Petit détour par l’Angleterre, direction Manchester pour assister à l’accouchement du premier album des locaux de GHOST KEEPER. Fondé en (?), ce collectif enragé nous a d’abord mis la tétine à la bouche via deux formats moyens, Everything and Nothing et Ghost Keeper, tous deux sucés en 2020. La recette de la salsa Thrash par ces anglais teigneux ? Un compromis habile trouvé entre le Thrash old-school et le Groove plus nineties, avec toutefois, un équilibrage des ingrédients qui penche du côté le plus épicé. Pas mal de nostalgie donc pour remplacer les forceps, et un premier long qui ne l’est pas tant que ça, restant sous la barre de la demi-heure, tout en hurlant comme un damné d’avoir été retiré de sa couche intracorporelle.

Une fois la bestiole sortie de ses chaudes entrailles, on remarque son caractère passablement énervé et son envie de s’exprimer plus fort que les autres. Niveau apparence, le rejeton se l’est jouée classique, avec ces sempiternels tons verdâtres que l’on retrouve sur le teint d’une bonne moitié des mouflets rétro-Thrash actuels, soit un classicisme de rigueur au moment de juger de la pertinence de cette naissance.

Peu d’infos à se mettre sous la dent au niveau des parents, si ce n’est citer leur nom, soit Darren Pugh (batterie), David Ashley Dee (chant) et Stephen Platt (guitare, qui a accompagné le seigneur Devin Townsend en concert). Manque à l’appel un bassiste que l’on entend pourtant bien sur ce We Conquer!, à la pochette gentiment potache et explicite. Un beau majeur tendu aux civilisations extraterrestres venues pour éventuellement nous coloniser, avant de constater la stupidité de cette population servile à loisir.

Mais en attendant une éventuelle venue de petits hommes aussi verts que cette pochette, GHOST KEEPER nous propose une bande-son digne à leur invasion. Une bande-son éminemment formelle, à base de Thrash de la Bay-Area appliqué à un son plus groovy des nineties, avec quelques réminiscences du PANTERA le plus agressif, le tout sous couvert d’une saine rage de la nouvelle génération des GAMA BOMB et autres chantres d’une violence joyeuse et souriante.

De la linéarité dans l’urgence, du statisme de l’engeance, pour un résultat qui pourrait ressembler à n’importe quelle sortie du cru, dans un créneau de qualité supérieure. Des riffs qu’on a déjà entendus, des rythmiques franches et pas de coup tordu, voilà le menu, salé, légèrement corsé, mais qui s’avale sans faire tousser. Un genre de synthèse de tout ce qui se pratique à notre époque, la fluidité, les cassures inopinées, de la prévisibilité, mais un entrain qui se fait remarquer. De quoi s’occuper entre deux mises à bas plus cruciales, et si la mise en bouche « We Conquer » vous sied et laisse une sensation agréable à votre palais, sachez que le reste des aliments est du même tonneau, ce qui vous permettra de tout avaler sans vous méfier.

Originalité zéro, mais énergie et tempo chaud. Avec un batteur capable, un guitariste qui connaît son métier, et un chanteur qui vocifère Death (« They Must Suffer »), les GHOST KEEPER ont une assise solide, qui repose toutefois sur des principes d’emprunts aux valeurs les plus sures. Un peu de SLAYER, un peu de GAMA BOMB, un peu de MUNICIPAL WASTE, on secoue le tout dans un shaker radioactif, on y ajoute une pincée de sel en soli performants, et tout ça donne un premier album délectable, légèrement réchauffé, mais aux saveurs conservées.

Pas de ratés ni de grain de sable dans la machine, tout pour la vélocité, des attaques simples mais efficaces (« Guillotine »), pour un groupe bien dans son époque, bénéficiant d’une production claire et d’une attitude sincère. Un accouchement sans douleur donc, mais sans péridurale, à l’ancienne.

Titres de l’album:

01. We Conquer

02. Fuck Off And Die

03. Digital Lobotomy

04. Warmaster

05. Attack!

06. They Must Suffer

07. Guillotine

08. Unspeakable

09. The Blasphemous One

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