Du Thrash, du Thrash et encore du Thrash. Style de prédilection depuis les 80’s et la découverte de Bonded by Blood et autres Reign in Blood, j’ai le Thrash dans le sang. Et la production actuelle me gâte, même si ses cadeaux sont plus volontiers achetés au pawn shop d’occasion vintage que dans des boutiques jeunes et branchées. Encore une fois, c’est la nostalgie qui parle à travers la voix de ce jeune quatuor d’Oulu, Finlande, qui nous gratifie de son premier album, flambant neuf et rageur comme un mâtin qui n’a pas eu sa pâtée.
Atte Autio (batterie), Janne Karjalainen (guitare), Tommi Kuusela (guitare) et Jaakko Hentilä (basse/chant), après une ou deux années de pratique seulement, nous jettent donc violemment à la face ce Trial by Fire, qui de son titre nous ramène à TESTAMENT ou SATAN. Mais leur musique n’a pas grand-chose à voir avec la référence américaine ou la légende anglaise, et se concevrait plutôt comme un mélange intéressant entre l’EXODUS de Zetro et l’AGONY suédois, avec une petite pointe de dissonance à la SLAYER. Le tout emballé dans un professionnalisme certain, et une attitude pour le moins confiante. Car les trois premiers morceaux de cet album font preuve d’une indéniable ambition, dépassant les vingt minutes au compteur, tout en étalant un nombre d’idées classiques conséquent.
Mais ne classons pas déjà ces nouveaux-venus sur les étagères, puisque leur Thrash, loin d’être générique, accepte les influences extérieures, tout en prêtant allégeance à la Bay Area la plus hargneuse de la seconde moitié des eighties, voire du début des nineties. Sans aller jusqu’à taquiner le sacro-saint Techno-Thrash, leurs instrumentaux sont finement ciselés sans perdre de leur agressivité. « Deliberate Act of War » expose plus ou moins les faits, en plaquant un énorme mid tempo soutenu par une double grosse caisse volubile et des riffs en barbelés, mais très rapidement, l’intelligence d’agencement et les ambiances témoignent d’un potentiel certain. Foulant du pied le terrain occupé par les WARBRINGER, sans vraiment piétiner leurs plates-bandes, les ACCUSATOR récusent donc l’évidence de leur nom pour offrir un peu plus qu’une simple photo de famille fanée aux couleurs rehaussées pour paraître plus lookée.
Et « The Pill » accepte d’ailleurs totalement le noir et blanc du passé pour nous pulvériser d’une attaque fast en bonne et due forme. Joué à l’énergie, ce classique instantané nous rappelle notre jeunesse et ces embardées de cheveux au son de chansons cruelles et véloces, celles-là même que les grands cadors et les as de la série B nous assénaient avec une régularité admirable.
Et alors qu’on pense le tapis déjà déroulé sans pli et sans bosse, les finlandais nous décochent un monstrueux « Cease to Exist », évolutif en diable, et aussi roublard qu’un regard de biais de Charles Manson. Archétype de la composition progressive, qui accepte les mélodies sans édulcorer son propos, ce morceau est un haut-fait à lui seul, et témoigne d’une technique individuelle mise au service d’un collectif soudé. On apprécie ces couplets écrasants et ces riffs tranchants, mais on accepte aussi ce refrain truffé de chœurs moins lénifiants que la poisse allemande, et cette délicate harmonie qui traverse le perfecto. Aussi fins qu’ils ne sont bourrins, les ACCUSATOR passent donc en revue toutes les nuances du Thrash de tonton, mises au goût d’un jour plus épais, performant et violent. Ainsi, ils n’hésitent pas à alterner les ambiances, en nous claquant les genoux d’un mortel « Acid Attack », jet de bile acide Thrashcore d’à peine une minute qui va jusqu’à ridiculiser les WEHRMACHT.
A partir de là, tout est possible et tout le devient. On ne sait plus à quelle sauce on va être bouffé, entre barbecue et marmite bouillante, et « N.S.T.M » de maintenir la pression, sans faux-col et avec des bulles malicieuses. Le tempo est toujours aussi soutenu, la hargne intacte, et on se prend de passion pour un album certes formel, mais totalement passionné, qui charcle, qui lamine, mais qui ramasse les restes avec une précision redoutable.
Entre la violence allemande la plus crue (celle des premiers DEATHROW et d’ASSASSIN), et la fluidité US qui fait passer toutes les pilules, Trial by Fire nous juge et condamne à l’issue d’un procès écrit d’avance, sans avocat, et avec un sadisme certain dans la sentence. Celle de se retrouver plongé dans un passé glorieux, à l’âge d’or d’un style musical qui se radicalisait avec les années, tout en acceptant de se baser sur un solfège plus précis.
Et malgré cette première moitié d’album imperfectible, le quatuor garde les rangs serrés pour que la suite ne nous laisse pas décompresser, via quelques autres évolutions à la EXODUS/HEATHEN (« Witch Hunt »), des labyrinthes finauds mais costauds (« False Images »), et tout ce qui fait d’un album de Thrash un classique immédiat. Soli modestes mais propres, voix sournoise qui prend à la gorge, production épaisse et précise, tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce premier album un hit.
Moi qui n’attendais pas grand-chose de cette sortie anecdotique, me suis retrouvé sous le charme des ACCUSATOR. Adeptes du best of both world, les finlandais ont joué la pression sur la durée, exercice périlleux, mais transformé ici par une attitude lucide et un talent certain. Peut-être l’album Thrash de ce premier trimestre, certainement même, et un candidat sérieux au podium de fin d’année.
Titres de l’album :
01. Deliberate Act of War
02. The Pill
03. Cease to Exist
04. Acid Attack
05. N.S.T.M
06. Witch Hunt
07. False Images
08. Hollow Mind
09. U-257
Sympa ça. Je vais approfondir, merci
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