Qu’à cela ne tienne, aujourd’hui, je change mon fusil d’épaule et abandonne provisoirement l’extrême et les déviances plurielles pour me recentrer vers cette musique qui a changé ma vie, alors que mon enfance n’était pas encore finie. Et c’est donc le Rock, le vrai, le costaud et sévèrement burné qui sera à l’honneur aujourd’hui, via l’un de ses plus anciens représentants français, en activité depuis les années 80, et injustement méconnu par les masses qui préfèrent manger ce qu’on leur sert dans leur assiette en papier mâché. Et si les guitares puissantes, les vocaux virils et les rythmiques solides sont votre passion, apprêtez-vous à vivre une nouvelle épiphanie décibellique avec le nouvel album des VISAVIS, qui prêche à la bonne paroisse, la seule, la vraie, celle de la distorsion, de la sueur, et des concerts joués avec les tripes. Et autant vous dire que ces trois-là ont la foi, eux qui ont commencé leur carrière il y a plus de trente ans et qui n’ont jamais abandonné la lutte. Des gilets jaunes de la cause musicale, sans compromis, sans prostitution triviale ? Mais oui messieurs dames, et leurs fans défendront leur honneur mieux que quiconque, eux qui les suivent depuis 1985 et leur première démo. Ils pourront donc vous parler de cette triplette de musiciens sans fard et pas crédibles par hasard, qui sans choisir un camp bien précis ont toujours brandi bien haut l’étendard d’un Rock sans étiquette, juste assez Hard pour intéresser notre quête, mais suffisamment abordable pour que le grand public ne les rejette. Le parcours de ces originaires de Tulle ressemble évidemment à celui de beaucoup d’autres héros modestes du Rock, entre des changements de line-up, des performances à inscrire dans les annales, des moments de flottement, des incertitudes, des doutes et des turpitudes, mais trente-trois ans après leur première émergence musicale, les VISAVIS sont toujours-là, profitant de l’aide de de leur municipalité, mais aussi de la confiance d’un public qui a investi ses deniers sur la toile pour leur permettre de transformer ce War Machine d’abord EP en LP, et ainsi nous permettre de découvrir neuf morceaux gorgés de guitares, d’harmonica, de textes personnels et à fleur de peau, et d’hymnes qui collent à la vôtre.
Ainsi, après plusieurs EP, albums, une probable signature chez EMI ayant entraîné l’enregistrement d’un LP en français, et des hiatus plus ou moins inévitables, Pierre Beyssac (basse, chœurs), Pierre Henri Traux (batterie) et Régis Bouyge (chant, guitare) s’en reviennent donc sur les routes et la nôtre avec ces neuf chansons honnêtes, qui sans promettre la révolution finissent par la faire de leur simplicité et de leur franchise avouée. Réduit à l’état de power-trio, le groupe corrézien en a profité pour se ressourcer et se débarrasser d’éventuelles scories, pour proposer des thèmes d’une sincérité touchante, résumant admirablement bien leur parcours, qui a parfois tenu de celui du combattant. Mais me direz-vous très justement, quel est le menu de ce nouveau longue-durée tant attendu ? Et bien je vous répondrai très brièvement que les VISAVIS continuent de jouer ce qu’ils nomment avec beaucoup de justesse du Power Rock, en gros, la quintessence d’un non-style qu’ils pratiquent depuis leurs débuts, et qui a justifié des concerts partagés avec Bill DERAIME, NOIR DESIR, les DOGS, ZEBDA, OTH, LILI DROP et beaucoup d’autres, dont les LITTLE BOB STORY avec qui ils partagent cet amour d’une musique authentique, celle dont les bases furent définies dès les années 60 par les STONES, les WHO, les SMALL FACES, puis plus tard les CACTUS, SIR LORD BALTIMORE, mais aussi la vague presque Punk française de la fin des années 70 et les résistants des années 80. LITTLE BOB donc, avec une pincée de la scène bordelaise des années 80, et des influences à la pelle qu’ils prennent un soin malin à dissimuler derrière une épaisse couche d’individualité, ce qui permet à leurs morceaux de sonner personnels et non pas empruntés. D’ailleurs aucune chance que l’un des membres de cette assemblée ne le paraisse, puisque tous jouent avec le cœur et l’âme, ce que n’importe quel chapitre de ce nouvel épitre prouve de la plus probante et brillante des façons. Et si parfois les anciennes silhouettes dégingandées des RAMONES semblent s’incruster, si les revendications pleines de bon sens d’OTH paraissent s’imposer, c’est plus par héritage indirect que par réelle volonté, puisque les VISAVIS savent ce qu’ils veulent jouer depuis qu’ils sont nés, ce que la calotte « Hey Jack », illustré d’un clip réalisé avec DLQC Tulle démontre en quelques riffs et soli bien troussés.
Basse ronde qui coule, guitare râpeuse qui houle, vox graineuse qui refoule, batterie en pulsions de foule, la recette est connue, l’approche éprouvée, mais le résultat est toujours le même. On se laisse entraîner, malgré quelques défauts qu’il serait malhonnête d’occulter. Certes, et j’en conviens, rien de nouveau sous le soleil, certes, et je l’admets, le chant en anglais est pénalisé d’un accent bien français, certes et je m’incline, certains riffs sentent quand même un peu le réchauffé, mais le tout est joué avec une telle envie qu’on accepte volontiers de passer l’éponge sur ces quelques petites erreurs. D’autant plus que les mecs n’hésitent pas à injecter un peu de mélodie dans leur hargne via le refrain de « Black Holes » qu’on retient sans le chercher, tout en restant focalisés sur une urgence de riffs qui ne sont pas sans rappeler certains côtés du VULCAIN le plus serein (« Give The Boys A Chance »). On pense parfois Stoner, on pense parfois Punk, mais on réfléchit un peu et on réalise souvent Rock, ce qui n’est pas surprenant au vu du rendu efficace et immédiat des neuf morceaux. Mais loin de se contenter d’une vision étriquée et puriste, les VISAVIS savent aussi taquiner d’autres rivages, lorsque leur esquif s’approche des côtes d’un Rock dansant et puissant (« Don’t Turn Around », qui mélange avec bonheur les DOGS et BLONDIE, parfait pour un samedi), ou lorsque leur sensibilité prend le dessus et leur permet de s’exprimer en toute pudeur autour du feu d’une power-ballad à l’harmonica nostalgique et aux arpèges intimistes (« Mine Tonight », le repos du guerrier après une tournée, mais beaucoup de finesse et ma préférée). Des variations donc, pour éviter de tourner en rond et de finir dans l’impasse pour de bon, et un son, souvent sec, mais parfois profond, ce qui permet d’éviter l’écueil de la démo professionnelle déguisée en album bon marché. Quelques chœurs saupoudrés, des burners bien montés (« So Special », en concert, ça va dépoter), des déviations bien amenées (« From L.A » subtilement américain, transposé dans un idiome corrézien, comme si Tulle et la Côte d’Azur ne faisaient qu’un), et un disque qui au final de sa petite demi-heure fait vraiment du bien.
Tout le monde ne partagera pas mon enthousiasme, je le sais bien, mais les amateurs d’un Rock charpenté et épais sauront reconnaître les leurs, et les VISAVIS, comme leur nom l’indique, sont des gens plutôt francs. Ils jouent du Rock, puissant, avec les défauts de ses qualités, et vont de l’avant. Et que les autres restent sur le bord de la route ne leur importe guère. Ils étaient là bien avant, et seront sans doute là bien après, aux commandes de leur War Machine, qui a de sérieux airs de Forever Rock Machine.
Titres de l’album :
01. Hey Jack
02. Black Holes
03. Give The Boys A Chance
04. Don’t Turn Around
05. Mine Tonight
06. Sound Soldiers
07. So Special
08. From LA
09. Rough Boy
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