Je l’avoue, je ne comptais pas forcément me jeter dessus. Bien que je n’aie rien à reprocher à un artiste comme Chris Impellitteri, il ne fait pas non plus partie de ma galaxie de musiciens incontournables, même si ses albums des années 80 ont tourné sur ma platine. Mais après avoir attentivement lu le mail promo de Frontiers, mon regard a été accroché par un line-up incroyable. Car outre Chris et l’incontournable Rob Rock au chant, on retrouve sur ce nouvel album la légende du ki(l)t Paul Bostaph, un de mes batteurs préférés qui a cogné chez EXODUS, TESTAMENT, SLAYER, FORBIDDEN, et plus récemment Kerry King. Ajoutez à la basse le fidèle James Amelio Pulli, et vous obtenez une formation de compétition, prête à en découdre avec toute l’énergie nécessaire.
Et il faut un sacré paquet d’énergie quand on baptise un album War Machine. Ce genre de nom à la U.D.O met le feu aux poudres instantanément, et exige une prestation furieuse de haute volée. IMPELLITTERI n’a jamais eu peur d’envoyer les watts, mais en 2024, le groupe semble animé d’une pulsion nucléaire susceptible d’alimenter en électricité une grande ville des Etats-Unis. Disons…Los Angeles par exemple.
Fraichement auréolé d’une intronisation au Heavy Metal Hall of Fame l’année dernière, Chris revient donc avec onze nouvelles compositions, histoire de mériter tous les prix reçus durant sa longue carrière. Et si d’apparence, War Machine ne semble rien apporter de neuf à la cause, son contenu réserve quelques bonne surprises, et surtout, une mise en place d’horloger amoureux de ses rouages.
Avec trois compagnons de route aussi capés, Chris s’est donné les moyens de ses ambitions. Si le fond est classique, autant qu’un excellent album de Power Metal peut l’être, la forme est éblouissante et le maestro volubile. Le nombre de soli incroyables est évidemment très élevé, le pistolero passant en revue toute la gamme de techniques possibles, s’inspirant du classique pour se rapprocher de l’influence de Malmsteen et de Ritchie Blackmore. Comment le prolixe guitariste a-t-il envisagé la gestation de cette déclaration de guerre ? Chris nous l’explique lui-même, sans détour inutile :
Cet album a été très excitant à enregistrer avec mes collègues Rob Rock, James Pulli, Paul Bostaph, et nos techniciens Mike Plotnikoff, Jun Murakawa, et Jacob Hansen! Cette musique décrit avec acuité notre situation aujourd’hui, émotionnellement et techniquement. C’est probablement l’album le plus sincère que nous ayons fait parce que nous avons juste joué la musique qui nous a émus, sans courir après les modes ou imiter d’autres groupes. Nous avons vraiment tout donné!
Evidemment, chaque nouvel album est « le plus », « le meilleur », « le moins », mais après écoutes répétées de cette tornade, autant dire que l’enthousiasme de Chris est amplement justifié. Rarement IMPELLITTERI aura sonné aussi motivé et puissant, allant même jusqu’à chatouiller nos nerfs thrashy si souvent déridés par notre cher Paul Bostaph. Le batteur, un peu bridé en vitesse par rapport à ses implications antérieures en profite pour marteler un mid tempo solide, tout en titillant sa grosse caisse lorsque l’ambiance se réchauffe dangereusement. Le batteur a vraiment apporté une plus-value au groupe, et on reconnaît sans forcer ses fills diaboliques et ses descentes si fluides, tout comme sa frappe ferme et autoritaire. De là, Chris n’avait plus qu’à lâcher ses riffs les plus virils pour enfiler le costume de son choix. Un costume en cuir évidemment, plutôt moulant, qui brille sous les spotlights dès l’explosion de « War Machine », title-track atomique et imparable.
La suite découle d’elle-même. Des morceaux forts, avec des mélodies prononcées, le menu préféré du label italien qui aime autant l’agressivité que la souplesse harmonique. Dans la plus droite lignée d’un PRIMAL FEAR ou d’un mélange SINNER/NITRO, IMPELLITTERI cumule technique et adresse d’écriture, pour permettre à Rob Rock de faire étalage de son talent vocal intouchable et inaltérable.
Cet album a donc des airs de best-of déguisé, tant tous les titres dégagent un parfum particulier. Si le son est volontairement énorme et épais, avec une place enviable laissée à la guitare, il laisse aussi quelques espaces pour que l’émotion joue son rôle à la perfection. Mais cette dernière sait se faire discrète, et apparaitre à l’occasion d’un refrain fédérateur, comme celui de « Beware the Hunter », avant de disparaître pour laisser le Heavy frapper un grand coup dans le dos (« Light It Up »).
Parfois très proche d’un PRETTY MAIDS des temps modernes, War Machine n’hésite pas à faire dans le clinquant, avec une équipe de mercenaires au parcours exemplaire. Il faut du flashy, du groovy, mais surtout du Power et du Heavy, pour mettre le public sous pression avant la prochaine tournée de saison. Et tout ça donne vraiment envie d’y être et de suer de tout son être, tant on sent que le groupe n’a qu’une envie, nous aborder pour nous soumettre.
« Out of My Mind (Heavy Metal) » fera obligatoirement partie de la setlist, tant il respire la passion pour ce genre qui n’est jamais tombé en disgrâce, tout comme « Wrathchild », qui s’il ne dépasse pas la méchanceté de son homonyme MAIDENien, garde quand même une posture tout à fait impressionnante. Mais à vrai dire, n’importe quelle entrée de ce War Machine est une bête live qui ne demande qu’à grogner et griffer. Tout en continuant à riffer, le talent de Chris ne s’est toujours pas émoussé, et ses réflexions musicales sont toujours aussi convaincantes.
Welcome to the Inferno Metal Wall of Hate.
Titres de l’album :
01. War Machine
02. Out of My Mind (Heavy Metal)
03. Superkingdom
04. Wrathchild
05. What Lies Beneath
06. Hell On Earth
07. Power Grab
08. Beware the Hunter
09. Light It Up
10. Gone Insane
11. Just Another Day
Site officiel
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