25 juin 2015, une date qui ne signifie rien de particulier pour vous, et qui pourtant est restée gravée dans ma mémoire. Ce jour-là, sans doute ensoleillé, sans doute anonyme à bien des niveaux était extraordinaire pour moi, dans ma petite vie de chroniqueur. Je m’attelais en effet à l’analyse du quatrième album d’un groupe qui avait tellement compté pour moi que l’émotion me tenaillait au moment de coucher sur clavier mes impressions. Pensez-donc, je n’aurais jamais pu penser avoir la chance de faire mon boulot et planter mes dents dans une œuvre de ce groupe autrement qu’en me penchant sur son passé. Car ils avaient été clair, car ils avaient mis un point final à leur aventure, et parce que c’était l’un des combos qui m’avait le plus inspiré dans les années 90. J’étais pourtant comme tout le monde cette décennie-là, j’avais embrassé la vague de Seattle avec bonheur, célébré les PEARL JAM, NIRVANA, ALICE IN CHAINS, j’avais adoubé le couronnement Metal des PANTERA, accepté la nouveauté Nu-Metal des KORN, DEFTONES. Mais il y a avait quand même un collectif qui planait encore à des hauteurs inégalables pour tous les autres, un collectif de musiciens si énervés qu’ils n’hésitaient pas à mélanger le Metal, le Punk, le Hardcore, les sons électroniques, pour servir une rage non conventionnelle sur un plateau de haine, via une des trilogies les plus importantes de l’ancien siècle. Et surtout, l’un des disques les plus colériques, les plus inventifs que le Punk et le Hardcore aient pu connaître de leur vivant, pour peu qu’on anticipe leur mort. Ce The Shape of Punk to Come qui avait traumatisé les anarchistes de la mémoire au point de les faire s’agenouiller devant la bête, ANTHRAX, pur jus Metal en reprenant même le tube de l’impossible en live au Hellfest. Tiens, les REFUSED ont joué au Hellfest d’ailleurs après leur reformation, pour l’un de ces concerts incendiaires dont seuls eux ont le secret. Et quatre ans après la claque Freedom, on espérait que la lutte continue, et que la dénonciation se fasse encore plus virulente. Telle était leur mission, ils l’ont acceptée, et relevé le défi avec War Music. Et rarement un album aura aussi bien porté son nom…
Dennis Lyxzén, charismatique leader, avait prévenu les masses. REFUSED s’apprêtait à enregistrer l’album qu’ils auraient dû enregistrer la dernière fois, comme s’il balayait d’un revers de mépris le travail accompli sur Freedom. De son côté, David Sandström, atomique percussionniste, avalisait les digressions sur la validité de cette assertion, en assumant la guerre menée par les guitares contre les amplis, la guerre menée par la batterie contre les guitares, et celle menée par la musique et les textes contre leur époque. Evidemment, le discours n’a pas changé, les paroles sont toujours autant de jets de bile à la face de la société, des inégalités, des atrocités commises au nom du protectionnisme, du racisme, de la haine, et ce rejet du capitalisme qui avait fait la force fédératrice du groupe dans les années 90. Comme les DK, comme MINOR THREAT, comme Bob MARLEY, les suédois sont concernés, et le seront toujours. Néanmoins, et pour une fois qui n’est pas coutume, je les contredirai avec fermeté. Freedom était l’album qu’ils devaient enregistrer back in 2015, et le seul retour possible par la grande porte, celle qu’ils avaient empruntée en loucedé fin 90’s pour se barrer sans trop faire de bruit. Le bruit aujourd’hui est toujours aussi mat et blanc, et n’en déplaise à ces messieurs, n’en déplaise à tous les chroniqueurs s’étant engouffrés dans la brèche, War Music n’est pas plus The Shape of Punk to Come que Freedom ne l’était. Ils semblent d’ailleurs tous les deux construits sur le même moule, avec cette adaptation à des standards modernes pour ne pas nous faire le coup de la nostalgie d’anarchistes souhaitant comprendre les désirs de leur époque, mais restant fermement enracinés dans un passé qu’ils pensent plus crédible et authentique. Difficile de rivaliser avec un tel glaviot d’intelligence, et pourtant ce cinquième album essaie de toutes ses forces de recréer les sensations éprouvées en 1998 lorsque « Worms of the Senses / Faculties of the Skull » nous avait chatouillé les tympans de son crossover général mais tout sauf générique. A vrai dire, s’il faut trouver une inspiration pour parler de ce nouvel album, il serait judicieux d’y associer Freedom et les premiers efforts du groupe, plus immédiats, moins sophistiquées, plus radicaux et viscéraux. On s’en rend rapidement compte en tendant les oreilles, mais en constatant aussi que le quintet (David Sandström: batterie,
Dennis Lyxzén: chant, Kristofer Steen: guitares, Magnus Flagge: basse et Mattias Bärjed: guitares) a réduit sa contribution en condensant sa colère de dix minutes pour à peine passer la demi-heure. C’est donc la guerre éclair que le combo cherche à faire, taper un grand coup puis repartir ailleurs y mettre le feu, ce que « Rev 001 » confirme après une intro harmonieuse et trompeuse, avant de lâcher les chiens de la revanche sur des oreilles plus vraiment préparées à ce genre d’attaque. Riff énorme, cri lâché par Dennis avec véhémence, concentration du son, plus métallique que jamais, pour une démarcation des RAGE AGAINST THE MACHINE sur tempo élastique et chaloupé. Impossible ici de ne pas voir la continuité du travail de retour entrepris sur Freedom, puisque l’optique est la même, et la production globale - bien que plus vaste et claire - aussi. Rien de neuf sous les matraques de l’oppression ? Non, mais toujours cette rage juvénile qui ne deviendra jamais adulte.
Produit par Martin Ehrencrona, War Music est une sorte de back to basics qui accepte le présent, mais n’oublie pas l’avenir. Instantané comme les premiers albums du groupe, carré et peaufiné comme leurs plus grands achèvements, il est une sorte d’entre-deux qui pourrait laisser dubitatif. Car on attend toujours plus des héros de la révolution, de ceux qui ont instauré et lancé un mouvement, et à qui on ne laisse rien passer, parce qu’on sait qu’ils ont la capacité de changer les choses. Thématiquement, les REFUSED cherchent toujours le conflit, et pointent toujours du doigt ce qui ne va pas. Les migrants, les réfugiés, la montée des extrêmes, l’égoïsme du peuple, son inconscience face à la dérive écologique, les gouvernements au comportement totalitaire, War Music est un énième recueil de pensées anarchiques, pour construire un monde meilleur, ou au moins essayer. Musicalement, il n’apporte rien de neuf non plus, se contentant de recycler avec brio des recettes déjà utilisées de nombreuses fois par le passé. Cette alternance entre le radicalisme du Hardcore solidifié d’une musculature Metal, cette précision dans les attaques, cette guitare qui essaie tout ce qu’elle peut pour faire passer son message, et évidemment, ces assouplissements à la lisière d’un Rock plus traditionnel qu’on adore. Sur « I Wanna Watch The World Burn », évidemment, presque un tube en langage Punk, sur « Malfire » qui range la distorsion pour qu’elle se fasse plus discrète, avec toujours ces chœurs en départ de feu qui grondent sous l’apparent calme. Mais REFUSED, ce sont aussi et à jamais ces soudaines crises de colère qui collent aux principes fondamentaux du Hardcore le plus intelligent, celui-là même que les suédois ont anobli de leur vivant. On le sent bien sûr via l’électrique et explosif « The Infamous Left », et encore plus sur le presque D-beat « Turn The Cross », qui profite de l’héritage national pour corser les débats. Joli adaptation de la folie intrinsèque de LARD, ce morceau est ce que le groupe a fait de plus virulent depuis « The Refused Party Program », et une preuve s’il en fallait une qu’ils n’ont rien perdu de leur foi et de leur énergie adolescente.
Ce qui ne les empêche nullement de jouer la référence directe avec « Death In Vännäs », qui n’aurait pas dépareillé sur l’album que vous admirez tous, ni de sonner plus Metal que jamais sur « Blood Red ». Ce qui ne les empêche nullement de continuer à faire ce qu’ils veulent, sans plus passer pour les leaders qu’ils furent autrefois. Peut-être que ce statut était un fardeau à porter, et puis après tout, lorsqu’en trois albums, on a révolutionné un ou plusieurs genres, il devient inutile de continuer à prouver sa valeur. Celle des REFUSED est ajoutée, et sans se bonifier avec les années, ne se dément pas.
Titres de l’album :
01. Rev 001
02. Violent Reaction
03. I Wanna Watch The World Burn
04. Blood Red
05. Malfire
06. Turn The Cross
07. Damaged III
08. Death In Vännäs
09. The Infamous Left
10. Economy Of Death
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