Vous l’aimez plutôt emphatique ou ascétique ? Poétique ou cru ? Philosophique ou anticlérical ? Symphonique ou brut ? Avant-gardiste ou classique ? Enrobé d’arrangements ou concentré sur l’essentiel ? Rachitique ou opulent ? Les questions pourraient défiler sur le clavier sans que mon inspiration ne se tarisse. Car lorsqu’on parle de Black Metal, tout est possible. Toutes les options sont viables, et existantes. C’est - précisons-le une fois encore - le seul style (ou presque) ayant constamment évolué tout en restant proche de ses racines. Pour un genre qui à la base se devait d’incarner la misanthropie minimaliste et l’allégeance au malin, on peut dire qu’il a su profiter d’une créativité plus ambitieuse.
Ambitieux.
C’est probablement le qualificatif le plus adapté aux finlandais de CURSE UPON A PRAYER. Un nom à coucher dehors, mais une carrière de presque quinze ans sanctionnée par quatre longue-durée et quelques poussières. Après avoir sorti deux œuvres coup sur coup entre 2014 et 2015, le quatuor a commencé à prendre son temps pour creuser un peu plus les options, et ainsi, ne revenir que lorsqu’il a quelque chose à dire. Le dernier discours, Infidel, datant déjà de 2020, il convenait de lui offrir une suite afin qu’il se repose un peu. Et cette suite est tout simplement gigantesque. Presque une heure de musique puissante, luxuriante, jouée par des pêcheurs qui assument totalement leurs vices et leurs travers.
The Worship: Orthoprax Satanism est un monstre, n’ayons pas peur des mots. Une heure de narration, des nuances sur toute la palette, des déviations mélodiques, des moments de faux-calme assez inquiétants, des couches vocales superposées et une atmosphère de déliquescence morale qui fait du bien aux cœurs noirs que nous sommes.
Ari XIII (guitare/chant), O. Nekrolepsia (guitare), Beliathan (basse) et Anzillu (batterie) pourraient être les enfants bâtards de CRADLE OF FILTH et EMPEROR. J’utilise le nom de COF plus pour une histoire de contexte que d’inspiration, les finlandais partageant avec les anglais ce goût pour les motifs accrocheurs qui permettent d’hameçonner plus de proies. Mais si l’underground reste le terrain de chasse favori de CURSE UPON A PRAYER, on sent le groupe presque prêt à affronter le mainstream extrême, tout en gardant ses racines finlandaises dans les mélodies Folk qui tournoient comme des vautours.
Impressionnant, pour le moins. Si Infidel plaçait déjà la barre très haute, The Worship: Orthoprax Satanism l’enjambe avec une facilité déconcertante. Traditionnel dans les faits, mais moderne dans l’approche, ce quatrième long est d’une maitrise absolue, et évoque le meilleur de la vague nineties, lorsque les musiciens les plus éprouvés se laissaient tenter par la précision absolue dans un cadre de débauche sonore.
EMPEROR donc, et puis les collègues nationaux, SIELUNVIHOLLINEN, SATANIC WARMASTER, VALRAVN ou BEHEXEN. Du beau monde donc, pour une démonstration de force terrible, avec en exergue cette volonté de sortir du tableau pour inventer des nuances de gris et de noir. L’acmé de ce principe est atteint sans conteste sur le long et ultraviolent « A Heav’n of Hell », qui en neuf minutes passe en revue toutes les opinions et tous les choix, imposant des chœurs grandiloquents, des cassures Heavy, et des digressions mélodiques fielleuses.
Plusieurs morceaux peuvent se revendiquer comme ADN primal. « Ortopraxia » évidemment, l’ouverture majestueuse qui prévient l’auditeur qu’il se glisse dans les rangs d’un culte extrême et sans tabous, mais aussi « The Worship I: Patior », autre gigantesque pavé qui a des airs d’incantation nocturne pour fidèles entièrement dévoués à la cause. Une cause qui est fascinante, et qui utilise tous les moyens possibles pour imposer son crédo, que les harmonies, les silences et les moments d‘intensité absolue rendent encore plus crédible.
CURSE UPON A PRAYER est désormais si proche de la perfection que l’on peut presque l’admettre atteinte. La production, gargantuesque, la rythmique lourde ou preste, le chant abominable et rocailleux, et les stances rigides qui soudain dégénèrent en transes hypnotiques à la recherche du mal qui se cache en chacun de nous.
Loin du symphonique à synthés qui cite le Classique sans en avoir une once de crédibilité, The Worship: Orthoprax Satanism préfère jouer le Black Metal comme il a toujours été pratiqué dans les pays nordiques. Apre, rugueux, guerrier et belliqueux. Mais aussi, rudement intelligent au moment de jouer des tours pendables. Cependant, certains morceaux, plus directs que d’autres nous autorisent à nous déhancher sans retenue (« Black Venus Erotica », bacchanales mystiques aux corps mélangés), ou à nous offrir une rêverie Ambient, aussi étrange qu’un cauchemar à moitié réel (« He That Eateth My Flesh »).
CURSE UPON A PRAYER fait donc maintenant partie de l’élite, et il est évident que ce nouvel album impose une suite qu’on attendra de pied ferme. Incroyablement dense et bouillonnant, The Worship: Orthoprax Satanism dépeint Satan comme le messie qui sauvera le monde de son marasme, en volant quelques âmes noires au passage. Mais il Faust toujours lire les petits caractères sur les contrats.
Titres de l’album :
01. Ortopraxia
02. Cunt God
03. Sulfurserpent
04. Blood Poetry
05. A Heav’n of Hell
06. I Enthrone You
07. Black Venus Erotica
08. He That Eateth My Flesh
09. The Worship I: Patior
10. The Worship II: Ignis
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49