Where Myth Becomes Memory

Rolo Tomassi

04/02/2022

Eone Music

Where Myth Becomes Memory is the furthest ROLO TOMASSI have ventured down the rabbit hole and they’ve come out the other side with the most lofty, beguiling and elegant record of their career so far. This is becoming second nature to a band constantly pushing beyond the boundaries and limitations of their origins in order to find something transcendental yet savage at the same time. 

 

En gros, et pour les non-anglophones, ROLO TOMASSI vient de sortir son magnum opus, ne s’est jamais aventuré aussi loin, et a transcendé ses racines pour proposer son album le plus audacieux, envoutant et élégant. Il faut afficher une sacrée confiance pour laisser ces mots comme acte de naissance sur son Bandcamp, mais le combo de Brighton/Londres/New Jersey n’a jamais été réputé pour faire preuve de fausse modestie. Alors, la circonspection est de mise, spécialement après avoir encaissé les chocs successifs de Time Will Die And Love Will Bury It et Grievances, en gardant cette question en tête : les anglais étaient-ils capables d’aller encore plus loin et de pondre un chef d’œuvre en guise de sixième album ?

Connaissant leurs capacités individuelles et leur force collective, la réponse était en amont déjà affirmative. Aussi imperfectible eut semblé Time Will Die And Love Will Bury, on savait très bien que James Spence et Eva Korman en avaient encore sous le coude, et c’est justement en clôturant cette trilogie qu’ils ont trouvé la force d’expérimenter encore plus pour pondre l’un des albums les plus riches de cette année 2022, qui accuse pourtant seulement un mois et une semaine d’existence.

Si la critique s’est souvent amusé des comparaisons possibles entre ROLO TOMASSI et DILLINGER ESPACE PLAN, c’est que les deux groupes ont toujours partagé cette envie d’aller plus loin que leurs origines, de transcender le chaos pour en faire émerger la beauté enfouie. Très énervés lors de leur jeunesse, James et Eva ont d’abord posé les bases de la déconstruction, avant de remonter la machine selon un plan très précis. S’éloigner de la matrice Mathcore pour se rapprocher d’un Post-Hardcore non contemplatif, mais efficace et dangereux. A ce titre, « Almost Always » et son titre un peu cryptique regarde en arrière et propose une sorte de synthèse dans la pureté avant d’aller plus loin vers le lapin et le chapelier. Et après un départ somme toute assez convenu, à base de strates de guitares empilées comme des palettes pour voir au-dessus du mur, la grâce d’Eva prend la tangente, et s’oriente vers des accents Dream Pop qui pourront étonner. En tant qu’ouverture, « Almost Always » est la perfection même, combinant la puissance ouverte des tendres années, et les concessions mélodiques de l’âge adulte. Le clavier dispense ses notes avec parcimonie, tandis que les volutes vocales volent comme des nuages au-dessus d’un ciel plombé. En six minutes, « Almost Always » valide le retour de l’enfant prodige, mais nous avertit en même temps des complications à venir : cet album ne sera décidément pas comme les autres qui n’étaient déjà pas comme les autres.

Et quand bien même « Cloaked » renoue avec la noirceur de son riff aussi formel qu’une sentence de fin de vie, ses cris dispensés avec une rage coutumière, « Mutual Ruin » s’amuse beaucoup de ses multiples combinaisons, entre harmonies vraiment malmenées et Hardcore peu ménagé. ROLO TOMASSI est toujours lui-même bien évidemment, mais aménage des espaces de fuite au cas où les choses tourneraient trop bien. La production, exemplaire, laisse la basse gronder, mais accorde aux claviers l’assisse dont ils ont besoin pour lutter contre des guitares déchaînées. Le climat est tendu come un sommet politique, mais les sentiments se veulent plus à nu, comme si l’émotion se devait d’être plus perceptible que le séisme qui se glisse sous nos pieds. On ne dira pas que le groupe accomplit ici des prodiges dont on ne le croyait pas capable. Malgré la transformation par petites ou grosses touches, l’ambiance reste la même que sur les albums précédents, mais c’est le soin apporté aux détails qui frappe. Chaque note semble parfaitement à sa place, chaque intervention d’Eva sonne juste, et chaque break intervient pile au bon moment.

D’aucuns diront qu’une percussion entre les DEFTONES et VENOM PRISON aurait pu produire un tel choc. C’est en partie vrai, même si les facilités ont été gommées du dictionnaire.

Every ROLO TOMASSI album shows signs of growth but Where Myth Becomes Memory serves as a culmination of a period of creativity that has exalted Rolo Tomassi to legendary status.      

 

Encore une fois, cette assurance désarçonne du cheval du doute. Bien sûr, « Closer » peut justifier à lui seul cette confiance, avec sa mélodie à l’économie qui n’est justement pas sans rappeler les instants d’introspection et de fragilité de NINE INCH NAILS. Le choix d’un enrobage Pop pourra aussi surprendre, comme si la densité passait aussi par l’aération, sans que l’album ne souffre d’incohérence artistique. Il sera toujours possible de regretter les charges virulentes d’antan, mais elles sont toujours là, tapies dans l’ombre, et prêtes à exploser à tout moment à l’image du ténébreux « Drip », exercice EBM/Tripcore de premier ordre.

La rythmique, au service de la direction, se fait parfois plus discrète, voire absente. Elle se rattrape à mi-parcours en imposant son beat bancal ou solide, et donne au ventre de l’album les abdominaux dont il avait besoin pour rester cambré sur ses positions. Mais une fois de plus, la nuance est la constante, et aucun titre n’est vraiment chaotique juste pour l’être. Les harmonies ne sont jamais loin, quand elles ne sont pas au premier-plan, à hanter le château de leur subtilité fantomatique (« Stumbling »).

Juste-milieu.

Perfection.

Bout du chemin ?

On se demande effectivement si ROLO TOMASSI va avoir la force de puiser en lui-même l’inspiration pour dépasser le niveau de qualité atteint ici, et qui trouve son apogée dans le diptyque final « To Resist Forgetting » / « The End of Eternity ». Dix minutes de synthèse qui expliquent plus ou moins le pourquoi du comment, et surtout, qui valident ces déclarations un peu fanfaronnes, mas pourtant…vraies.

Where Myth Becomes Memory, quand le mythe devient un souvenir. ROLO TOMASSI n’est encore ni l’un ni l’autre, juste une légende, et pas encore un souvenir, grâce à Dieu. Mais dans trente ou quarante ans, lorsque la nouvelle génération découvrira cet album, elle comprendra immédiatement que les plus grands savaient aussi se remettre en question. Et alors, le mythe deviendra un vrai souvenir.    

   

                                                                                                                                                                                                                   

Titres de l’album:

01. Almost Always

02. Cloaked

03. Mutual Ruin

04. Labyrinthine

05. Closer

06. Drip

07. Prescience

08. Stumbling

09. To Resist Forgetting

10. The End of Eternity


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par mortne2001 le 11/02/2022 à 18:16
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