Il est de notoriété publique que le Black Metal français fait partie de l’élite extrême mondiale depuis très longtemps, et au moins depuis l’émergence macabre des fameuses et infâmes Légions Noires. C’est simple, à chaque fois qu’un de nos représentants sort un album, les webzines spécialisés mondiaux s’affolent, et se pâment face à tant de créativité musicale. Mais il est aussi un fait indéniable, le BM français est à l’image de sa culture, légèrement élitiste sur les bords, et finement lettré. Il est aussi la plupart du temps expérimental, précieux, avant-gardiste, ou du moins tellement ouvert qu’on peine encore à lui accoler l’étiquette simpliste de Black Metal. J’ai souvent craqué pour des productions nationales qui renvoyaient dans les cordes les groupes étrangers établis un peu trop sûrs de leur fait. Mais ce que je reprochais aussi à la scène, c’est de vouloir aller toujours plus loin dans l’élitisme au détriment de la brutalité la plus viscérale. Comme si l’héritage de ces trop fameuses Légions Noires était trop difficile à gérer pour la génération actuelle. Heureusement, dans l’underground, certains activistes refusaient de sophistiquer leur musique à outrance pour lui garder ce caractère foncièrement brutal qui a souligné ses premières années d’existence. Et au premier rang de ces hordes bruitistes sans compassion pour la musicalité, on trouve évidemment les parisiens de NOVAE MILITIAE.
Précisons d’emblée que cette sortie frappée du sceau Sentient Ruin n’est pas une nouveauté, mais bien une réédition du second album des français d’abord sorti confidentiellement et à un tirage très limité en septembre 2020 sur le label colombien Goathorned Productions. Les trois cents copies s’étant écoulées comme des missels sataniques, la maison de disques américaine a décidé de reprendre les choses en main pour que le monde puisse souffrir dans de meilleures conditions de distribution. C’est ainsi que Topheth sera disponible à plus grande échelle, et il eut été dommage que ce tirage s’en cantonne aux fans les plus underground du groupe.
Car en effet, il révèle un visage plus hideux du BM made in France, un BM traité comme un vecteur d’expression de haine et non un mode d’expression artistique et culturel d’exception. La musique de NOVAE MILITIAE a toujours été profondément nihiliste et sans préoccupation d’une simple musicalité, mais trois ans après le célébré Gash'khalah, Topheth conserve les options, tout en poussant la recette à son paroxysme. Nous faisons donc face à une philosophie bruitiste sans concession, proche des relents les plus nauséabonds des marécages BM mondiaux, et en presque une heure de pratique, les musiciens ne faiblissent à aucun moment, ce qui rend l’écoute de ce deuxième né assez éprouvante pour les néophytes. Leur label US en profite d’ailleurs pour glisser une ou deux recommandations, et aiguille les fans d’AOSOTH, S.V.E.S.T., ASH BORER, ANTAEUS et DRASTUS dans cette direction, ce qui en dira suffisamment aux spécialistes un peu perdus sur le chemin. Pour faire simple et parler aux inconnus (ce qu’il ne faudrait pourtant jamais faire), la musique produite sur Topheth est à l’image de sa pochette rouge flamboyant. Une coulée de lave de haine qui se répand sur la terre en provenance directe du volcan des enfers, et une symbolisation de la noirceur de l’âme humaine qui ne va certainement pas tarder à faire mourir ce monde à l’agonie. En tant que métaphore sur l’état de la société et des religions, cet album est d’une pertinence rare, et formalise nos cauchemars les plus récurrents et effrayants. En prenant pour base ses thèmes « musicaux », on remarque très vite que la gravité de la guitare empêche le détachement d’un quelconque motif, et les riffs ne sont d’ailleurs que des prétextes d’arrangements pour permettre à l’instrumental de sonder le plus noir de la psyché humaine, une fois confronté à l’abomination de la vérité : nous sommes tous au service de Satan, et nous contribuons à l’extinction de notre propre race par nos vices et notre inconscience.
Et mieux que de parler de musicalité, il convient de parler d’anti-musicalité lorsqu’on traite du cas des NOVAE MILITIAE. A la limite du Noise, mais sans franchir complètement la frontière, les musiciens jouent encore avec les limites de la tolérance pour nous proposer quelque chose à la lisière de l’Ambient. La perception de leur approche est d’autant plus importante qu’il ne faut pas envisager cet album comme une suite de chansons, mais bien comme un tout découpé en chapitres selon l’humeur - toujours noire et sans pitié - et l’effet recherché sur l’organisme. Ce dernier subit immédiatement les assauts sans pitié de « Towards the Sitra Achra », qui en huit minutes et après une belle intro grondante nous prend de plein fouet et nous entraîne dans les bas-fonds de la création la plus hermétique.
Le groupe n’hésite pas encore une fois à développer son propos au-delà des limites du raisonnable, avec plusieurs pistes flirtant avec les huit, neuf ou dix minutes. Ainsi, « Elevated To Him », avec ses faux airs de REVENGE plongé dans un enfer encore plus brûlant que le sien résume fort bien l’optique des parisiens. Un beat constamment sur la brèche, des guitares qui se noient dans la véhémence ambiante et dont quelques motifs mélodiques circulaires parviennent à s’échapper de façon éparse, et une brutalité omniprésente pour ne laisser aucun répit. Et à vrai dire, seul l’intermède Ambient « The Call of Aeshma » nous permet de respirer en se rapprochant des travaux d’IN SLAUGHTER NATIVES ou LUSTMORD, ce qui en dit long sur les concessions accordées par le groupe au classicisme.
Inutile donc de chercher une quelconque échappatoire à ce purgatoire enfumé, il n’y en a aucune. NOVAE MILITIAE représente et représentera toujours ce que le BM propose de plus grave et nauséeux, et lorsque le tempo décroît de façon drastique, l’oppression n’en est que plus grande et plus éprouvante (« The Tables of Revelations »). Inutile donc de vous accrocher à ce qui reste de rocailleux de ce volcan émergeant des abîmes, puisque la glissade est inévitable. Il ne vous reste plus en définitive qu’à apprécier le silence étrange de l’outro « A.R.F.A. », qui s‘apparente au final traumatique du L’Au-Delà de Lucio Fulci. Des paysages désolés, une marche en avant vers le néant, et la certitude d’avoir terminé notre parcours sur terre de la façon la plus logique qui soit.
Titres de l’album:
01. Towards the Sitra Achra
02. Advent of the Prophet
03. Faithfully Reduced To Ashes
04. The Call of Aeshma
05. Elevated To Him
06. Affliction of the Divine
07. The Tables of Revelations
08. A.R.F.A.
C'est bien qu'il y ai de temps en temps des albums qui rappellent aux gens ce que c'est le Black Metal. Comment c'est sensé sonner. Sans compromis, nihiliste, violent, sombre et dérangeant.
Une autre tuerie de 2020 (oubliée dans mon top tiens !). Et c'est de chez nous en plus !
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