Where Humanity Ends

Fierce Cult

01/10/2022

Autoproduction

Je sais ce que vous allez me dire. Encore une sortie Thrash. Oui, mais oui, mais pas tout à fait. Je me suis fait le chantre de l’underground revival 80’s depuis des années, et je suis le premier à traquer la nouveauté baston, genre qui me berce depuis plus de trente-six ans, et qui m’a souvent propulsé dans le mur. Mais le cas des ibères de FIERCE CULT est loin d’être aussi simple qu’une énième échauffourée old-school prévisible dans ses moindres coups. D’abord, parce que ces musiciens traînent leur balluchon depuis la fin des années 2010, qu’ils ont commencé leur carrière sous le nom de THE SEED, et qu’ils connaissent donc la chanson. Alors inutile de leur chanter à nouveau avec un air blasé, ils auront tôt fait de vous clouer le bec.

Ces madrilènes remontés comme des Tom Araya après un bon chili proposent donc autre chose qu’une sempiternelle relecture des canons eighties en vogue en Californie ou en Allemagne, et se proposent même de synthétiser plus de trente ans de violence en un seul album, qui en outre est déjà leur troisième. Une étape cruciale dans la carrière d’artistes qui savent que le virage à négocier n’est pas anodin, et Where Humanity Ends est donc aussi conséquent que l’enjeu ne le réclame.

Entre Thrash formel mais intemporel, Death manipulé avec précaution dont la bride n’est lâchée qu’à la bonne occasion, groove Metal compact et musclé, FIERCE CULT se veut melting-pot global des tendances brutales des années 90, 2000 et 2010. Les espagnols avouent d’ailleurs une certaine fascination pour leurs aînés de MESHUGGAH, SLAYER ou MACHINE HEAD, et on le sent au détour du moindre riff aiguisé comme un couperet. Donc, Death/Thrash puisque l’appellation est quand même la plus pratique, mais ces douze titres proposent autre chose qu’un classicisme de facilité et un formalisme de façade. On retrouve l’instinct primaire du SLAYER moderne des nineties, le doigté dans la fluidité de Robb Flynn, mais aussi la facilité rythmique d’EXODUS, la hargne tenace de GRIP INC, et beaucoup d’autres choses aussi savoureuses qu’indispensables.

D’ailleurs, le trio ne s’est pas gêné pour proposer cinquante minutes de musique. Alors que la plupart de leurs homologues arrêtent le chrono sous la sacro-sainte barre des quarante minutes, les madrilènes osent le trop-plein qui justement n’est jamais trop. Tout n’est pas pertinent, tout n’est pas parfait, mais chaque morceau contient au moins un plan percutant ou une idée pertinente, ce qui fait que ce Where Humanity Ends pourrait bien être la fin du monde annoncée par…le groupe lui-même.

The cult keeps growing uglier and stronger every day, the monster never stops   

Le monstre en l’occurrence s’est donc réveillé, et au vu de son humeur, mieux vaut ne pas le contrarier. Et c’est après une courte intro que le déluge de brutalité vous tombe sur le front comme une chape de plomb, même si l’entame « One Shot, One Death » se montre mesurée dans le tempo. D’ailleurs, le rythme global de la machine est assez raisonnable et bien huilé même si quelques accélérations Death fatales en blasts infernaux viennent régulièrement faire monter la température.

Outre les influences déjà citées, on peut aussi souligner que le groove des frères Abbott n’est pas tombé dans l’oreille PANTERA d’un léopard sourd. Ainsi, le teigneux et rapace « Choose Your Gun » aurait largement eu sa place sur l’un des deux albums légendaires de la panthère (entendez par là Cowboys from Hell ou Vulgar Display of Power, veuillez excuser cette crise de subjectivité), et parfois, puisque l’Europe reste le centre des débats, quelques effluves dignes du CHANNEL ZERO le plus concentré se font sentir au détour de plans vraiment coulés.

Thrash donc, principalement, groovy parce que c’est toujours plus percutant en chantant, mais aussi salement méchant lorsque l’intensité monte d’un cran et que le trio franchit les limites. On appréciera donc la vilénie rythmique et le chant hurlé de « Anger », qui porte méchamment bien son nom, et qui nous rentre dans le lard façon précision chirurgicale après un combat en deux rounds.

On pourra peut-être reprocher à l’album d’avoir subi une rallonge qui n’était pas nécessaire, mais les titres ont au moins le mérite globalement d’éviter au maximum la redite. Et comme la combinaison des époques et des genres est toujours pertinente, l’ennui se détourne de nos tympans, spécialement lorsque le trio appuie sur la lourdeur qui fait mal, dans un registre GRIP INC meets SLAYER au bar des psychopathes (« Broken Glass », tendu comme une prostate avant un toucher). La violence, omniprésente sous toutes ses formes fricote parfois avec le Death made in Tampa et nous offre quelques accélérations fulgurantes, soutenues par une technique instrumentale assez précise (« Where Humanity Ends »). Et si quelques fulgurances plus lapidaires et concises furent appréciées à leur juste valeur, la variété des riffs (« Feed on Fear » et ses dissonances déviantes), et ces modulations incessantes de tempo (« Blood ») transforment facilement l’essai de Where Humanity Ends, qui se montre beaucoup plus persuasif et conséquent que bien des albums récents de groupes majeurs, et autres tentatives old-school malhabiles de la jeune génération.

 

FIERCE CULT est donc bien le monstre décrit par ses géniteurs, un monstre intelligent, qui adapte ses réflexes à son environnement, et qui accepte de laisser le passé là où il est quand il le faut, pour mieux se concentrer sur ses massacres présents.

 

                                                                                                                                                                                                        

Titres de l’album:

01. The Beginning...

02. One Shot, One Death

03. Share My Death

04. Choose Your Gun

05. Anger

06. Broken Glass

07. Where Humanity Ends

08. Feed on Fear

09. Bite the Hand

10. There's Something in My Dreams

11. Blood

12. ... Of The End


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par mortne2001 le 10/06/2022 à 17:32
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