Lorsqu’on souhaite exprimer un point de vue musical nihiliste et misanthrope, on peut opter pour un Black Metal sombre et compact.
Lorsqu’on souhaite titiller les sens par des itérations et des répétitions robotiques crispantes, on opte pour l’Industriel. Et lorsqu’un grain de folie vient vous titiller les neurones, on opte pour le Grind, certainement le plus débridé des trois.
Chaque style est symptomatique d’une démarche, d’un état d’esprit, qui en dit beaucoup plus que bien des discours sur la personnalité de ses auteurs.
Mais que se passe-il si un groupe décide de réunir ces trois issues en une même porte fermée ? Sont-ils fous ? Misanthropes, atteints de TOC et secoués de crises d’épilepsie passagères, combinaison qui les rend incurables et incontrôlables ?
C’est la question légitime qu’on peut se poser au sujet des stades terminaux d’ANAAL NATHRAKH, et c’est la question qui reste sans réponse depuis 2001, et la sortie de leur premier LP, The Codex Necro. Qui sont-ils vraiment ?
Autre chose. Et considérerez le débat comme clos.
Ils se décrivent eux-mêmes comme un Armageddon, une sorte d’apocalypse musicale en forme d’épiphanie de fin du monde. Et si tous leurs albums ont franchi un cap dans l’illustration de cette impasse, certains ont indiqué que quelques changements s’opéraient, dans l’ombre, en douce.
Desideratum avait déçu les fans les plus Hardcore. Trop « ouvert », trop de « respirations », baisse de l’intensité dans la brutalité, en gros, une étape qui sentait mauvais la reprise de souffle pour un duo qui n’en a jamais manqué, mais qui nous a fait suffoquer.
Mick et David tentaient l’approche de biais, et si artistiquement, le pari était réussi, on espérait sans le dire que le prochain chapitre serait le bon.
Celui qui mettrait tout le monde d’accord, et à genoux.
Car écouter ANAAL NATHRAKH, c’est un peu comme être asthmatique, et jouer avec des allumettes près d’une décharge de produits toxiques dont chaque fut est percé. Un risqué permanent, une inconscience avouée, un suicide programmé qui surprend à chaque instant. Et sous cet aspect-là, quel que soit son degré de qualité, The Whole Of The Law respecte les non-règles établies à la fin des années 90, à savoir que tout est possible, et surtout le pire. Dans le meilleur évidemment. Meilleur, seul le temps nous dira si ce neuvième album l’est par rapport aux précédents, mais il est sûr que nombre de fans seront encore déçus. Ce qui est toujours une problématique dans le cas de groupes aussi extrêmes… « Musicalement » parlant, cette nouvelle production chez Metal Blade respecte les us et coutumes du duo de Birmingham. Beaucoup de violence, beaucoup de stridences, beaucoup de cris, de hurlements, d’accélérations foudroyantes, de pesanteurs lancinantes, et surtout, un ballet enivrant de plans qui s’entremêlent dans un chaos organisé et qui finit par vous coller une céphalée carabinée, doublée d’une altération des sens.
Même si la mélodie parvient à se tailler un petit bout d’espace, comme sur le séduisant « Hold Your Children Close and Pray for Oblivion », ou sur certaines interventions de guitare de « We Will Fucking Kill You », le malaise est palpable, le chaos fatal, et l’issue inévitable. Le bruit, la fureur, la colère, et une certaine forme d’avant-gardisme, comme sur chaque occurrence.
Mais on ne vient pas de Birmingham pour faire de la musique sans avoir quelques troubles psychiques et être en avance sur son temps…
Production massive et irrespirable, riffs sombres et répétitifs, brutal déluge de blasts pour un savant cocktail de Crust teinté de Black qui joue le Grind comme si la fin du monde était une course qu’il fallait à tout prix perdre. Pas une seconde de répit, là n’est pas le crédo du duo, alors on court, tout en sachant qu’au final, on crèvera tous heureux. C’est en tout cas ce qu’essaie de nous dire « So We Can Die Happy », qui lui aussi laisse filtrer un genre d’harmonie exsangue au travers de persiennes BM et Indus.
La trademark d’un groupe décidemment à part ?
Absolument. Après tout, qui ose juxtaposer des soli à la Trey Azagthoth et des structures à la BERZERKER/BILE ? ANAAL NATHRAKH, bonne réponse.
Le schema est simple d’apparence, et se retrouve d’effort en effort. Des rythmiques mi robotiques, mi analogiques, des changements de tempo abrupts et terrifiants, et une dualité vocale aussi Black que Néo qu’Indus, que Thrash ou Hardcore. L’auberge Anglaise accueille toujours tous les éléments laissés pour compte et les intègre à une farandole qui donne le vertige. On imbrique des idées, on les étouffe dans l’œuf, et on construit un ballet de l’extrême que seules les victimes de la danse de Saint Guy peuvent suivre.
Et je vous assure qu’en tombant sur des apnées bruitistes comme « In Flagrante Delicto », vous trouverez l’endurance un peu trop sollicitée. Arrangements ignobles et typiques d’un bébé qui hurle dans la nuit, collision entre la grandiloquence d’EMPEROR et le radicalisme des ATARI TEENAGE RIOT, passages mélodiques incongrus typiques de l’école Néo Death nordique…Un gros foutoir organisé, un énorme bordel rangé. Comme des étagères qui abriterait des ouvrages aussi disparates que complémentaires, telles les œuvres de Lautréamont, Dante, Leary, Kerouac et Sade.
Imaginez un peu le coin lecture. Il ressemblerait trait pour trait à ce The Whole Of The Law.
En bons sadiques qui savent pertinemment ce qu’ils font, Mick et David ont laissé traîner en fin de disque leurs exactions les plus étirées, histoire d’user un peu plus notre résistance au moment même où elle atteint son point le plus faible. Alors ils jettent en pâture des longueurs de plus de cinq minutes, comme « On Being a Slave », qui une fois de plus souffle le chaud et le brûlant avec son mélange de fulgurances bruitistes et de nappes vocales séduisantes, sur fond de riffs rythmiques d’apocalypse.
« Of Horror, and the Black Shawls » est peut-être encore plus malsain dans son agencement opératique, et dissèque l’harmonie pour la décharner et l’intégrer à une structure Crust/BM symphonique assourdissante. Moins de six minutes à peine, mais pourtant, comme une heure qui égrène chaque seconde.
Deux bonus track pour l’édition CD, « Powerslave », strident comme du MERZBOW et lapidaire comme du NAILS/STRAPPING YOUNG LAD, et « Man at C&A », massif et écrasant, concassant le peu de tympans qu’il nous reste, sans aucune empathie.
Je ne rentrerai pas dans le petit jeu de la prévision. Inutile de savoir si The Whole Of The Law fait partie des meilleurs albums ou pas, là n’est pas la problématique.
La vraie est de savoir si oui ou non, un jour, les ANAAL NATHRAKH arrêteront d’abuser du bruit et du chaos pour nous faire souffrir dans le plaisir. Et là encore, la réponse est limpide et implicite. Non.
Mais vous pouvez toujours demander à un unijambiste de traverser l’espace vide entre deux immeubles, pendant une tempête, après avoir trop bu. Sa peur ne sera pas moins tangible que la vôtre en écoutant cet album.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09