Une petite partie de rugby à cinq, ça vous tente ? Mais méfiez-vous, en dépit d’une équipe réduite, les opposants s’y connaissent en placage bien brutal, et risquent de vous laisser à terre la gueule reniflant l’enfer du bout des narines.
Pourquoi cette question hors contexte ?
Pas tant que ça, puisque nos belliqueux du jour viennent de Rugby, UK, qu’ils jouent un Metalcore assez puissant, et que finalement, l’analogie était trop tentante pour ne pas la caser en préambule.
Là, vous me direz, « Encore du Metalcore ? Mais nous croyions, jeunes naïfs que nous sommes, que tu détestais cette musique de jeunes affolés ? Nous aurais-tu menti vieux décati ? »
Et vous n’aurez pas complètement tort.
Mais que voulez-vous, bonnes relations avec les labels oblige, je me suis penché sur le cas des presque nouveau-nés de WARS, un peu par obligation et hasard, et surtout intrigué par une pochette sublime, signée du trait de Costin Chioreanu, du collectif Twilight13media, déjà responsable de quelques visuels pour des pointures telles que AT THE GATES, DAKTHRONE ou MAYHEM. Belles tonalités de rouge orangé et de vert irisé, et graphisme en adéquation avec l’intitulé, tout ça avait grave piqué ma curiosité au point que je me mette à parler du premier effort des Anglais de WARS.
Bon, mais une fois la musique assimilée, j’ai dû me rendre à l’évidence.
Oui, malgré sa pochette sublime et son titre énigmatique, We Are Islands, After All n’est qu’un énième disque de Post Hardcore/Metalcore moderne, avec tous les tics inhérents à sa pratique, sa dualité vocale typique, et ses énormes riffs lâchés comme à la parade de la fausse brutalité.
Malgré un concept visant à illustrer le conflit permanent opposant la tête et le cœur battant, ces cinq anglais (Rob Vicars – chant, Sam Barnard – guitare & chant, Lee Tysall – batterie, Matt Burns – guitare et Rich Bennett – basse) préfèrent rester sur la terre ferme plutôt que d’affronter les vents violents de la côte, et ne prennent aucun risque en juxtaposant la mélodie et la puissance d’une façon standard, de celles qu’on a déjà entendu des centaines de fois, en plus ou moins convaincant.
Reste qu’ils injectent dans leur musique une bonne dose de passion à défaut de chercher le petit truc proposant des options. Ils jouissent bien sûr d’une production énorme, signée par le cador Matt O’ Grady (DEAF HAVANA, YOU ME AT SIX, DON BROCO), épaulé par l’ingé-son Alan Douches pour le mastering ricain, mais en dehors de tous ces impératifs d’efficacité, point de salut en dehors de morceaux très formatés, qui restent dans les traces des aînés, sans chercher à les défier. Dès lors, le festival les honore, mais la parade à des airs de déjà-vu, avec des cotillons aux couleurs un peu passées et des chars en préfabriqué. Grosses guitares bien graves, rythmique en marteau-pilon élastique, breaks qu’on sent venir de loin et basse qui ronfle dans un coin, la recette est classique, et fonctionne quand même pourvu que le style vous soit familier et apprécié.
Inutile de recenser ici toutes les références qui vous aideront à les situer en amont, puisque la liste serait trop longue et ne serait d’aucune utilité.
Sachez simplement que les chansons en sont, que ça joue mais tourne un peu en rond, et que ce premier jet ne me réconciliera certainement pas avec le style. Certes, je reconnais que quelques morceaux valent la peine d’être un poil disséqués, comme ce très rappé « Hills and Boulders », plus costaud que la moyenne et flirtant même avec un Néo Metal/Hardcore hors d’haleine, ou ce très emphatique « Salt Flat Sailing », offrant un featuring de Josh McKeown, qui appuie un peu plus sur les cordes, et offre des passages mélodiques un peu plus sensibles que les précédents.
L’ouverture tonitruante de « The Art of Not Knowing » n’est pas non plus déroutante, et place dans le contexte sans tourner autour du pot, avec son riff redondant et sa rythmique bondissante. Il est aussi un des rares où la basse se voit offrir une tribune un peu plus profonde, ce qui offre un surplus de dynamique classique, mais qui fait bien vibrer les pavillons.
Citons aussi le final « Charcoal Days », plus intimiste et harmonique, choix étrange d’ailleurs pour fermer le chapitre en tournant le dos à la brutalité plastifiée, qui contrairement à ce que son timing semble indiquer, ne dure pas un quart d’heure, mais s’éteint brutalement après quelques minutes dans un shunt discret.
Shunt brisé dans son élan de silence à 10’’55, pour offrir la véritable chute, dans un dialogue Rap/guitares sombres, évoquant un mélange intéressant entre un Metalcore glauque et un Hop à la EMINEM pas inintéressant du tout, qui d’ailleurs fait salement regretter que les WARS n’aient pas suivi cette piste plus tôt.
Je l’admets, le genre n’étant pas ma tasse de café, je suis certainement assez mal placé pour juger d’un premier album qui ne fait rien pour me tromper.
Si vous êtes à mon opposé, accro à ces gros licks costauds et à ces pulsions en coup de marteau, il est certain que vous trouverez votre bonheur sur ce We Are Islands, After All. Mais vous regretterez sans doute un son un peu aseptisé et une basse légèrement sous-estimée, qui aurait mérité un regain de coulé et frappé, notamment dans les phases de descente vers les downtempo.
Un premier effort qui en aurait mérité quelques-uns, ne serait-ce que pour se mettre à la hauteur de sa pochette et de son intitulé qui fait travailler la tête.
Et si après tout, nous sommes des îles, celle des WARS semble encore un peu trop isolée dans l’océan pour qu’on la remarque et la trouve sans sextant. Pas forcément excitant comme voyage, mais rapide et efficace. Ce qui est peut-être tout ce qu’on leur demande. Mais si le cerveau et le cœur sont en lutte permanente, leur guerre ainsi mise en musique ne ressemble pas vraiment à un combat sanglant. Juste un conflit d’intérêt dans lequel vous ne trouverez pas forcément le vôtre.
Titres de l'album:
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