La pochette ne fait pas grand mystère du message, et affiche la couleur. Un homme, aux poignets tranchés se regarde sans doute une derrière fois via son reflet sur l’eau, sorte de Narcisse du désespoir ayant décidé d’en finir avec la vie. L’image est forte, et en parfaite adéquation avec la musique de ce duo batave, sévissant depuis une bonne quinzaine d’années. Smaad et Stilte, les deux anonymes derrière ce projet connaissent donc bien leur potentiel, leurs envies, leur démarche et leurs attentes. On peut donc estimer qu’ARGWAAN est aujourd’hui parvenu à un niveau de plénitude et de professionnalisme respectable, ce que confirment les trente-trois petites minutes de ce troisième album studio, Violable.
Trois albums en quatre ans, voilà qui est productif, d’autant que chacun d’entre eux vaut son pesant de larmes et d’idées noires. Sur une trame de Black Metal acide et mélancolique, les deux musiciens ont brodé un canevas plus généraliste, qui cite tout autant le Shoegaze que le Post-Doom, par l’entremise de mélodies automnales séduisantes et contemplatives.
Parvenant donc à se montrer allusif à divers courants, ARGWAAN est difficile à ranger sur une étagère, d’où cette très vague et stupide appellation de Depressive Post-Black Metal. Si l’univers du Black Metal ceinture évidemment le projet de ses guitares lancinantes et de son agressivité naturelle, le contenu est parfois méchamment opposé au contexte. Ainsi, « Dartel de Duisternis In » se focalise sur quelques notes en son clair dont le son en échos fifties se met en parallèle avec les années 90, et l’émergence de KATATONIA, AMORPHIS, et autres excroissances bâtardes elles aussi très ardues à calibrer.
Un peu de Cold Wave, un peu de Post Punk, beaucoup de Black Metal, pour un cocktail amer qui cache un poison à effet lent. Violable n’est donc pas inviolable per se, mais difficile à décrypter pour ceux aimant les situations claires et les appartenances évidentes. Il faut vous y faire, mais le jeu en vaut les chandelles, allumées en pleine nuit pour une contemplation stellaire.
Excellemment produit pour ne pas perdre sa patine underground, ce troisième album est une étape critique franchie avec le brio nécessaire. Très loin de ces albums qui aiment vous faire croire que la vie ne mérite pas d’être vécue, et qui vantent les mérites d’une bonne lame de rasoir dans son bain, Violable décrit avec acuité toutes les difficultés à rester motivé par une existence morne, en précisant que la mort arrivera toujours assez tôt sans avoir à la provoquer.
D’où ce mélange des genres vraiment enthousiasmant, mais pas moins puissant pour autant. Avec un titre aussi ample et addictif que « The Undyed », le duo s’ouvre des portes pour aérer la pièce, et faire entrer un vent chaud qui rassure les chairs. Dopés par l’utilisation de riffs accrocheurs, les hollandais déjouent tous les pièges de leurs racines, et les transcendent pour ne pas rester immobiles. En utilisant avec beaucoup d’intelligence les accalmies et les silences, ARGWAAN ventile sa musique sans la disperser, et nous entraîne dans un sombre voyage aux confins de nous-mêmes, pour y trouver l’essence même de notre absence d’espoir. Abrasif mais intelligible, introspectif mais expressif, Violable ne se contente pas des sempiternels hurlements poussés d’une cellule capitonnée, et dénoue ses pensées avec une guitare en son clair, pour un moment de poésie pure (« Uit Het Dorre Hout Gesneden »).
Ces réflexes Post Black sont donc naturels, et renforcés par des ambitions désespérées. Le parangon étant atteint par le traumatique « Onstuimig », qui dessine avec force détails les névroses ressenties par une âme fragilisée, qui crie sa douleur alors que personne ne semble l’écouter. L’équilibre est vraiment parfait sur ce morceau, certainement le plus éprouvant de ce moyen métrage, mais aussi le plus riche et dense.
Il est évident que ce troisième album n’est pas le cadeau idéal pour les fêtes de fin d’année, à moins de vouloir la passer dans les pleurs, la nostalgie blessante ou les pensées morbides. « GemEinsam » ne s’écoute pas au pied du sapin lors de l’ouverture des cadeaux, et laisse le cœur secoué, par ces lignes vocales soudainement très typiques du DSBM.
ARGWAAN peut être satisfait de sa prestation, qui est inattaquable et exempte de faux-pas. Violable est un album très triste, très gris, mais aussi très pur et sincère. Une combinaison de sentiments et de valeurs contradictoires, pour une somme de ressenti lourde à porter. Seul, ou accompagné. Mais n’est-on pas toujours seul lorsqu’on est mal accompagné ?
Titres de l’album:
01. Violable
02. With Love and Self-Hatred
03. Dartel de Duisternis In
04. The Undyed
05. Uit Het Dorre Hout Gesneden (Interlude)
06. Onstuimig
07. GemEinsam
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
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Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30
Un bouquin est sorti là-dessus, "The Tape Dealer" de Dima Andreyuk ( fanzine Tough Riffs)...
10/02/2025, 15:31
Toute ma jeunesse.Mais franchement, je ne regrette pas cette période : Le nombre d'heures "perdues" à remplir des K7s et faire les pochettes bordel... ... ...
10/02/2025, 10:16
Um som genuíno e nostálgico.Eu olho para Um poema morto, com grande carisma, com a esperança de que a boa e velha desgraça dos anos 90 ainda respire. Abstract Existence, talvez, seja o &(...)
09/02/2025, 11:22
Je milite pour le retour de la k7 et les lecteurs cd dans les voitures . spotify et compagnie
09/02/2025, 10:28