi sur « Cannibal Remains », bande-son idéale des films de Ruggero Deodato. Et les morceaux passent, la joie de vivre trépasse, sans que l’on ne sente l’inspiration faiblir, ce qui laisse admiratif au vu de la productivité du groupe. Jamais à court d’un riff mémorisable, Rogga enfonce le clou encore un peu plus profondément dans le cercueil de la compromission, et nous éclate le crâne d’hymnes à la débauche de la trempe de « They Came to Die », à la mélodie sournoise, toujours aussi amateur d’un autre côté d’attaques éclair ne laissant aucune chance aux cervicales (« Rot Spreads »).
Et nous aurons toujours besoin de mecs comme lui pour ne pas oublier que le Death se doit d’être simple, efficace, mais pas putassier. Certes, ce nouveau tome des histoires du boucher nécrophile n’apporte pas grand-chose à la légende globale, mais la qualité des titres, la profondeur de la production, les détails de l’artwork sont autant d’indices quant au caractère indispensable de PAGANIZER. En moins de quarante minutes, l’infatigable psychotique donne une leçon de non savoir-vivre à l’usage des suiveurs nostalgiques, et signe avec The Tower of the Morbid un manifeste d’allégeance que vous auriez plutôt intérêt à prendre au pied de la lettre. Sous peine de vous en prendre un bon dans le cul.
Titres de l’album :
01. Flesh Tornado
02. Apocalypse Writings
03. Cannibal Remains
04. Drowning in Sand
05. Redemptionless
06. They Came to Die
07. Rot Spreads
08. Beneath the Gauze
09. The Tower of the Morbid
10. Purge the World
11. Demented Machines
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