Dire qu’en Ukraine, c’est pas la joie est un euphémisme lénifiant. La guerre opposant l’armée nationale aux forces russes de Poutine fait toujours rage, et de plus en plus de victimes. A la manière d’un Staline qui ne s’embarrassait pas de principes pour se servir dans la soupière, ce bon vieux Vladimir s’adjuge le droit et les pouvoirs, et décide comme bon lui semble de s’emparer de territoires indépendants qu’il juge soumis à sa propre autorité. Mais comme d’habitude, ce sont les civils qui en prennent le plus dans la poire, et les scènes de massacres, d’exode, de fouilles dans les décombres se succèdent à un rythme effréné dans les médias…
Une telle situation mortifère exige donc une bande-son à la hauteur de son atrocité. On ne peut décemment pas traiter ce conflit comme du tout-venant, au moment même où la Palestine subit le même sort dans l’indifférence quasi-générale. Alors, il fallait compter sur un groupe local pour nous donner le la, et ce même la 440 est aujourd’hui transformé en mi grave, sous l’impulsion d’un trio pas comme les autres.
De Kiev, la colère résonne et la mort rode. Un trio différent s’avance sans prudence sur le champ de bataille pour nous raconter ses légendes et autres contes du folklore local, sur fond de tempête musicale vociférant et se montrant intransigeante. THEY CAME FROM VISIONS est déjà connu pour avoir publié un premier longue-durée en 2020. Cloak of Darkness, Dagger of Night avait lancé les hostilités, et permis au trio de se faire remarquer hors de ses frontières, eu égard à une approche personnelle, aussi brutale que mélodique, et aussi classique que culotée. Quatre ans plus tard, et un conflit dans les pattes, les trois musiciens énigmatiques reviennent pour chanter le désespoir et la colère, nous délivrant un message qui semble clair et sans équivoque.
La violence est une composante importante de la vie, et il convient de l’accepter pour ne pas se faire mutiler méchamment par le destin.
Trois anonymes affublés de pseudos de circonstance (Voice of the Deep – basse, Voice of Gloom – guitare/batterie et Voice of Misery – chant), pour un Black Metal étrange, hypnotique, pénétrant, progressif mais éminemment cruel. A la manière d’un TERRA TENEBROSA encapuchonné et ayant glissé sur la pente du Metal noir, THEY CAME FROM VISIONS tente le coup du traditionalisme adapté à des intérêts plus personnels, capitalisant sur une crédibilité d’époque pour mieux faire passer la pilule du modernisme.
La principale qualité de cet album est justement de rester entre les balises du chaos, tout en offrant des thèmes accrocheurs et des harmonies cycliques. Avec un nombre de breaks conséquent, des dérives occultes fascinantes, et des agencements ambitieux, The Twilight Robes nous propose une cérémonie folklorique à la Midsommar, sans les fleurs, et plus nocturne que diurne. Constamment partagé entre les ténèbres et la lumière, le trio ukrainien se pose en jonction des travaux d’EMPEROR, VEHEMENCE et SVRM, et trace sa route à travers les chemins de son pays, pour ajouter au nihilisme global, un côté gnostique mélodique hérité de la tradition religieuse de l’Ukraine.
Il est donc tout à fait raisonnable de s’abandonner à l’écoute d’un disque riche, plein, intelligent, nostalgique et déchirant. On peut presque entendre les pleurs et les cris de terreur de la population civile sur l’implacable « Burning Eyes, Blackened Claws », qui utilise une harmonie glacée pour souligner son propos, accélérant régulièrement le rythme sans sacrifier la souplesse à la raideur.
Hivernal, printanier, automnal, The Twilight Robes évolue selon les saisons, et se meut comme une nature qui meurt puis se renouvelle. La facilité avec laquelle le trio parvient à dessiner des motifs mémorisables sans réduire ses exigences est tout bonnement incroyable, et si les riffs se transforment et mutent selon les émotions recherchées, l’ensemble tient debout comme une histoire complète, qu’on se transmet comme une légende ancienne de génération en génération.
« The Blissful Defeat » et sa monotonie répétitive ressemble à ces petits matins calmes qui précèdent le déluge de bombes et de balles qui sifflent, et peint un tableau de l’Ukraine pessimiste mais réaliste. Jamais la brutalité n’est laissée libre, les musiciens la tenant fermement par la bride pour la contrôler, et si elle explose à intervalles réguliers, elle est toujours nuancée par une guitare bavarde, mais au discours ferme.
Très ambitieux sans être prétentieux, solide mais ouvert, perméable mais attaché aux racines, The Twilight Robes est une cérémonie de niche, entre initiés, qui comprennent les mots, les maux et les enjeux. Des enjeux qui nécessitent une énergie permanente (« Petrified Immortality », superbe de diversité et de recyclage des idées Viking/Folk à la BATHORY des drakkars), et un investissement total, les armes chargées, et la contre-attaque vicieuse mais efficace (« The Sign of Damnation » et son énorme basse saturée qui fait trembler la colonne vertébrale).
Puriste sans l’être, expérimental mais accessible, THEY CAME FROM VISIONS s’arroge le droit de modifier les codes d’un style qui n’aime rien tant qu’être malmené. Le Black Metal vu et joué par les ukrainiens est sauvage, mystique, mais surtout, passionnant et déroutant. Un nombre de plans hallucinants, mais jamais gratuitement. Une façon de manier le rythme avec panache, pour parfois oser une avancée plus guillerette, sans jamais se départir de cette noirceur aveuglante.
La nuit, le danger ne dort pas, mais reste tapi dans l’ombre. Pour mieux exploser au premier rayon de soleil, et plonger une population dans l’absurdité d’une horreur sans fin. THEY CAME FROM VISIONS raconte mieux que quiconque la solitude des sacrifiés, et rend hommage à leur mémoire en quelques vers d’une litanie funèbre qui irradie le ciel comme des explosions.
Titres de l'album :
01. Lughnasadh
02. Equinox Ablaze
03. Burning Eyes, Blackened Claws
04. The Blissful Defeat
05. Petrified Immortality
06. The Sign of Damnation
07. Twilight Robes
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