Vascular Labyrinth

Onkos

12/05/2023

I, Voidhanger Records

Loin de la standardisation actuelle, et proche d’une scène Avant-gardiste très active, le projet ONKOS propose un genre de melting-pot global entre plusieurs cultures…parfois très éloignées de la nôtre. Conçu comme un véhicule pour les idées farfelues et absconses de Robert Woods-LaDue, musicien/magicien créatif et ludique, ONKOS s’éloigne des sentiers rebattus par l’extrême pour se concentrer sur une hybridation entre le talent de Varèse et le culot d’un ZEAL AND ARDOR. Un Frank Zappa perdu dans l’univers iconoclaste de PUNGENT STENCH, qui joue le Death Metal comme s’il était une musique de carnaval, près des favelas de Rio, pauvre mais joyeux, enthousiaste mais subtilement résigné. Alors, poussez les portes de la connaissance, et faites celle de cet homme attachant, débordant d’idées, qui vous propose un voyage au pays de l’originalité et de la liberté.

Mais faites attention quand même. Explications.

ONKOS n’est pas à proprement parler un groupe de Metal, ni un groupe tout court d’ailleurs. Après avoir sorti son premier album éponyme, ONKOS s’est transformé en projet de scène regroupant treize musiciens en son sein. Des cordes, des percussions, des cuivres, de l’improvisation, et puis, patatras, COVID, confinement, isolation, et point final à ce qui devait être une tournée digne de ce nom. De fait, et en toute logique, privé de scène, Robert Woods-LaDue s’est remis à composer pour tuer le temps, et préparer une nouvelle campagne live affublé de lieutenants qui auraient eu leur place au sein de GONG, MAGMA, ou dans la troupe bigarrée des MOTHERS OF INVENTION.

Différent de ce fameux premier long qui traitait du problème du cancer, Vascular Labyrinth en a gardé le sens de l’impro, la liberté de ton, et l’envie d’aller un peu plus loin qu’un énième forfait tout compris entre nostalgie et actualité brûlante. Evidemment, cette démarche aliène au groupe une sacrée portion de fans potentiels, mais ceux qui oseront rester seront récompensés au-delà de toute espérance, tant cette musique étrange se veut tribale, agressive, fluide et culottée.

En témoigne ce line-up aux instruments incongrus (Dan Rosenboom - trompette, Cory Wright - saxophone/flûte/clarinette, Rob Ewing - trombone, Devin Smith - claviers, Robert Woods-LaDue & Richard Haig - chant, Mark Pascucci-Clifford - vibraphone/marimba, Robert Woods-LaDue - tout autre instrument), mais aussi cette batterie ou système de percussions inventé par Robert lui-même durant la pandémie, dans l’optique d’une représentation live au maximum des capacités. Un rêve étrange pour un résultat ne l’étant pas moins, et qui durant plus d’une heure, oppose un chant caverneux à des délires Free-Jazz, le tout entrecoupé de séquences libres à la guitare acoustique, pour un panorama global tenant tout autant du culte vaudou que de la défonce seventies en bonne et indue forme.

Je ne vous cacherai pas que l’écoute de ce second long est complexe, et qu’elle exige une ouverture d’esprit absolue. Inutile d’entrer pour jeter un coup d’œil, si vous ouvrez la porte, elle se refermera derrière vous. Très finement, et avec un sens de l’appât juteux, I, Voidhanger lance quelques miettes et espère attirer dans les filets d’ONKOS tous les esprits libres et les fans de Zappa, John Zorn et…GORGUTS. Gageons que ce dernier nom n’a été utilisé que pour souligner les rares passages brutaux de cette réalisation, histoire de raccrocher les wagons à une locomotive Death qui de toute façon, roule trop vite pour qu’on puisse lire son référencement.

Il y a une certaine forme de violence sur cet album, mais elle est tellement détournée et biaisée qu’on a du mal à l’identifier. Elle est évidente sur le cacophonique « Bethel », qui se replonge dans les années 70 pour proposer une sorte de Proto-Death hybride et maculé de cordes et de anches, mais le reste du temps, elle se cache sous le canapé pour ne pas être souillée par des envolées baroques/branques et jazzy, et ainsi conserver son intégrité virile. Mais ne vous leurrez pas, cette dite violence est clairement sous-jacente, et ne permet pas au projet de rester dans le giron de notre petite famille.

« Furoncles Bitumineux » vous expliquera ça mieux que moi, et sans parler. Dès ses premières secondes, le morceau mélange rythmes africains, accompagnement dadaïste, voix caverneuse et granuleuse, pour des aventures que l’on imagine exotiques, et qui pourtant ne quittent pas le sol des Etats-Unis. Cette originalité, si recherchée par certains artistes, parait ici d’un naturel désarmant, comme si Robert Woods-LaDue était incapable de composer un morceau straight, ses réflexes conditionnés le ramenant systématiquement à la déraison expérimentale et avant-gardiste. Il est donc de fait très difficile de définir cet art consommé du contrepied, autrement qu’en le conseillant aux âmes perdues et autres vicieux du non-conformisme.

Et sincèrement, qui d’autre que Robert pourrait accoucher d’un monstre protéiforme de la carrure de « Lucius » ? Dix-sept minutes ou presque qui broient LED ZEPPELIN, Varèse, et qui en tant qu’épilogue, nous laissent sur une sensation d’oppression, qui contraste avec cette liberté de ton prônée depuis le début d’un album/rêve/cauchemar collectif.

Je pourrais tout à fait comprendre que vous rejetiez cet exercice qu’on aurait pu imaginer concocté par Bill Laswell et Christian Vander, en hommage au père fondateur Zappa. Mais si vous faites un effort, vous pourrez constater que Vascular Labyrinth vous offre une pause salvatrice dans la routine de la production actuelle. Et sincèrement, cette pause fait un bien fou, même si elle oblige à se découvrir et à admettre des goûts étranges et déviants.

Mais la morale n’a jamais fait affaire avec les esprits libres et les âmes impures.    

                      

                        

Titres de l’album:

01. Awaken To The Sunset

02. Furoncles Bitumineux

03. Laktro

04. Lux'Lac

05. The Lamiae

06. Vascular Labyrinth

07. Bethel

08. Goodbye To The Light

09. Lucius


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par mortne2001 le 06/04/2023 à 17:15
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