Turn Back Time

Lioncage

21/09/2018

Pride And Joy Music

Vous connaissez bien sûr l’expression « tourner comme un lion en cage ». Généralement, elle évoque une image très précise d’impatience, de rage, de fauve qui n’en peut plus de sa privation de liberté et qui crochèterait bien la serrure pour planter ses dents dans le premier postérieur venu. Sauf que parfois, cet adage peut s’avérer trompeur, spécialement lorsqu’il est utilisé dans un cadre nominatif. Car si la musique des LIONCAGE ne manque pas d’énergie, elle illustre assez mal ce sentiment d’enfermement et de pression, et évoque plus volontiers la sensation que procure un voyage vers nulle part, les oreilles contentées de chansons fraîches et spontanées…A moins de considérer que le lion en question s’est extirpé de ses barreaux d’acier, auquel cas l’analogie n’en est pas plus idoine…Mais évacuons ces questions d’ordre sémantique pour nous pencher sur le cas de ce combo éminemment intéressant, sévissant depuis plusieurs années, et contredisant la croyance populaire qui pense encore que tout ce qui vient d’Allemagne doit forcément être bourrin et bas du front. D’outre-Rhin nous en vient donc ce quintette (Thorsten Bertermann -chant, Lars König - guitares, Arvid Lucas - basse, Torsten Landsberger - batterie et Bülent Sezen - batterie aussi), formé en 2013, et déjà responsable de deux longue-durée. Ainsi, Done at Last en 2015 et The Second Strike en 2017 ont su contenter les fans d’un Hard-Rock traditionnel léché, et c’est en une année à peine que les allemands font leur retour avec ce fameux troisième LP risqué, Turn Back Time, qui n’aura pas besoin de jouer la montre pour s’imposer. Il ne fait en effet que prolonger les travaux antérieurs du groupe, continuant d’utiliser une recette largement éprouvée, à base de Rock west-coast musclé, de Hard Rock mélodique énervé, et d’AOR boosté, histoire de ne pas sombrer dans une routine gentiment niaise et trop sucrée. Là est donc le point fort de cet album dit « de la maturité », qui parvient à associer des strates dissemblables et les faire cohabiter dans une même structure, sans trahir le public situé de l’un ou de l’autre côté.

Et on le sait, trouver le juste milieu entre le caramel dur et la guimauve molle est un exercice difficile, que seuls les musiciens passionnés et véritablement investis parviennent à mener à bien. Nous pouvions donc compter sur les LIONCAGE pour prouver qu’il est toujours possible de séduire sans passer la brosse à reluire, et Turn Back Time nous démontre en douze morceaux que les univers de TOTO, de JOURNEY, de TNT, W.E.T, TYKETTO et autres chantres de la caresse qui pique peuvent cohabiter dans un même monde, sans s’entrechoquer comme des électrons tournant fou. Evidemment, et à raison, les détracteurs habituels de ce genre d’optique se feront une joie de rappeler que des albums de cette trempe ne font que remettre au goût du jour des modes passées et éprouvées, mais la bonne humeur, l’optimisme, la puissance et la sincérité dégagée par ce disque les feront rapidement taire, spécialement lorsqu’ils se rendront compte que toutes les chansons sont d’égale qualité et dignes de devenir des hits du genre. Le quintette se paie même le luxe de quelques featurings fameux, dont ceux d’Anya Mahnken (BEYOND THE BLACK, UNHEILIG U.A.) au chant sur « So Long Ago », d’Olaf Senkbeil (DREAMTIDE) au chant aussi sur « Turn Back Time », de Neil Murray (WHITESNAKE, BLACK SABBATH, et trop pour être mentionnés) à la basse pour « Heaven’s Gate », et de Joe Castellini à la guitare sur « Comfort Me ». Un joli catalogue de faciès et noms connus pour une réussite totale, qui ma foi n’a pas besoin de parrainage pour s’imposer dans le paysage musical actuel.

Mais comme je l’ai déjà signalé, si apprécier ce genre d’album est d’une facilité déconcertante, en parler est d’une autre paire de manches. Difficile en effet de ne pas tomber dans la redondance en pensant aux mots déjà employés pour décrire des œuvres similaires, d’autant plus que le mode opératoire est toujours le même. De grosses guitares en riffs ventrus pour assurer l’adhésion d’une fanbase Metal, mais aussi des mélodies appuyées pour faire de l’œil aux fans de Rock à l’Américaine, le tout saupoudré de chœurs enchevêtrés et de quelques nappes de clavier en contrepoint pour adoucir le tout sans le ramollir. De là, les morceaux dosent les ingrédients selon l’effet voulu, mais la façon de procéder ne diffère pas des références utilisées, tout en apportant un petit plus de professionnalisme à l’Allemande qu’on reconnaît dans cette production énorme et cette rigueur d’enregistrement absolue. En admettant que les titres jouent quand même avec un timing assez lâche, il convient de préciser que les idées ne manquent pas, qu’elles se concrétisent sous la forme de breaks habiles ou de refrains vraiment subtils. Pas de crainte à avoir donc au niveau panne d’inspiration, puisque malgré la seule année qui sépare Turn Back Time de The Second Strike, la créativité est toujours de mise chez les LIONCAGE, qui le démontrent d’ailleurs avec une envie palpable sur l’entame « Heaven’s Gate », dont le JOURNEY d’Arrival aurait pu faire son petit-déjeuner. Atmosphère délibérément Hard-Rock, pour un tube que les BONFIRE ont toujours souhaité composer sans vraiment y arriver, et union des tendances européenne et américaine pour une balade en moto sur les bords du Rhin tout en laissant ses pensées dériver le long des highway californiennes. Instrumentalement parlant, les intervenants sont bien évidemment au-dessus de tout soupçon, et on notera même un soin particulier apporté à peaufiner le son de basse, vraiment ronflant et berçant, qui apporte une touche de profondeur à un morceau aussi léger qu’une plume volant en été.

Et jusqu’au final « How Does It Feel », la pression ne retombe jamais, que le groupe taquine le souvenir des fabuleux BALANCE en l’imprimant d’images d’un TOTO délicieusement agressif sur « Black Water », ou qu’il joue le mid-tempo élastique et radiophonique avec « The Walls », que les fans du YES des années 80 sauront déguster comme il se doit. Mais le Hard, le vrai, n’en est pas pour autant snobé ou rangé dans le placard avec les clous rouillés, puisqu’un joli burner comme « How Can U Say » le passe au cirage d’une mélodie en mirage, pour nous émerveiller d’une approche JOURNEY contemporain, sans pour autant singer ses modèles au tic près. Niveau sentiments et romance en vacances, comptez sur la magie de « Believe In Magic », qui en effet nous ensorcèle de sa rythmique vaudou pour mieux nous embrasser dans le cou,  mais repaissez-vous aussi du très Pop-Rock « Let the Children Dance » qui entraîne dans le ballet les ombres de Richard MARX, d’IQ, de Joseph Williams en solo et même de MARILLION pourquoi pas, valsant sur du MIKE & THE MECHANICS pour mieux provoquer la joie gracile d’un Phil Collins soudainement converti à la cause Rock. La quintessence même d’un Rock harmonieux mais belliqueux, qui ne joue pas forcément l’originalité mais qui ne se mord pas la queue, et qui ressort de sa niche avec un bel os à ronger et une douzaine de chansons parfaites à déterrer. Les allemands de LIONCAGE n’ont donc pas perdu la main, loin de là, et ce Turn Back Time multiplie les moments de bravoure, les performances individuelles au service d’un collectif en osmose, les soli précis mais ruisselants, et les lignes de chant aussi pures que puissantes. Une preuve supplémentaire démontrant que le Rock peut se faire plus abordable sans perdre son âme au passage, et un lion qui rugit autant qu’il ne miaule, pour rester impressionnant tout en se voulant moins menaçant.       

 

Titres de l'album :

                         1. Heaven’s Gate

                         2. Black Water

                         3. Comfort Me

                         4. Blind

                         5. Turn Back Time

                         6. Believe in Magic

                         7. The Walls

                         8. Dead Man Walk

                         9. So Long Ago

                        10. How Can U Say

                        11. Let the Children Dance

                        12. How Does It Feel

Site officiel

Facebook officiel


par mortne2001 le 13/10/2018 à 15:59
85 %    1027

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Antropofago + Dismo + Markarth

RBD 16/01/2025

Live Report

Sélection Metalnews 2024 !

Jus de cadavre 01/01/2025

Interview

Voyage au centre de la scène : MONOLITHE

Jus de cadavre 15/12/2024

Vidéos

Corentin Charbonnier : l'anthropologue du Metal

mortne2001 09/12/2024

Interview

CARCARIASS + Guests

Simony 06/12/2024

Live Report

FALLING IN REVERSE + HOLLYWOOD UNDEAD

Chief Rebel Angel 06/12/2024

Live Report

Lezard'Os Metal Fest 2024

Simony 02/12/2024

Live Report

Voyage au centre de la scène : STILLE VOLK

Jus de cadavre 01/12/2024

Vidéos
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Chazz

Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)

17/01/2025, 22:44

Bill BAroud

Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !

17/01/2025, 17:03

Humungus

Le coup de la goutte de résine, ça va me faire la soirée...

17/01/2025, 16:52

senior canardo

2 sisters 1 cup ! haha joli pochette

17/01/2025, 10:02

Seb

J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.

16/01/2025, 18:21

MorbidOM

Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène. 

16/01/2025, 12:15

Jus de cadavre

Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.

16/01/2025, 10:22

Simony

Merci Styx je transmets à notre expert informatique.

15/01/2025, 15:53

Simony

Merci Styx je transmets à notre expert informatique.

15/01/2025, 15:53

Styx

Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)

15/01/2025, 12:58

Incroyable album

Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)

14/01/2025, 09:27

Humungus

Qui a dit que l'on n'était jamais content ?!

13/01/2025, 08:36

Humungus

Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.

13/01/2025, 08:36

Capsf1team

Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête. 

13/01/2025, 07:59

Simony

Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)

12/01/2025, 17:38

Humungus

Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)

12/01/2025, 14:27

Benstard

Litany la claque a l'époque. Ce son de grosse caisse du futur.

11/01/2025, 13:35

Buck Dancer

Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.

11/01/2025, 12:16

Capsf1team

Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)

10/01/2025, 09:12

RBD

J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)

09/01/2025, 19:49