Aretha Franklin nous conseillait de « penser à ce qu’on essayait de lui faire », George Harrison nous invitait à penser pour et par nous-même, Descartes pensait donc était, mais les résidents d’Alfortville nous demandent juste de p.e.n.s.e.r.
Ça peut paraître évident, mais n’oublions pas tous les sens possibles de ce terme. Penser, réfléchir, cogiter, déduire, et plus simplement analyser, et ressentir. Ressentir les besoins, les nôtres et ceux de nos contemporains, ceux de la planète, d’une société qui se gangrène de l’intérieur…
Penser. Essayez. Fermez les yeux, et fixez-vous sur une idée. Pas une idée fixe, mais une idée qui peut grandir en vous, s’échapper de votre cerveau et contaminer la planète comme un virus de pandémie.
Vous visualisez ce serpent qui se glisse hors de votre peau pour planter ses crocs dans les idées reçues et les nécroser ?
Ce serpent, Tanguy le chante justement. Il le chante parce qu’il l’est. Ses paroles sifflent le long de sa langue, et s’insinuent dans les couloirs sinueux d’une ville mondiale qui étouffe.
T.H.I.N.K.
Cinq petites lettres pour trois grands musiciens (Tanguy, ex NO RETURN, au chant, Nob à la guitare et Seb au kit), sept énormes morceaux, et un gigantesque premier album. Ni plus ni moins, un passé consistant, un présent insistant pour un avenir important.
La musique du trio ne fait pas dans le détail tout en les accumulant, tâtant du Hardcore par tous les pores en trempant les pieds dans le Metal Indus froid et masqué. A l’heure où le Metalcore est roi, ou le Hardcore fait la loi, le melting-pot proposé par nos trois acolytes fait tâche dans un paysage uniformisé qui souvent se contente de formules usées, les mêmes que Tanguy conchie en couchant sur papier les concepts qu’il honnit.
T.H.I.N.K. existe depuis 2011, rode son répertoire et prépare son grand soir, celui du hold-up star à grands coups de pied de biche Core que les musiciens enfoncent sous le rideau de fer de la normalité musicale. Prêts à tout défoncer, les ex NO RETURN et DENONCIATOR se servent d’influences notables, qu’ils prennent la peine de citer (KILLING JOKE, BOTCH, UNSANE, AGNOSTIC FRONT, PRONG), pour les adapter à leurs points de vue radicaux.
Ces points de vue trouvent écho dans un son. Un son énorme, grave, le même qu’on trouvait sur le dernier effort de Jaz Coleman & co, ou sur les ultimes albums de PRONG avant la séparation. Ils trouvent aussi écho dans les accords froids et puissants de Nob, dont la guitare use des cordes vocales graves du haut-parleur Induscore des années 80/90, et dans la frappe de Seb, qui martèle ses futs comme un métronome, évoquant souvent un savant mélange entre Ted Parsons et Charlie Ondras. Mais ces points de vue sont aussi ceux de Tanguy, qui avait déjà prouvé depuis longtemps son talent de parolier et de vocaliste sur deux albums de NO RETURN (Seasons of Soul en 1995 et le EP Red Embers en 1997), et qui une fois de plus use et abuse de ces tonalités rauques et vindicatives qui sont sa trademark.
Le résultat ? Une osmose fatale pour une injection de lucidité musicale létale, sous la forme d’un énorme bloc de plomb Hardcore et de Metal façonné à la méthode Industrielle. De loin, la musique surpuissante du trio évoque un savant alliage entre les mécanismes de PRONG et la rage sourde d’UNSANE, incarné avec la rigueur animale d’un KILLING JOKE abyssal. En soi, un cocktail Molotov de guitares qui écrasent, qui laminent, qui tranchent et ruminent, d’un chant qui éructe, conseille, ordonne et vitupère, et d’une rythmique qui lie le tout d’une précision et d’une lourdeur impressionnantes.
Sept morceaux, dont une intro, mais une variété dans la cohérence qui prouve que T.H.I.N.K. n’est pas le groupe d’un seul ton.
Mais il faut dire que « Une Autre Vie » vous met rapidement au parfum avec ses six cordes aussi lâches et profondes qu’un Downcore de l’enfer, tandis que Tanguy vous assène sa première litanie :
« C’est ton jour de chance, remets le compteur à zéro, offres-toi cette autre vie, elle serait là, ta vie ! »
Cette autre vie, c’est bien évidemment ce premier album sans compromis, qui démarre lourdement pour accélérer la cadence d’un énorme « Elle Serait Là, si Lourde », qui cavale d’un riff que n’aurait pas renié Billy Milano. Un peu Crossover dans l’esprit, fond Thrash pour attaque Core et pit qui te dévore, tandis que Tanguy s’époumone sur un « Il y a tant d’années, tant de vision entassées, blessures, orgueil, METAL ! ». Et tout est là, résumé, si lourdement justement, ce parcours individuel au service du Thrash, dévorant du Hardcore de façon industrielle pour évacuer un ressenti sans pareil…
Pas d’ego, juste des mots (dont ceux de Boris VIAN) et des maux, des thématiques puissantes, des images dérangeantes, et loin des formules parfois toutes faites du Metal français, un réel talent d’auteur qui cherche à aller plus loin que les leitmotivs usés jusqu’à la corde de mi.
« Serpent », déjà présenté en vidéo sur Youtube, c’est le fameux reptile virus que je décrivais en préambule, sournois, qui ondule sous les fréquences d’une intro grondante, avant de filer d’un tempo groovy sous les pierres de la vie. Beat d’airain qui pourtant chaloupe sans sombrer, chant au phrasé décalé, personnage incarné par un vocaliste interné, qui s’amuse à entrer dans la peau de son personnage de dénonciateur désencarté. Concassages purement Thrash, le serpent mord, fait le mort mais jamais ne s’endort pour un opéra en PRONG JOKE majeur, aussi déhanché qu’un handicapé claudiquant sur les trottoirs de l’espoir.
Et plus l’album avance, plus le réalisme nous devance, même en allant « Tout Droit », d’un pas chaotique aux dissonances électriques. Est-ce là tout ce que le groupe nous souhaite ? Il semblerait que cet up tempo le prouve d’un petit tour sur des BPM à peine sortis du four qui percutent un refrain mélodique contrebalançant des couplets grinçants.
L’ironie de la voix ne cache pas la voie, et « Le Désert » vous attend, pour un déluge de plomb chauffé à blanc, gardant en ligne cette confrontation majeure entre Metal, Indus et Hardcore, pour une lutte à mort entre des guitares à la Geordie et un chant qui réchauffe et refroidit. « Tu as chaud, tu as soif, tu n’as rien à faire », sauf affronter l’enfer, celui que nous propose le néant de «Blackout », qui plaque sur les conduits un énorme riff redondant qui tombe dans les stridences et la disharmonie avant de la retrouver sur un refrain vraiment prenant, et ne reste plus au final qu’à redevenir « Humain », avant qu’il ne soit trop tard…Intro de cordes orientales, poussée d’adrénaline Indus, et sept minutes et vingt-cinq secondes de charge frontale qui replacent dans le contexte tous les vecteurs précédemment définis. Collision entre mélodie et furie, percussion de rythmiques contraires, et lignes vocales habitées qui circulent dans vos veines. Humain ? Oui, nous le sommes encore, et T.H.I.N.K. nous le rappelle en hurlant très fort, quelques années avant la mort.
« Je suis le compte à rebours »
Vous pouvez prendre ce vers comme un avertissement. Global bien sûr, nous rapprochant d’une fin inéluctable, mais aussi personnel, celui qui décompte les secondes qui séparent le trio d’un succès inévitable. Pensez. N’oubliez pas de penser. Mais T.H.I.N.K. ne vous oblige à rien. Il vous présente juste des faits. Et fait exploser votre cerveau d’une détonation énorme, comme une bombe humaine et musicale qui n’attend que l’étincelle de votre passion pour éclater.
Titres de l'album:
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11
Ils sont juste trop faux-cul pour assumer le statut de tribute band, voilà tout.
06/05/2025, 16:15