On dit souvent que le troisième album est un virage en épingle très difficile à négocier. Généralement, le premier album dévoile, le second confirme (ou détruit), mais le troisième est celui qui affirme les identités pour de bon, ou celui qui ouvre des voies possibles. Les exemples sont légion, et ce postulat n’a rien d’une légende, il suffit pour cela de se pencher à nouveau sur des disques aussi essentiels que Master of Puppets, Reign In Blood, ou Among The Living (pour rester dans le même domaine de prédilection) pour comprendre que les groupes dits « majeurs », ont besoin de trois tentatives pour prendre leur envol définitif, ou se planter comme des vautours fatigués. Alors, comment aborder un troisième chapitre avec cette notion en tête, sans pour autant la laisser diriger les débats ? Simple, en l’oubliant totalement, et en se concentrant sur son art sans réfléchir aux conséquences possibles. C’est certainement la façon la plus saine de procéder, sous peine de perdre la tête et de se la jouer Axl en tergiversant plus de vingt ans pour enfin oser avancer. Les allemands d’ASCENSION l’ont sans doute très bien compris, eux qui avec Under Ether nous sortent leur fameuse troisième carte du chapeau, confirmant ainsi tout le bien que l’on pensait d’eux, sans tomber dans la redite ni se planter le nez dans l’arbre. Découvert il y a quelques années via le monumental Consolamentum, publié en 2010, le quintette au line-up mystérieux enregistra par la suite The Dead Of The World qui laissa des impressions plus mitigées, avant de disparaître pendant quatre ans pour revenir plus affuté, et doté d’un son à décorner Satan lui-même. Car plus qu’une nouvelle étape, Under Ether se veut synthèse des deux premières tout autant qu’une projection vers un avenir qu’on pressent aussi sombre pour la musique que radieux envers les musiciens.
Toujours aussi Black qu’on puisse l’être, ASCENSION est parvenu enfin à saisir en un instantané de vie tous les aspects de son caractère farouchement nihiliste, en synthétisant sa colère juvénile (Consolamentum), dans l’ADN de ses velléités de décalage adolescentes (The Dead Of The World), pour offrir l’image d’un groupe adulte parfaitement conscient de ses énormes possibilités. Doté d’une production qui écrase tout sur son passage, ce nouvel album est une démonstration de force comme seule l’école allemande peut en produire, et ose les huit longues pistes pour nous démontrer que le mieux n’est pas forcément l’ennemi du bien, mais que le « ça suffit » est certainement plus efficace que le « plus j’en fais, mieux je me porte ». Ainsi, le groupe a fait le tri parmi ses idées pour ne garder que les plus pertinentes, et nous offre un festival d’intelligence de composition, reposant sur l’utilisation de riffs vraiment mémorisables, de parties de chant efficientes et éparses, et de structures mouvantes mais cohérentes. Sans se départir de sa misanthropie de fond, l’ensemble saisit la moindre opportunité, ne refusant jamais de calmer le jeu sans se disperser pour développer des thématiques amples et majestueuses, reposant la plupart du temps sur un ou deux axes largement suffisants (« Pulsating Nought »). Mixant allègrement les mélodies les plus pures aux accès de rage les plus intenses, ASCENSION poursuit la sienne vers les sommets du BM moderne qui en refuse les contraintes, et qui ne rechigne pas à adopter les contours d’un Heavy Metal lyrique et majestueux, sans rien perdre de son impact ou de sa vilénie. D’ailleurs, « Ever Staring Eyes » en témoigne après la courte intro « Garmonbozia », nous écrasant de son riff énorme et de son emphase sans ambages, avant de céder à une mise en place presque opératique nous renvoyant au premier effort du combo. Pourtant, et aussi patentes soient-elles par instant, les traces de Consolamentum s’estompent de plus en plus dans la forme, même si ce premier volet témoignera à jamais de l’émergence d’un groupe résolument à part. Mais les concessions observées par The Dead Of The World ne sont pas plus évidentes, puisque l’austérité à fait place à une euphorie de violence et d’harmonie, incarnée au travers de soli vraiment travaillés et de parties mélodiques ciselées parfaites de précision. La puissance et la délicatesse, tel est donc le mélange proposé par un LP aux atours précieux et uniques, qui confirme la prédominance de la machine anonyme sur sa concurrence directe.
Et si les sites référence osent le jeu de la comparaison multiple, rapprochant le groupe d’une kyrielle d’autres ensembles (ORLOG, KATHARSIS, ORDER OF ORIAS, WATAIN, DEVOURING STAR, DEATHSPELL OMEGA, ATRAMENTUM ou DODSENGEL pour les plus connus), autant avouer que le quintette germain n’a pas besoin de parrainage célèbre pour exister par lui-même. Et si chaque morceau apporte sa pierre au mausolée de dimensions dantesques, frappant du sceau de la majesté le rythme lourd hérité de BATHORY (« Ecclesia »), ou jouant des coudes rythmiques pour avancer plus rapidement et efficacement que la moyenne (« Thalassophobia »), tout le monde s’accordera sur l’importance des deux derniers segments, développant à eux deux plus d’un quart d’heure de musique. De « Stars To Dust » et ses accents acides déteignant une aura noire comme le jais, et osant des saccades purement Metal, à « Vela Dare » et ses effets déments qui permettent une intrusion volontaire dans le modèle opératique, ce final en feu d’artifice d’enfers torrides reste la plus belle conclusion qui soit, et rattache le groupe aux plus grandes références sans pour autant les coincer dans une petite case trop restrictive. Sur ce dernier titre aux allures d’au-revoir implacable, les allemands nous laissent sur une impression de plénitude, en catapultant leur BM dans une dimension occulte prenante et troublante, justifiant de fait cette si longue absence qui fut à n’en point douter indispensable à la gestation d’une telle œuvre. Mais en parvenant à trouver le juste équilibre entre ambition, efficacité, liberté et concision, ASCENSION nous prouve que sa marge de manœuvre était encore énorme, et laisse augurer d’un avenir où tout est encore possible. On se demande d’ailleurs jusqu’où ces musiciens pourront aller, tant Under Ether nous offre un éventail de talent qu’on ne sent que partiellement déployé, et qui pourrait transformer la bête en monstre sous nos oreilles.
Mais si le cap du troisième album est toujours un palier redoutable, il semblerait qu’on puisse le franchir avec une aisance déconcertante. C’est en tout cas la leçon à tirer aujourd’hui, en sus du plaisir apporté par un disque de Black Metal aussi riche et séduisant qu’il n’est revêche et violent.
Titres de l'album:
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