Hard Rock old-school, Metal old-school, Power Metal old-school, Deathcore, Thrash old-school, Death old-school, Deathcore, Blackened Thrash old-school…C’est ainsi que déroulent les nouveautés dans mon classeur, et autant dire que deux fois sur trois, je me retrouve à chroniquer l’album de nostalgiques qui refusent la vision d’un Metal contemporain. Le tout n’est pas forcément désagréable pour un quinquagénaire comme moi, et qui a grandi au son des influences de tous ces groupes portés sur un passé qu’ils ne souhaitent pas révolu. Mais l’un dans l’autre, tout ceci ne serait-il pas la partie immergée de l’iceberg cachant une partie encore plus immergée et plus intéressante ? Le débat est d’importance, et cache une question existentielle : plaisir facile, ou travail de fond complexe pour essayer de dessiner les contours d’une époque ? Car en fait, je serais bien à mal de dire quel courant domine le marché actuellement, en termes d’approche artistique, n’écoutant quasiment que des albums qui auraient pu être enregistrés dans les années 80…Cette décennie n’en finit plus de faire des victimes dans les rangs des musiciens du vingt-et-unième siècle, persuadés que le plus important a été dit entre 1980 et 1984, à l’image des américains de LADY BEAST, qui publient aujourd’hui leur quatrième longue-durée. Dans le fond, la forme et le packaging, rien ne distingue les originaires de Pittsburgh, Pennsylvanie de tous leurs homologues passéistes et fans de riffs immédiats. La preuve, puisque les sites spécialisés n’hésitent pas à les comparer à KOBRA AND THE LOTUS, SATAN’S HALLOW, WARLOCK, HUNTRESS, KRAMP, UNLEASH THE ARCHERS ou IRON MAIDEN évidemment, et autant dire que toutes ces comparaisons sont fondées. Et depuis leur création en 2009, les américains n’ont eu de cesse de mettre en place un programme de voyage dans le temps, appuyant chacune de leurs interventions d’une conviction sans failles.
Composé de cinq musiciens (Deborah Levine - chant, Andy Ramage - guitare lead, Chris Tritschler - guitare rythmique, Greg Colaizzi - basse et Adam Ramage - batterie), LADY BEAST est l’archétype de groupe qui synthétise les courants en vogue au début et milieu des eighties, avec une passion indéfectible pour le Heavy Metal de la NWOBHM, qui lui-même se sevrait de Rock des années 70. Après trois longue-durée publiés depuis 2012 (Lady Beast, Lady Beast II, Vicious Breed), plus une compilation sortie l’année dernière et se concentrant sur leurs jeunes années (The Early Collection), le quintet passe donc à la vitesse supérieure, migrant des rangs de Cruz del Sur à ceux de Reaper Metal Productions, un label bien de chez eux, sans vraiment changer leur guitare de flight-case. On retrouve sur ce nouveau chapitre tout ce qui a toujours fait le charme du groupe et de sa musique, ces structures simples et ces refrains collégiaux, cette agressivité de tous les instants ne se démentant jamais, mais aussi cet art pour transcender des motifs classiques et les sublimer d’une touche personnelle. Oscillant toujours entre Power/Speed et Metal plus traditionnel, The Vulture's Amulet poursuit donc les travaux antérieurs en appuyant sur le perfectionnisme, chaque morceau étant un cas d’école à lui seul. Avec Deborah au chant, on pense évidemment à WARLOCK, à HELLION, mais dans les envolées les plus mélodiques, le spectre de THIN LIZZY arrive à passer ses chaînes dans les interstices pour aérer le tout. Convaincant sur des tempi rapides, les musiciens le sont encore plus sur des rythmiques médiums à l’atmosphère plombée, et il n’est guère étonnant de constater que les morceaux les plus volontairement Heavy sont les meilleurs de leur répertoire.
Une certaine vision de l’Amérique des années 80, celles des clubs de New-York et de Los Angeles, lorsque la scène Metal nationale se faisait les dents sur un répertoire puissant et bien méchant. La doublette « Sacrifice To The Unseen »/« Betrayer » est à ce titre un modèle du genre, avec ses attaques franches, son ambiance pesante et plus sombre, et ses assouplissements harmoniques qui permettent à LADY BEAST de proposer un Metal séduisant pour les fans de JUDAS PRIEST et SAVAGE GRACE, évitant les pièges de la redondance grasse allemande que les WARLOCK n’ont pas toujours su accommoder. Et avec un aveu de la trempe de « Metal Machine » en ouverture, pas de doute à avoir : le groupe ne trahira jamais la cause. Mais avec quatre albums dans la besace et une propension à se rapprocher toujours plus des origines, il n’y avait pas de crainte à avoir, et ce Metal mordant et speedé de nous mettre à genoux, les poings dressés, s’agitant aux syncopes d’un riff formaliste mais terriblement efficace. On aime cette hargne qui ne se dément pas, mais on adore aussi la voix d’une chanteuse qui ne se contente pas de brailler et qui pose des lignes vocales dignes de ce nom. Digne héritière de Leather Leone, Dawn Crosby, Doro Pesch et Ann Boleyn, Deborah Levine profite des riffs tricotés par ses deux guitaristes pour imposer une harangue crédible et convaincante. D’ailleurs, le travail accompli par la paire Andy Ramage/Chris Tritschler est exemplaire dans les faits, les deux hommes n’hésitant pas à recopier les plans retranscrits dans le manuel du parfait petit guitariste des eighties de quoi remplir leurs propres partitions. Ce qui nous donne du coupant syncopé (« Runes Of Rust »), ou du boosté gonflé aux entournures (« The Gift », avec une basse bien roulante et grondante de Greg Colaizzi), et surtout, une variété dans la pureté qui fait souvent défaut aux groupes du cru.
On ne s’ennuie jamais à l’écoute de The Vulture's Amulet, pas plus qu’on ne s’ennuyait en écoutant les groupes de l’époque. En retenant le meilleur et le plus symptomatique des combos héroïques (« The Champion », plus MAIDEN que des larmes de Paul Di'anno en 1983), en accélérant le tempo à intervalles réguliers (« Transcend The Blade »), en s’appuyant sur la précision germanique en matière de Heavy/Hard Rock (« The Vulture's Amulet »), LADY BEAST ne tire son inspiration que des plus grands, et signe un excellent album, certes de facture classique pour un effort old-school, mais dont les chansons en sont vraiment, et pas de simples et vulgaires accumulations de gimmicks. Je vous laisse juge de cette énième crise de nostalgie, mais dans les faits, ce groupe éminemment sympathique représente clairement le haut du panier du mouvement old-school, ne serait-ce que pour son application dans la composition.
Titres de l’album :
01. Metal Machine
02. Runes Of Rust
03. The Gift
04. Sacrifice To The Unseen
05. Betrayer
06. The Champion
07. Transcend The Blade
08. The Vulture's Amulet
09. Vow Of The Valkyrie
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