Je la sentais bien cette affaire…Appelez-ça un sixième sens ou une capacité de discernement liée aux centaines de chroniques déjà écrites, mais je savais que j’avais affaire à un groupe un peu différent, mélangeant les courants sans se soucier d’une trop grande diversité susceptible de les éloigner d’une fanbase avide de précision et de purisme…
Et je ne me suis pas trompé. Une fois de plus serais-je tenté de dire, mais les Estoniens/Suédois d’OGNEMÖT ont vraiment sorti un premier LP qui risque de faire date dans l’histoire du Crust et du D-Beat à option Metal bien costaud et épais.
Pourtant, le créneau surchargé ne suggérait pas d’ouverture possible sur quelque chose de différent. Les mêmes tempi hérités de DISCHARGE, la même froideur des guitares, le même chant époumoné vociférant des textes anarchistes ou contestataires, on retrouvait toujours les mêmes composantes dans le rendu final qui finalement, ne s’éloignait que trop rarement des classiques.
Mais dans le cas de ce Vol.1, l’approche est résolument de biais, et plus large. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’au final, on ne sait pas vraiment à qui/quoi on a affaire, se demandant quand même si tout ça n’a pas un rapport ténu avec le Black le plus symphonique et le Death le moins rachitique.
Les OGNEMÖT selon leur bio viennent donc de Tallinn, Estonie, ainsi que de Stockholm, Suède. Ils sont trois (Art – guitare/chant, Dipton – guitare et Romcha – batterie), ont déjà sorti un premier EP en 2014 (Salvation Is Ognemöt, Destroy Sounds records, No Name records), un split avec les CONVINCE (Enrage Records, Street Influence), et donc ce premier LP à l’orée de 2017 qui laisse justement augurer d’une ouverture multiple possible pour le Crust et le D-Beat que ces trois-là n’hésitent pas à confronter à des genres tout aussi extrêmes, pour obtenir un résultat d’une puissance et d’une profondeur rare.
D’ordinaire, le Crust et le D-Beat se veulent lapidaires. Rapides, concis, s’exécutant autour des une ou deux minutes en se reposant sur des riffs précis et supersoniques, tandis que la rythmique cavale bon train pour assurer l’entrain.
Mais ici, les choses sont un peu différentes. Très différentes. Car la vision du Hardcore made in Estonie est plus radicale, plus « Metal » et surtout, plus brutale. A tel point qu’on se demande finalement si on a toujours affaire à du Hardcore, et pas à du Metal extrême qui aurait trempé son fiel dans une louche de Core bien tassée.
Au vu des racines du groupe, inutile de vous attendre à une nouvelle déflagration brute à la URSUT, KISHTIMSKI KARLIK, AGASIA ou KOHTI TUHOA. Et d’ailleurs, pour en avoir conscience assez vite, une simple écoute du monumental (dans tous les sens du terme) « Цунами Cтраха » suffit pour en être persuadé. Intro tonitruante au beat gigantesque et presque dancefloor, riff monstrueux qui rappelle les plus grandes heures du ENTOMBED le plus glacial, et surtout, mélodies amères enroulées autour d’une basse gironde et profonde qui appuie encore plus le groove maniaque d’une batterie qui rythme tous les temps façon Studio 54 de l’enfer. Cette déviation plombée éloigne d’autant plus le trio d’un Crust passe-partout, et leur permet de revendiquer des influences de Néo Death scandinave tout autant que d’Indus Metal US à la PRONG, avec quelques réminiscences de KILLING JOKE qui s’enfuient à l’audition de thèmes sombres et mélancoliques que PARADISE LOST aurait pu placer sur son dernier album.
Je vous parlais d’ouverture, et je ne vous mentais pas. A vrai dire, les OGNEMÖT à force de tout oser et de tout tenter, se veulent nouvelle inclinaison extrême, et naviguent en courants multiples, qui finissent par nous plonger dans une mer de sons en tourbillon.
La tendance se confirme sur tous les morceaux de ce premier LP. « Vottovaara » joue même la carte dangereuse de l’Ambient un peu fouillis, et refuse toute musicalité, avant de finalement laisser sa nature s’exprimer une fois de plus en lâchant un riff monumental à la MASTODON. Dans un mouvement de masse digne du Doom le plus impitoyable et du Sludge le moins à la ramasse, le trio s’enfonce un peu plus dans les profondeurs du malaise, pour oser le biais Sludgecore malsain et dense, à la limite d’un BM vraiment nauséeux et traumatique, sans aucune inflexion Core pour l’extirper de sa condition funèbre. Pourtant point de dépression à l’horizon, puisqu’aussi massifs et inspirés du SAB’ soient ses riffs, l’harmonie n’est jamais loin et l’énergie reste toujours le point de focalisation principal.
Etre lourd, gênant, oppressant et pourtant presque « positif » n’est pas donné à tout le monde, et d’ailleurs le clou est enfoncé encore plus fermement à l’occasion d’un sautillant « Red-eyed wurdalak » qui trempe son Crust et son Anarcho-Core dans une bonne dose de Death contrarié par des lignes mélodiques affirmées. L’amalgame peut sembler étrange et contre-nature sur le papier, mais il est tangible dans les faits et finalement, ce Vol.1 ne ressemble pas à grand-chose d’établi ce qui lui confère une aura mystérieuse mais efficace tout à fait remarquable.
Ce melting-pot d’influences marque même les morceaux les plus concis et radicaux, à l’instar de ce catapulté « Другой мир », qui profite une fois encore d’un riff plus complexe et harmonique pour proposer la rythmique la plus franche et échevelée sans perdre de son énergie bondissante aux arrangements étranges et mystiques.
« Grey alien legion eSStonia » en fermeture confirme l’excellente impression dégagée par ce premier LP qui décidément est vraiment à part, en reprenant toutes les astuces développées pour les pousser à un paroxysme de violence mélodique. Ce décalage constant entre une guitare enjouée et un chant absolument terrifiant mixé en arrière-plan produit un effet hypnotique, un peu comme si un groupe de Néo Punk apprenait les rudiments du Crustcore le plus corrosif en suivant une partition signée par UNLEASHED. Etonnant ? Difficilement envisageable ?
Et pourtant, c’est bien réel, et c’est enthousiasmant.
Mais écoutez pour vous en persuader définitivement. Je vous disais que je sentais bien cette affaire, et je ne m’étais pas trompé. En refusant le cloisonnement, les OGNEMÖT proposent quelque chose de vraiment nouveau, en utilisant des préceptes classiques qu’ils unissent au sein d’un même dogme libertaire. Et c’est bruyant, malfaisant et pourtant rassurant quelque part.
Une saine façon de ne pas domestiquer la fureur pour la confronter à l’émotion, sans forcer.
Titres de l'album:
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