Je suis désolé, mais je suis humain et j’ai des défauts. Mais j’ai une grande admiration pour Nicolas Saint-Morand, celui qui préfère être désigné sous le sobriquet de RMS Hreidmarr. Comme tous les artistes qui assument leurs positions et leur morgue, l’homme déclenche des réactions contradictoires. Il provoque autant la haine que l’amour, et ce depuis le début de sa longue carrière, et aujourd’hui, même si la plèbe s’est calmée à son propos (sans parvenir à un consensus), sa simple présence suffit à conférer à un projet une odeur de soufre. Et depuis que le chanteur/narrateur a rejoint les rangs de GLACIATION en 2014, le groupe n’a plus jamais été le même. Aujourd’hui d’ailleurs, avec beaucoup d’ironie, le chanteur est devenu le plus ancien membre d’un concept né bien avant qu’il n’en ait connaissance, apposant donc sa griffe encore plus profondément dans les œuvres d’un groupe qui n’en est pas un. A l’origine, en 2011, GLACIATION avait déjà tout du supergroupe des enfers, et fut formé par le triptyque historique Valnoir (THE CNK, SOMBRE CHEMIN), François Duguest (ODITEOHR), et Hugo Moerman (NECROBLASPHEME), auxquels s’étaient ajoutés pour l’enregistrement du premier EP Jean Deflandre (batterie – ALCEST), et l’incontournable Neige (guest chant).
Depuis, deux longue-durée sont venus alimenter la machine à fantasmes, les musiciens sont venus et partis, mais tous ceux ayant posé leurs oreilles sur 1994 ou Sur les Falaises de Marbre n’ont jamais oublié cette expérience unique. A l’origine, et les pedigrees le permettant, le groupe se voulait laboratoire de studio pour retrouver le son originel du BM des nineties, ce son si froid, cette ampleur unique, cette épaisseur conséquente de violence. Mais avec de tels musiciens aux commandes, l’objectif de départ a fini par dériver, pour représenter une sorte de transposition temporelle, une digression magnifique, une théâtralité obscure, et ainsi, traduire le vocable nordique dans un langage contemporain, sans perdre de son essence. Nous avions bien senti le glissement dès Sur les Falaises de Marbre, et l’arrivée de Hreidmarr au poste de vocaliste. Mais à l’époque, François Duguest et Hugo Moerman étaient encore là pour assurer la transition, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Et aujourd’hui, GLACIATION n’est ni plus ni moins qu’une nouvelle créature aux ficelles manipulées par Hreidmarr qui transforme sa marionnette en goule diabolique, perdue dans un monde de glace et de sang, prête à nous raconter ses massacres dans un Ultime Eclat.
Alors, certes, j’en conviens, j’admire Hreidmarr. Mais j’ai mes raisons, et ces raisons s’appellent ANOREXIA NERVOSA, The CNK ou BAISE MA HACHE, des groupes au sein duquel le chanteur peut exprimer tout son potentiel et laisser libre court à ses divagations dramatiques, avec toujours en exergue cette folie instrumentale qui le pousse à toucher à tout. Au sein de GLACIATION, il retrouve ses pulsions anciennes d’ANOREXIA NERVOSA, cette propension à tout exagérer, à transformer chaque vers en sentence qu’il déclame de sa voix toujours aussi rauque et stridente, à déguiser chaque couplet en poème de mort qui vous gèle sur place. Alors, beaucoup regretteront qu’il se soit approprié le leadership de GLACIATION, qu’ils auraient préféré plus underground, plus solidement professionnel, et certainement, plus neutre. Mais aussi intéressant fut en son temps 1994, il ne peut rivaliser avec Sur les Falaises de Marbre et encore moins avec Ultime Eclat, qui représente plus ou moins la quintessence de la démarche d’origine revue et corrigée par une nouvelle armée. On retrouve donc autour de Nicolas une nouvelle bardée de mercenaires aux parcours plus ou moins illustres, avec à la basse, au piano et mellotron Katia von Wasgau (LOS DISIDENTES DEL SUCIO MOTEL, VENT DEBOUT), à la batterie Grégoire Galichet (DEAD SEASON, DEATHCODE SOCIETY, DJABAH, ECCLESIA, WARKUN), L.X. Sethnacht à la guitare (ESCHATON), ainsi qu’Arnhwald (DEATHCODE SOCIETY, ECCLESIA), à la seconde guitare et au chant clair. Belle brochette donc, qui n’a peut-être pas la superbe des combinaisons antérieures, mais qui confère à ce troisième LP une aura très particulière, comme si le concept avait abandonné toute raison pour atteindre les cimes du BM autrefois plantées de leur drapeau par les héros norvégiens et suédois.
Musicalement, GLACIATION est toujours aussi difficile à cerner ; on sent bien évidemment en filigrane que le groupe souhaite toujours se rapprocher d’une époque où tout restait encore à définir, ou EMPEROR perfectionnait sa perfection, ou MAYHEM tentait de faire oublier sa triste légende en devenant trop technique sous l’impulsion d’Hellhammer, mais on comprend aussi que les musiciens sont très conscients que depuis, la scène française a comblé son pseudo retard de départ, et qu’une génération de musiciens extraordinaires a succédé aux légions noires. Au revoir l’underground donc, et un salut tendu à tous les acteurs de la scène, MALLEUS MALLEFICARUM, ALCEST, les Acteurs de l’Ombre, mais aussi évidemment, ANOREXIA NERVOSA. Et avec cinquante minutes pour sept pistes uniquement, ce troisième chapitre est un monstre de glace, un monument érigé au nom de la grandeur, et certainement le meilleur album de BM qu’il m’ait été donné d’entendre depuis très longtemps.
Sans gimmicks, sans trouvaille en astuce, le quintet renouvelé a continué le travail entrepris, en le portant à un degré de professionnalisme sidérant. Malgré une longue intro de rigueur, l’amplitude du travail surprend immédiatement via les premières secondes de « Ultime Eclat », le title-track d’un album en forme de film pour les tympans. Le chant, toujours aussi unique en son genre se plaque sur une bande instrumentale faite de guitares qui dévient sans cesse, d’une basse qui ondule en arrière-plan, et d’une rythmique qui s’adapte aux segments, osant la pesanteur lorsque la vélocité n’a pas lieu d’être. Aussi redondant que culotté, le BM de GLACIATION ne supporte toujours pas la demi-mesure, et n’accepte que l’exagération, avec des lignes de chant excessives, des plans trop majestueux, et lorsque résonne « Le Rivage », tout y est dit, ou presque. Ultime Eclat fait briller le passé pour rendre le présent moins terne, et se hisse au niveau des meilleurs travaux d’EMPEROR, sans avoir en copier l’unicité. On pense parfois à un mélange improbable entre WOLVES IN THE THRONE ROOM et PESTE NOIRE, mais Hreidmarr a cette personnalité unique qui lui permet de n’être que lui-même dans un monde de références trop faciles. Néanmoins, détailler ce troisième chapitre en le disséquant comme un cadavre encore chaud serait blasphème au regard de son organisme toujours plus complexe qui se doit d’être conservé en l’état. En optant pour une production compacte et massive, le quintet a choisi de renforcer la puissance de ses arrangements instrumentaux, toujours aussi circulaires et épileptiques. Mais loin de se contenter de figures imposées, Ultime Eclat sublime le formalisme, et étudie les possibilités de verser dans la nostalgie sans être passéiste. Ainsi, « Acta Est Fabula » réconcilie dans la haine la France et la Norvège, en associant la rigueur glaciale et la théâtralité excessive. « Ce Qu’Il y a de Chaos » à son tour, tente d’expliquer pourquoi le magma sonore sera toujours plus proche du chaos sans sombrer dans la parodie, avec son chant hurlé au-delà de toute humanité et son emphase tragique.
Et à contrario, « Les Grands Champs D’Hiver » nous ramène à une époque où les photos fanées et les bouquets de fleurs sauvages séchées n’étaient pas témoignages vains de l’amour d’un autre temps. GLACIATION, factuellement, porte les stigmates du passé et du présent de Hreidmarr. Et se veut preuve de plus que certains artistes, bien entourés, peuvent devenir des légendes sans avoir à provoquer l’histoire. Juste en la faisant.
Titres de l’album :
01. Ultime Eclat
02. Le Rivage
03. Et Puis Le Soufre
04. Acta Est Fabula
05. Ce Qu’Il y a de Chaos
06. Glaciation
07. Les Grands Champs D’Hiver
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