Je vous avais prévenus à l’occasion de la sortie d’At The Walls. ENFORCED incarnait l’espoir le plus fou de la nouvelle scène Thrash américaine, et n’allait pas tarder à devenir la référence qu’on connaît aujourd’hui. Car entre temps, le combo de Richmond en Virginie nous a joyeusement assommés d’un Kill Grid assassin, repartant se terrer pendant deux ans avant de nous agresser de nouveau. La marge de progression du quintet était encore grande, et la publication d’un troisième tome des jeunes mémoires de ces marsouins violents se devait d’asseoir définitivement une réputation que beaucoup jugeaient immaculée et méritée.
En 2023, la bande (Will Wagstaff & Zach Monahan - guitares, Knox Colby - chant, Ethan Gensurowsky - basse et Alex Bishop - batterie) revient chargée à bloc, les accus pleins et la pugnacité en étendard. Depuis soutenu par la multinationale du chaos Century Media, le groupe se présente sous un jour propre, costaud, carré aux entournures, et toujours aussi professionnel dans la gravité de ton. Si At The Walls semble toujours inégalable d’un point de vue intensité, la propreté de son permet aux américains de revendiquer leur place sur le podium du Néo-Big4, entre POWER TRIP, GAMA BOMB, VEKTOR et MUNICIPAL WASTE. Sauf que ces gus-là ne sont pas là pour amuser la galerie, mais bien la faire trembler.
Toujours à mi-chemin du SLAYER historique et du CRO-MAGS avec une grosse trique, ENFORCED enfonce son crossover dans l’oignon d’un Thrash nostalgique de moins en moins grognon, et nous coupe les pattes de ses accélérations dantesques et de ses riffs funestes. Entre Hardcore velu et Thrash repu, War Remains est une guerre menée contre le Metal édulcoré, celui qu’on nous sert à longueur d’année. EXCEL, DBC, EROSION, les mentions sont légion, mais l’attitude est la même : franchise, violence, puissance et confiance. Et celle affichée par le quintet a de quoi faire suer tous les cadors du genre qui se reposent non sur leur muguet, mais sur leurs lauriers fanés depuis longtemps.
J’ai complètement craqué pour ce groupe il y a des années, et je maintiens ma position. J’ai vu en ces musiciens les héritiers directs de la scène la plus Metal de Venice, comme un SUICIDAL TENDENCIES Thrash encore plus féroce sans ses bandanas. Musicalement classique, la formation dégage une intensité au moins équivalente à celle d’un millier de turbines produisant de l’électricité pour une ville de cent mille habitants. Et comme le son s’est affiné avec le temps, les attaques n’en sont que plus précises et violentes, ce qui rend la chose encore plus engageante.
Knox Colby crache toujours son venin d’un timbre rauque et revanchard, profitant de l’aisance de la paire Will Wagstaff/Zach Monahan pour phraser méchant et râler de l’avant. Les trois hommes, noyau dur du groupe sont toujours aussi en phase, même si la fluidité s’est accentuée depuis 2019. Les amateurs de mélange explosif seront donc toujours aux anges, d’autant que l’album affiche une montée en puissance tout simplement ébouriffante.
On louvoie toujours entre passages en Metal rude et éprouvant et envolées véloces pour enfants féroces, et le mélange atteint aujourd’hui un degré de perfection rarement atteint dans le style. Entre brutes épaisses et esthètes de la croche, les ENFORCED déclarent donc la guerre au Thrash photocopié et timoré, dont le noir et blanc baveux n’effraie plus personne depuis longtemps. Bien loin du duplicata habile mais opportuniste, War Remains évoque les tranchées, les combats à mains nues, les drones, les frappes chirurgicales, le sang qui coule sur une terre gorgée de mort, et les balles qui fusent aux oreilles.
Cette ambiance pour le moins oppressante est formidablement bien traduite par un instrumental saccadé et un phrasé vocal syncopé, comme un Hardcore métallisé qui défonce les portes au lieu de les ouvrir. On en prend immédiatement acte via « Aggressive Menace », qui en moins de trois minutes nous inflige une dizaine de patates en pleine gueule. Là est l’art consommé de la bande pour dynamiter les convenances, et se passer de présentations. Après tout, avec deux albums référentiels dans la besace, ENFORCED peut très bien se dispenser de formules de politesse et afficher une morgue justifiée.
On se laisse donc aller à ce tangage extrême, qui aplatit les breaks pour nous briser les noix (« Mercy Killing Fields », « War Remains »), et qui nous accule comme une dizaine de tentacules près du mur de l’asphyxie. Entre développé/couché à la fonte compacte et biceps travaillés à la force du mental (« Nation of Fear »), War Remains compte les blessés et les tombés au champ d’horreur sans faire de sentimentalisme. Le but étant de garder la violence intacte pour la reproduire à l’identique en musique.
Cet album est aussi bon pour la santé mentale qu’il n’est dangereux pour la santé physique. Car lorsque les américains se décident à exploser le compteur Geiger (« Ultra-Violence », le bien-nommé), les muscles se tendent et se crispent, les mains agrippant n’importe quelle poignée.
Une fois encore, ENFORCED nous bouscule sans ménagement, au point de nous faire douter de nos constats passés. Et si, en effet, ce groupe frondeur et hurleur incarnait la quintessence d’une vague Rétro-Thrash depuis longtemps dominée par les références déjà citées ? Car avec cette basse coulée et coulante, et cette façon de recycler les mélodies menaçantes et grinçantes de SLAYER, ENFORCED synthétise le meilleur d’une scène qui se complait souvent à se regarder le nombril.
Il reste donc des musiciens qui pensent qu’ils ont des choses à prouver, et qui le font avec l’art et la manière. Réveillez-vous, l’album de Thrash de 2023 est déjà parmi vous.
Titres de l’album:
01. Aggressive Menace
02. The Quickening
03. Hanged by My Hand
04. Avarice
05. War Remains
06. Mercy Killing Fields
07. Nation of Fear
08. Ultra-Violence
09. Starve
10. Empire
En France, sa mère serait tout sourire sur un cross volé devant les caméras en train de dire "qui n'a jamais fait un refus d'obtempérer".
03/05/2025, 19:37
Ou alors personne n'aurait sorti de flingue, et ça aurait fini autour d'un pastis.
03/05/2025, 16:30
Faut dire quand même qu'il n'y a rien d'plus soulant que de ramasser des putains d'feuilles hein...Surtout si c'est celles de l'aut' con !
03/05/2025, 10:09
Oui je n'avais pas précisé les causes de la mort... C'est tellement cliché comme mort pour un ricain
03/05/2025, 08:34
“According to The Daily Journal, Montana was involved in a dispute with his neighbor in South San Francis(...)
03/05/2025, 08:09
Armé et dangereux, il a été flingué par la police de SF. Visiblement il est allé jusqu’au bout du concept du nom du groupe..
03/05/2025, 08:03
Oui les subventions il suffit d'un pas qu'ils perçoivent de travers (ce qui n'est pas forcément le cas dans une scène) et t'es hors système. C'est un immense problème, peu importe ou l'on se situe économiquement, dans le syst(...)
01/05/2025, 23:51
Je suis sur le dernier de mon côté, Malignant Worthlessness, sorti cette année. Du tout bon, même si il n'y a plus l'effet découverte "c'est qui ces tarés !?"
01/05/2025, 22:41
Tout le monde voyait bien ces difficultés dans l’activité de la salle depuis la pandémie, et j’étais au courant par plusieurs biais des soucis d’un autre ordre. Les lecteurs de Metalnews savent bien que je suis un habitué des lieux depuis vingt(...)
01/05/2025, 21:22
Je sais bien que je tourne en rond mais le principale problème c'est le manque de renouvellement du public, autant j'ai maudit ces courant type metalcore/deathcore, ils apportaient un nouveau public. Je suis trentenaire et parfois je me sens jeune dans un concert black/death meta(...)
01/05/2025, 19:06
Le nouveau line-up est top ! Mais le morceau ne me fait pas grimper au rideau... Finalement j'aime Suicidal quand c'est plus Metal que Punk, avec les solis magiques de Rocky George. Bref, je suis un nostalgique, et même si je serai intéressé pour revoir le groupe sur(...)
01/05/2025, 17:54
Qui écoute encore cet album en 2025? Groupe que je découvre que maintenant... Quel album ! Tourne en boucle
01/05/2025, 16:57
Bah c'est très moderne en effet et malheureusement, je ne sais pas si le public de ce style en core est très assidu aux festivals. Au-delà du fait que le niveau de popularité des groupes soit un ton en dessous par rapport au passé glorieux du festival. Mais(...)
01/05/2025, 09:15
Il y a vraiment un problème de la place de la culture dans notre société...
01/05/2025, 09:11