Si vous êtes un peu adolescent américain dans votre petite tête, vous avez comme moi dégusté la série Glee, ainsi que les trois volumes de Pitch Perfect. Oui, j’assume totalement ce côté midinette musicale, et je reste fidèle à des goûts développés dès ma jeunesse. Tout le monde connait donc le principe des Glee clubs aux USA, ces nerds qui rejettent toute instrumentation pour s’en remettre au pouvoir de leur unique voix. Et je ne vous parle pas ici des BOYS II MEN ou des POETIC LOVERS, mais bien de ces chanteurs qui transforment leur voix en instrument à part entière, imitant des parties de violon, de basse, de batterie, de guitare, de piano ou autre vielle et hélicon. La performance est souvent bluffante dans le cas des plus doués, et tout ceci donne lieu à des démonstrations assez hallucinantes de dextérité qui vous font parfois croire qu’un orchestre symphonique est à l’œuvre discrètement derrière les choristes.
Généralement focalisé sur un répertoire Soul, Gospel, Rap, ou Pop, le chant a cappella possède aussi son ensemble métallique, qui depuis 2006 nous démontre tout le caractère dispensable d’une formation classique basse/batterie/guitare. Les allemands de VAN CANTO, depuis 2006 alignent les albums comme on ramasse les feuilles mortes en automne, et nous gratifient régulièrement de nouvelles prouesses vocales, uniquement soutenues par un batteur à l’abattage impressionnant.
Très logiquement, trois ans après le dernier-né Trust in Rust, l’octuor revient avec de nouvelles chansons sur les partitions, pour un huitième album qui ne diffère pas vraiment du reste de son répertoire. De fait, To the Power of Eight continue sur la lancée des quinze années passées à défendre le chant a cappella, et ne dénote pas dans le répertoire des allemands. On y retrouve cette remarquable organisation vocale, ces arrangements de gorge incroyables, ces graves et ces aigus poussés aux cordes au rendement maximal, et cette facilité d’orchestration qui les rend si attachants. Mais une fois n’est pas coutume, le groupe reprend à son compte quatre morceaux hors de sa créativité, et nous offre des relectures de classiques d’AC/DC, IRON MAIDEN, AMON AMARTH et QUEEN, soit un tiers de l’album, qui réduit à l’état d’EP le répertoire original. Etrange pour une reprise de contact après trois ans de silence de s’en remettre à des reprises, mais les dites reprises sont tellement parfaites qu’on en excuse cette facilité.
Hagen Hirschmann (chant), Inga Scharf (chant), Ross Thompson (Rakkatakka aigus), Stefan Schmidt (Rakkatakka graves), Jan Moritz (pad et chant basson), Ingo Sterzinger (basse et chœurs), Bastian Emig (batterie et chœurs), et Philip Dennis “Sly” Schunke (chant et invité spécial) développent encore des trésors d’imagination pour essayer de nous surprendre, mais après sept albums, la surprise tombe à plat, et l’auditeur sait très bien ce qui va l’attendre sur cet album. Ce qui n’empêche pas le groupe de proposer des morceaux séduisants, à l’image de l’intro « To The Power Of Eight », très celtique et Folk, ou « Falling Down », épique en diable et reposant sur une alternance de séquences tout à fait délicieuse et bondissante. En cas de méconnaissance du procédé vocal, il faut quelques morceaux pour se mettre dans le bain, mais l’octuor ne déçoit pas, puisqu’il se contente de reprendre les formules déjà largement éprouvées du passé.
On appréciera évidemment les compositions originales, véritables pièces d’identité du groupe, mais les reprises ne sont pas sans piquant non plus. Ainsi, AMON AMARTH se voit revisité avec panache et emphase, tandis que le classique 80’s de MAIDEN, « Run To The Hills » sonne encore plus guerrier que l’orignal avec ses chœurs dignes d’un champ de bataille. D’un autre côté, « Thunderstruck » des frangins Young apporte un peu de légèreté au dramatisme de l’ensemble, et son intro se voit sublimée par cet échange de voix. Quant à l’éternel « I Want It All » de QUEEN, l’enchevêtrement des voix principales lui confère un parfum presque mystique, tout en jouant avec les codes de la Pop vocale.
Rien de particulier à signaler donc sur le front de l’instrumental, rien non plus en termes de découverte, le nouveau libretto de l’opéra des VAN CANTO est fidèle aux dogmes énoncés dès la création du groupe, qui devient de plus en plus imperfectible dans sa démarche, et qui ose parfois s’éloigner du Folk/Power Metal pour proposer des tubes plus calibrés et enjoués (« Hardrock Padlock »).
Tout ça peut rapidement lasser, puisque comme l’a très justement signalé un confère, une fois le gimmick a cappella mis de côté, la musique reste assez générique et digne d’un groupe allemand de Hard/Heavy solide, mais pas vraiment original. Mais VAN CANTO a le mérite d’être l’un des seuls représentants de ce style Ô combien exigeant dans le Metal et autant l’apprécier en tant que curiosité de qualité. Pas sûr que la formule fonctionne avec MARDUK ou ANAL CUNT par contre.
Titres de l’album:
01. To The Power Of Eight
02. Dead By The Night
03. Faith Focus Finish
04. Falling Down
05. Heads Up High
06. Raise Your Horns (AMON AMARTH cover)
07. Turn Back Time
08. Run To The Hills (IRON MAIDEN cover)
09. Hardrock Padlock
10. Thunderstruck (AC/DC cover)
11. From The End
12. I Want It All
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