What We Left Behind

Thyrant

12/05/2017

Indie Recordings

« C’est quoi ta came à toi ? »

« Moi ? Plutôt la NWOBHM, et le bon Heavy des années 80. Les gros riffs, les harmonies à la tierce, les soli complémentaires. Et toi ? »

« Moi, c’est plus le Thrash tu vois. Les syncopes, les riffs saccadés, l’énergie. Je kiffe. Et toi mec ? »

« Moi ? Le Death suédois des années 90. Tu vois le truc genre bien bourrin, mais qui reste fin quand même »

« On a tous des goûts différents en fait ! »

« Ouais, mais on s’aime bien quand même… »

« Clair. Mais t’imagine si on arrivait à trouver un groupe qui synthétise tout ce qu’on aime, genre, sur le même album, sans que ça sente le bricolé ? »

« Un genre de Heavy/Thrash/Death, catchy, violent, mais accessible et mémorisable ?

« Ouais, un truc dans le genre… »

« Bah ça serait frais, mais je rêve pas trop ».

 

Cette conversation purement imaginaire, aurait pu être entendue dans un lycée ou sur le parvis d’une salle de concert au début des années 2000. Et elle aurait été parfaitement logique, puisque le Metal, depuis la fin des années 80 a toujours fait preuve d’ouverture, et d’un sens aigu du métissage. Il suffisait d’y croire et de ne pas penser que c’était impossible.

Dès lors, nos trois amis qui n’existent pas mais qui pourraient exister aurait eu de quoi se réjouir, en attendant quelques années. Quelques années qui les auraient rapprochés de 2017 et de la sortie du premier album des Espagnols de THYRANT. Car leur What We Left Behind résume exactement leur désir profond, sans pour autant paraître inopportun, ou même forcé. Mais avant d’en parler, un petit saut dans le passé.

L’histoire de THYRANT y trouve justement ses origines, pas plus originales que celles de n’importe quel autre groupe.

Au départ, une simple bande de potes qui se connaissent depuis les bancs de l’école, et qui après vingt ans d’amitié, se décident à faire de la musique ensemble, puisqu’ils se connaissent par cœur et partagent le même point de vue créatif.

Ainsi, Daniel Perez (chant), J.Merida et Miguel Navarro (guitares), Rubens Oliver (basse) et Miguel Vegas (batterie) ont patiemment attendu que les circonstances leur soient favorables pour monter leur propre projet, en 2015. D’abord sans nom, le nouveau-né s’offre une mise en place et un concept en salle de répétition, ou la genèse de ce fameux et si attendu premier album prend doucement forme. Puis, après neuf mois de travail, le quintette s’enferme dans les studios Artesonao pour accoucher de huit morceaux, qui se veulent témoignages des inclinaisons toutes personnelles de chaque membre du combo. Quelles inclinaisons ? Ce sont encore eux qui en parlent le mieux en une seule phrase aussi sibylline que lapidaire.

« Notre hommage à IRON MAIDEN et toute la scène underground scandinave des années 90. Mais peut-être sommes-nous les seuls à l’avoir remarqué ».

Assertion assez cocasse en soi, contre laquelle je me porte en faux. Non messieurs de THYRANT, vous n’êtes pas les seuls à l’avoir remarqué, moi aussi, et j’en suis resté assez estomaqué. Vous avez en effet réussi à synthétiser les mélodies et le mordant de Steve Harris and co., et l’agressivité notoire du Death à tendance BM des EDGE OF SANITY, des AT THE GATES et autres exactions nordiques faisant la jonction entre crudité et efficacité.

En gros, vous êtes parvenus à créer un hybride de groupe de la NWOBHM, cryogénisé et réveillé dans les années 90 dans un des studios de Dan Swano, avec pour seuls compagnons des haut-parleurs crachant du Doom souffreteux, du Death mélodieux, et du Thrash ambitieux.

Dès lors, les musiciens perdus dans le temps ont dû réapprendre à jouer, sans oublier leurs horizons d’origine, et ainsi créer un crossover gigantesque entre le Heavy de leur époque, et le Death de la décennie suivante. Et ce qui pourrait sur le papier sonner indigeste, devient d’une redoutable efficacité dans les faits et les chansons.

Alors oui, votre album est un monstre, mais un monstre gentil, qui écrase en disant pardon, et qui éclate les faces en offrant un mouchoir pour nettoyer les larmes et le sang.

En citant des références comme CARCASS, ENSLAVED, IRON MAIDEN, JUDAS PRIEST, ou OBITUARY, les espagnols ont ratissé large, mais ont frappé juste. Car en effet, leur musique est vraiment au carrefour de toutes ces références, au point de créer un nouveau style, qu’on pourrait dans un accès de facilité baptiser « Heavy Death mélodique », avec quelques accents Thrash et Doom pernicieux et parcimonieux histoire d’aérer encore plus la pièce.

Cette pièce se joue donc en huit actes, dont certains font preuve d’un lyrisme cruel indéniable, à l’image de ce terrifiant « Hard Boiling », que MAIDEN aurait pu créer de toutes pièces en compagnie d’un groupe de BM suédois fictif. Huit minutes et quelques de Progressif aussi envoutant que puissant, ménageant des breaks où une basse volubile à la Steve Harris dévore les cases de son manche, tandis que la voix très malmenée de Daniel Perez exhorte le micro à se souvenir des hurlements de Phil Anselmo, huit minutes qui passent comme dans un cauchemar éveillé, mélangeant des souvenirs de Heavy anglais et des réminiscences de Metal de la mort nordique.

Dans le même ordre d’idées, l’imposant final « Carving The Throne », ses dix minutes et sa délicate intro acoustique, se veut longue construction évolutive d’une intelligence rare, osant des riffs majestueux et lourds au sein d’un contexte presque Doom/Death, ne se départissant jamais d’une protection harmonique épaisse. Un tour de force qui accumule les plans sans paraître redondant, et qui suggère tout autant PANTERA qu’ENSLAVED, ou le BATHORY viking repris par un duo spontané entre MORGOTH et HYPOCRISY…Illusion ? Non, simple fait que vous avaliserez après écoute…

Diversité donc, ouverture d’esprit, mais surtout, qualité. Car loin de se vouloir chantres de la convergence histoire de se faire remarquer, les membres de THYRANT cherchent avant tout à vous proposer des morceaux vifs et taillés dans le Heavy le plus concret. Ainsi, le hit « E.O.S » offre une diabolique alternative au CARCASS de Heartwork et Swansong avec son riff simple et direct, en décalquant le plus célèbre mid-tempo de MAIDEN dans un contexte purement Death.

L’entame de « Bury Me » est aussi un modèle du genre, qui après une longue intro venteuse concasse l’espace d’une double grosse caisse pesante, allégée par des licks de guitare à la tierce. A contrario, « Damned At Midnight » retrouve les automatismes de « E.O.S » et signe un autre hymne sans en avoir l’air, mais en lâchant la chanson.

« What We Left Behind » s’offre une mise en jambes Doom assez nébuleuse, et alors que nous sommes en droit d’attendre une cassure de style tout à fait légitime, les THYRANT choisissent de garder le cap histoire de nous prendre à revers. Dès lors, les spectres d’OPETH et MY DYING BRIDE nous caressent les oreilles, ces mêmes oreilles que « Endless Hunt » avait endommagées d’un Heavy Thrash torride et salé.

« De MAIDEN au PRIEST, d’ENSLAVED à OBITUARY, de CARCASS à SLAYER ». Et non, cet argumentaire choc n’est pas que poudre de perlimpinpin, comme le dirait un homme politique connu, mais bien un résumé parfait de l’entreprise de rénovation par le passé entreprise sur What We Left Behind. Un disque qui rend hommage et qui va en susciter plus d’un, mais qui va surtout déchaîner les passions et peut-être unifier une communauté Metal parfois un peu trop déchirée par les tensions et les guerres de clans. Et finalement, nos trois héros fictifs du début de chronique pourront alors se mettre d’accord autour d’un disque qui les fédèrera pour la première fois.

C’est le genre de miracles dont sont capables les THYRANT. Comme quoi, une amitié de vingt ans peut déboucher sur la naissance d’une légende…Peut-être.


Titres de l'album:

  1. Bury Me
  2. Endless Hunt
  3. Delusion
  4. Damned At Midnight
  5. Hard Boiling
  6. What Wa Left Behind
  7. E.O.S.
  8. Carving The Throne

Bandcamp officiel

Site officiel


par mortne2001 le 28/05/2017 à 14:34
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